HBP : le rapport 2018

La prise en charge de l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) et de ses symptômes urinaires représente une des préoccupations quotidiennes des urologues depuis des décennies. L’HBP est ainsi une des principales maladies de l’urologie avec 7 congrès de l’AFU lui ayant consacré un rapport !

Le rapport 2018, présenté par A. Descazeaud, A. de la Taille et G. Robert, met en exergue les progrès permettant une prise en charge personnalisée. Les armes à disposition des médecins combinent 3 approches : l’hygiène de vie, les traitements médicamenteux et la chirurgie, qui vient, le plus souvent, en 2e ou en 3e ligne. La prise en compte de la vie sexuelle du patient, ses comorbidités, ses attentes et sa qualité de vie sont des facteurs essentiels de personnalisation du traitement.

Pratiques au fil des siècles et épidémiologie

Après un bref rappel de la prise en charge de l’HBP au fil des siècles, et la présentation des données épidémiologiques les plus récentes, les auteurs proposent une évaluation des conséquences de l’obstruction prostatique et de la désobstruction sur le fonctionnement vésical. Les causes des récidives après traitement chirurgical sont également analysées.

Quels facteurs de risque d’HBP ? 

En s’appuyant sur une revue de la littérature (entre 2000 et 2018), A. Descazeaud, A. de la Taille et G. Robert définissent ensuite les facteurs de risque potentiellement modifiables associés au développement et à la progression des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) liés à l’HBP. L’activité physique et la lutte contre le syndrome métabolique semblent être les facteurs les plus importants. L’éducation des patients est ainsi essentielle et chaque malade peut, en modifiant son hygiène de vie, contribuer à prévenir le développement ou la progression de l’HBP. 

Quelle évaluation clinique ?

En ce qui concerne les SBAU liés à l’HBP, l’interrogatoire, l’examen clinique avec TR, l’analyse d’urine, le débitmètre et l’évaluation du résidu post-mictionnel sont quasi systématiques. Le patient doit être exploré de façon personnalisée afin de ne pas méconnaître un diagnostic différentiel ou une complication de l’HBP, par exemple, les urgenturies ou les nycturies isolées sont rarement la conséquence d’une HPB). Le catalogue mictionnel peut aider à comprendre le mécanisme d’une nycturie.

Le dosage du PSA permet d’évaluer le volume prostatique, de détecter un cancer de prostate et de prédire le risque de progression d’une HBP.

L’évaluation de la fonction rénale n’est pas nécessaire dans le bilan, en dehors d’une rétention chronique avec hydronéphrose ou en préopératoire.

L’urétrocystoscopie est indispensable en cas d’hématurie, de suspicion de sténose de l’urètre ou de tumeur de vessie.

L’échographie de prostate, qui permet d’évaluer le volume de la glande, est utile avant la chirurgie ou avant de débuter un traitement par inhibiteur de la 5-alpha réductase. Elle peut aussi évaluer le risque de progression.

Conséquences sexuelles et effets des traitements sur la nycturie

Sont également traités dans ce rapport, les conséquences sexuelles des traitements de l’HBP, l’effet des traitements médicaux et chirurgicaux sur la nycturie et le cas des patients ayant un terrain particulier (diabète, anticoagulants, antiagrégants plaquettaires, insuffisance rénale, calculs, ….). Après une ablation de la prostate, de 15 à 20 % des patients estiment que leur sexualité est améliorée et de 10 à 15 % qu’elle est détériorée. Pour les autres, la chirurgie n’aurait pas d’impact majeur sur leur vie intime.

Les innovations chirurgicales

Enfin, un chapitre entier est consacré aux standards et aux innovations chirurgicales et interventionnelles : laser, adénomectomie coelioscopique et robotique, et autres solutions mini-invasives. Ces dernières permettent de pratiquer une résection endoscopique de la glande en laissant intacts les canaux éjaculateurs. Cependant, ces approches « a minima » sont souvent temporaires et il faudra prévoir 5, 10, ou 15 ans plus tard une nouvelle opération pour réduire le volume de la prostate.

Parmi ces interventions mini-invasives, citons :

L’UroLift et le Rezum deux techniques endoscopiques non ablatives. L’UroLift a pour principe d’écarter les deux lobes prostatiques afin de diminuer l’obstruction sous-vésicale. Elle améliore certains patients sans modifier l’éjaculation.  La thermothérapie par Rezum consiste à chauffer avec de la vapeur d’eau une partie de la glande au moyen d’aiguilles plantées dans la prostate.

L’aquablation est une technique robot assistée sous contrôle échographique pratiquée au bloc opératoire, qui détruit le tissu prostatique avec un microjet de sérum physiologique à haute pression.

Enfin, l’embolisation des artères prostatiques est une procédure de radiologie interventionnelle dont l’objectif est d’occlure les artères à destinée prostatique et qui entraîne une diminution du volume de la glande de 20 à 30 %.

Au total, la chirurgie ablative par résection ou laser garde une place prépondérante. Les chirurgies mini-invasives enrichissent l’arsenal thérapeutique et permettent de mieux coller aux souhaits personnels de chaque patient.

Dr Isabelle Birden

Références
De la Taille A, Descazeaud A et Robert G. Rapport AFU 2018. Hypertrophie bénigne de la prostate. 2018 ; 28 15) : 797 – 874.
112e Congrès français d’urologie (Paris) : 21 – 24 novembre 2018.

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Vos réactions (1)

  • L’adénome prostatique, mes commentaires

    Le 28 novembre 2018

    L’HBP, avec sept congrès et sept recommandations AFU, montre bien les préoccupations assez changeantes des urologues depuis des décennies. Y aurait-il une influence de Big Pharma ?

    Le rapport 2018, présenté par A. Descazeaud, A. de la Taille et G. Robert, au 112 ème congrès de l’AFU, met en exergue les progrès permettant une prise en charge personnalisée dans les pays occidentaux.

    Notons, au passage, que les sages recommandations de l’AFU de 2015 ne sont déjà plus citées en 2018.

    Par contre, pour exercer dans les pays pauvres, les urologues, ne pouvant se payer, ni médicaments, ni appareils modernes, doivent garder les grandes lignes des obligations de cette affection bénigne.

    Presque tous les hommes sont touchés. Les 20 %, non atteints, n’ont pas encore été étudiés. C’est dommage ; nous pourrions en apprendre sur la pathogénie de cette affection répandue chez les animaux.

    Si on peut voir des adénomes volumineux, dès l’âge de 35 ans justifiant une intervention, les adénomes commencent en général vers 53 ans avec des symptômes irritatifs, le petit lobe médian cherchant sa place dans le col vésical qu’il force. Par la suite, s’étant fait sa place, il devient moins agaçant.

    C’est surtout le moment des inquiétudes et des agacements de la période initiale qui justifient des consultations et des prescriptions, d’ailleurs pas toujours bien supportées et vite abandonnées.

    De 53 à 73 ans, 20 ans, aucun traitement médical n’est justifié, ni par des plantes (Tadenan, Permixon), ni par des tisanes (graines de courge, sommités fleuries de l’épilobe). Faut-il les prescrire ? Oui et non ?

    C’est que des firmes pharmaceutiques les vendent avec un succès qui ne se dément pas. Le rôle de l’urologue est d’indiquer aux entêtés le moyen de se procurer ces produits de la façon la moins onéreuse.

    C’est également un moyen de revoir, chaque année ou tous les cinq ans, les porteurs d’adénome. En effet, certains ne se doutent pas de la possibilité d’une rétention aigue d’urine inattendue et irréversible.

    Les alphas bloquants sont parfois efficaces surtout en période initiale : Xatral, Josir, Ormix, Urorec. Ils ont leurs partisans parfois stimulés. Mais les symptômes s’atténuent naturellement et les hypotensions orthostatiques prennent le devant de la scène. Ces médicaments ne tiennent pas la route 20 ans.

    Les antihormones, réducteurs partiels de la testostérone en DHT, comme Chibroproscar, Dutastéride, Avodart ne peuvent séduire que les hommes qui n’ont aucune crainte pour leur virilité déjà disparue.

    Le Cialis, efficace lors des diminutions de rigidité des érections, peuvent séduire les hommes qui ont encore de bonnes indications sur leur virilité encore acceptable. La prise nocturne est un bon moyen de pénétration des molécules dans la verge lors des quatre épisodes de 20 minutes des érections nocturnes.

    Peu d’urologues se targuent d’en expliquer les raisons de ces succès. Prostate, verge, testicule ont des liens qui les unissent pour la reproduction. Ils ne sont pas tous connus, loin de là.

    Dès que les échographies montrent un danger de rétention aigue, mieux vaut prescrire achat et transport d’une sonde CH 18 et de l’huile stérile à ceux qui veulent profiter de la retraite pour un voyage lointain.

    J’ai vu un médecin de 76 ans revenir d’un voyage complet au Pérou avec un caoutchouc dans la verge. Il était tombé en rétention en pleine excursion. Un urologue américain l’avait sondé avec de l’huile de moteur grâce à un tuyau trouvé au bord du chemin du bus, bien nettoyé et bien attaché. Enucléation !

    Pendant cette même période de 20 ans, l’hygiène de vie ne change rien à l’évolution. Les traitements médicamenteux, même efficaces, ne modifient pas la tendance inéluctable à l’augmentation de volume de cette affection et le recours à la chirurgie, qui survient, dans 10 % des cas seulement, vers 73 ans.

    Certes on peut réduire la gêne par des résections de toutes sortes, mais pas le danger, cinq ans plus tard, de la rétention totale et de l’obligation de passer, par en haut, pour une énucléation sous capsulaire, une intervention découverte en 1900 par Freyer. Les Freyer modifiés ont eu un succès un siècle durant.

    C’est l’intervention la plus satisfaisante pour l’opéré comme pour l’opérateur. Il ne faut pas cacher la possibilité d’un saignement post-opératoire, ni la durée de l’hospitalisation, sept fois plus longue.

    La prise en compte de la vie sexuelle du patient, ses comorbidités, ses attentes et sa qualité de vie sont des facteurs essentiels de personnalisation du traitement médical, voire chirurgical.

    Pratiques au fil des siècles. Je ne résiste pas à raconter un autre cas inattendu. Voilà un homme, en 1972, touché par un cancer prostatique démontré par une scintigraphie osseuse, le PSA n’existant pas encore.

    Mais au TR, je ne sens qu’un très gros adénome. Et à l’UIV une distension urinaire importante et symétrique avec une insuffisance rénale urologique menaçante, les confrères du CHU avaient récusé l’indication d’une hémodialyse au vu du cancer métastasé.

    Me souvenant de mes anciens qui énucléaient sans savoir que de nombreux adénomes contenaient des petits cancers inactifs, je l’ai énucléé sans difficulté d’autant plus qu’il n’y avait pas, à l’examen anatomopathologique, de cancer prostatique dans cet adénome. 20 % des cas à cette époque !

    Quinze ans plus tard sous œstrogènes hautes doses, tout à fait satisfait de ce traitement, ce patient refuse avec obstination une conversion vers les analogues en 1987. Il s’en suivra une dispute imméritée.

    Pourquoi l’oubli de ces données ? Les auteurs n’ont tenu compte que de la littérature 2000-2018.

    Pour eux, l’activité physique et la lutte contre le syndrome métabolique semblent être des facteurs les plus importants. Chaque malade peut, en modifiant son hygiène de vie, contribuer à prévenir le développement ou la progression de l’HBP. Bon ! Bien mais ne voyagez pas sans une sonde !

    Le patient doit être examiné de façon personnalisée : hernies inguinales, calculs vésicaux, petit cancer inactif ou déjà métastasé sont des indications d’énucléation sous-capsulaire.

    Conséquences sexuelles et effets des traitements.

    On a vu plus haut les conséquences sexuelles des traitements médicaux de l’HBP. On a oublié de dire que les interventions FREYER conduisent à la rétro-éjaculation, que les MILLIN en incision horizontale peuvent rendre l’opéré impuissant, pas les Freyer.

    Après une ablation de la prostate par l’urètre, 50 % des opérés seront mécontents. Par en haut, 5 % !

    15 à 20 % des patients estiment que leur sexualité est améliorée. 10 à 15 % qu’elle est détériorée. Pour les autres, la chirurgie on l’a vu peut avoir un impact majeur sur leur vie intime.

    Dr Jean Doremieux

    Docteur JEAN DOREMIEUX

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