
Paris, le lundi 31 décembre 2018 –Yuri Deigin, directeur d'une
entreprise russe « spécialisée dans la lutte contre le
vieillissement », affirme que Jeanne Calment n’est pas décédée
à 122 ans… Sa conviction s’est forgée, entre autres, en consultant
des travaux réalisés par deux de ses compatriotes, gérontologue et
mathématicien.
Dans un texte intitulé « J'accuse ! Pourquoi le record de
longévité de Jeanne Calment pourrait être faux », publié sur la
plateforme de blogs Medium, le « passionné de généalogie »
explique que ce record de longévité serait en réalité une immense
escroquerie.
Selon lui, l'Arlésienne Jeanne Calment ne serait pas morte en
1997 à l'âge de 122 ans, mais bien plus jeune, dans les années
1930. Sa fille, Yvonne, officiellement décédée en 1934, aurait pris
sa place pour éviter de payer les droits de succession.
Cette thèse inattendue s'appuie en particulier sur l’évolution
du visage de Jeanne Calment, dont le nez et les oreilles seraient
trop différents entre le début et la fin de sa vie et sur des
ressemblances, jugées confondantes, entre Jeanne Calment âgée et
Yvonne Calment jeune.
Il s’étonne également que l’acte de décès d’Yvonne,
officiellement morte en 1934 ait été réalisé par une personne sans
diplôme médical. Il estime, en outre, que les récits de la doyenne
ne correspondraient pas avec la réalité de l’époque, notamment
celui de sa rencontre avec le peintre Vincent Van Gogh en 1888 dans
le commerce familial.
Enfin, il met en avant un extrait d’un recensement de 1931, où
Yvonne n’apparaît pas, alors qu’elle était vivante à cette
date…
Complètement bancal
Interrogé par Le Parisien, Jean-Marie Robine, de
l'Institut national de santé et de recherche médicale (Inserm) qui
a participé à la validation du record de la doyenne mondiale
s'insurge et estime cette théorie « complètement bancale (…). A
l'époque, on n'a jamais fait autant pour prouver l'âge d'une
personne (…). On n’a jamais rien trouvé qui nous permettait
d’émettre le moindre soupçon sur son âge. On a eu accès à des
informations qu’elle seule pouvait connaître ».
La prétendue supercherie mise en place par le père et la fille
serait par ailleurs difficile à croire en raison du nombre de
personnes impliquées dans cet hypothétique mensonge. « Vous
imaginez le nombre de personnes qui auraient menti ? Du jour au
lendemain, Fernand Calment aurait fait passer sa fille pour son
épouse et tout le monde aurait gardé le silence ? C’est
abracadabrantesque ».
« On sait que des cas de substitution peuvent exister. Par
exemple, quand des familles font passer l’enfant cadet pour l’aîné
en cas de mort prématurée de ce dernier afin de ne pas perdre le
prénom qui était aussi celui du grand-père. Dans le cas de
centenaires vivant aux États-Unis, on sait que certains se sont
vieillis pour avoir l’âge d’entrer en Amérique. Mais dans le cas de
Jeanne Calment, il n’y a aucune étude qui montre qu’une telle
pratique pour éviter de payer les frais d’héritage ait pu être
répandue à l’époque ».
Concernant le recensement manqué, il explique « il y a des
ratures et des croix partout quand vous ouvrez les livres de
recensement de l’époque, souligne le scientifique. Pour Jeanne
Calment, pour ma famille ou pour la vôtre ».
Frédéric Haroche