Plus de 60 % des oncologues gynécologues déclarent avoir subi un harcèlement sexuel
« Si le harcèlement sexuel est une question sociétale
généralisée, il faut savoir aussi qu’il touche toutes les classes
de la société, et plus particulièrement de nombreuses femmes
médecins – et comme le montre cette étude, certains hommes
également –, au cours de leur formation, mais aussi dans leur
pratique. Il faut donc que des organisations telles que la nôtre
sensibilisent le public pour rendre le lieu de travail plus sûr et
plus équitable pour tous », a commenté Merry-Jennifer Markham
(Floride) au nom de l’ASCO à propos de l’enquête menée auprès des
membres de la société d’oncologie gynécologique américaine.
Cette enquête a révélé en effet que 64 % des répondants ont
subi un harcèlement sexuel lors de leur formation ou durant leur
exercice. Et ce sujet semble encore tabou car seuls 10 % des sujets
ont rapporté l’incident aux autorités compétentes (17 % des femmes
et 10 % des hommes).
Les raisons les plus fréquentes pour ne pas déclarer ces
incidents étaient « que l’incident ne semblait pas assez
important » (40 %) ou « que rien ne serait fait » (37
%), ou encore « la crainte de représailles » (34 %). Autre
constat affligeant : les femmes plus souvent que les hommes (34 %
et 10 % respectivement) pensent que leur genre les a limités dans
leur plan de carrière, leur avancement professionnel et leurs
prétentions financières (42 % et 6 % respectivement). « Ce
sujet, largement abordé dans les médias pour l’industrie du cinéma,
celle des variétés et le monde du sport, est rarement évoqué dans
la communauté médicale où il se limite le plus souvent à des
anecdotes personnelles racontées à l’abri des regards », a
constaté Marina Stasenko (Memorial Sloan Kettering Cancer
Center, New York), auteur principale de cette étude. « Sans
être féministe, on peut affirmer aussi que les disparités entre les
sexes ont persisté en médecine malgré un nombre croissant de femmes
médecins. »
Pour information, cette étude avait été conçue pour évaluer les
préjugés sexistes perçus, la prévalence du harcèlement sexuel dans
la formation et le lieu de travail, et l’impact du genre et du
harcèlement sur l’avancement de la carrière. L’étude a été
modélisée partiellement au départ d’une enquête de l’Association
of American Medical Colleges menée depuis 2012. L’enquête,
anonyme, a été envoyée en octobre 2018 aux 1 566 membres médecins
de la Society of Gynecologic Oncology et a obtenu 402
réponses (26 %) dont 255 chez les femmes et 147 chez les
hommes.
Outre les résultats mentionnés plus haut, les auteurs ont insisté
sur le fait que les formes les plus fréquentes de harcèlement
sexuel étaient : d’être soumis(e) à des remarques sexistes (51 %
des femmes et 24 % des hommes), de se voir refuser des possibilités
de formation (33 % des femmes et 19 % des hommes), de subir des
avances sexuelles non désirées (23 % des femmes et 28 % des
hommes), de se voir demander des faveurs sexuelles en échange d’un
accès à des postes académiques (4 % des femmes et 2 % des hommes).
Enfin, 31 % des femmes et 14 % des hommes ont déclaré avoir reçu
des évaluations ou un poste académique inférieur à leurs
compétences en raison du harcèlement ; et 57 % des femmes
perçoivent l’existence d’un écart de rémunération entre les sexes,
comparativement à 9 % des hommes.
« Il reste encore du pain sur la planche » ont conclu les
auteurs qui ont été aussi critiqués dans leurs conclusions au cours
des questions-réponses, preuve du chemin qui reste à
parcourir…
Article intéressant car les deux sexes ont été "interrogés" sur leur vécu (ressenti subjectif et réalité matérielle) autour d'une discrimination secondaire au genre d'appartenance.
Les déviations sociétales banales dans le cadre du travail comme les remarques sexistes (51 % des femmes et 24 % des hommes) ne peuvent pas être assimilées réellement à du harcèlement mais sont terriblement fréquentes. Au contraire, la demande de faveurs sexuelles en échange d’un accès à des postes académiques (4 % des femmes et 2 % des hommes) reste apparemment marginale mais toucherait une personne sur 16 et parmi celles-ci deux femmes pour un homme ... ce qui n'est pas rien! Enfin, le deuxième volet de l'enquête interroge un champ différent du "sexual harassement" puisqu'il pointe la différence de rémunération à compétences et tâches égales (57 % des femmes perçoivent l’existence d’un écart de rémunération entre les sexes, comparativement à 9 % des hommes) : nous ne sommes plus vraiment dans le harcèlement mais dans l'inégalité de reconnaissance professionnelle secondaire au genre d'appartenance.