Le stress psychosocial, pour sa part, est un facteur associé aux ECVM au travers de phénomènes mieux connus quoique très imparfaitement connus. Il semble que toute une série de mécanismes d’action soit mise à contribution, à commencer par l’activation métabolique de l’amygdale, une région cérébrale particulièrement impliquée dans la réponse au stress. A l’autre bout de la chaine se situe l’inflammation de la paroi artérielle avec, entre les deux niveaux, d’autres voies de transmission.
Bruit et stress psychosocial : des parentés neurobiologiques ?
Le bruit et le stress psychosocial partagent-ils au moins en partie ces mécanismes potentiellement pathogéniques ? Cette question en forme d’hypothèse est à l’origine d’une étude de cohorte prospective dans laquelle ont été inclus 499 sujets (âge moyen, 56 ± 13 ans), indemnes de MCV ou de cancer évolutif à l’état basal. Une tomographie d’émission par positons (TEP) cérébrale, couplée à une tomodensitométrie (TDM), a été réalisée après injection IV d’un analogue du glucose, en l’occurrence, le 18F-FDG, lors de l’inclusion dans l’étude. Chez 281 participants, cet examen a permis d’estimer de manière semi-quantitative deux paramètres : d’une part, le niveau d’activité de la région amygdalienne par une méthode semi-automatique validée, et d’autre part, l’inflammation artérielle par une méthode manuelle permettant de choisir les régions d’intérêt (artères et bruit de fond). Par ailleurs, le niveau de bruit moyen pendant 24 heures a été estimé au domicile de chaque participant en recourant à une échelle définie dans le cadre de la Department of Transportation’s Aviation and Highway Noise Map. Les données ont été traitées à l’aide de la méthode des risques proportionnels de Cox, des tests de Kaplan-Meier et d’une l’analyse de médiation.Bruit élevé, risque cardiovasculaire élevé…
Cette étude prospective fort élégante par sa méthodologie établit une association significative entre bruit environnemental et risque cardiovasculaire en impliquant un mécanisme d’action neurobiologique nouveau. Ce dernier reposerait sur une activation de l’amygdale couplée à une inflammation de la paroi artérielle, les chaînons intermédiaires restant à découvrir. Il va sans dire que ces résultats doivent être répliqués sur d’autres cohortes avant de s’embarquer dans des considérations futuristes et des conjectures audacieuses. La piste n’en est pas moins intéressante au point d’attiser une saine curiosité… et de susciter quelque bruit en épidémiologie cardiovasculaire.
Dr Philippe Tellier