
Paris, le vendredi 16 août 2019 - Pour la première fois depuis le début du mouvement de grève aux urgences en mars dernier, la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) a réalisé son propre recensement des services mobilisés.
Selon cette institution, 195 SAU (Service d’accueil des urgences) participent au mouvement, à comparer aux 218 répertoriés par le collectif Inter-Urgences. En dépit de la différence observée, le collectif remarque que ces estimations proches de ses chiffres témoignent « du sérieux » de sa démarche et devraient inciter les pouvoirs publics à entendre ses revendications : l’arrêt des suppressions de lits, de nouveaux recrutements et une augmentation de 300 € pour les personnels des urgences.
Cependant, le ministère pourrait ne pas totalement partager cette lecture de la situation. Il observe en effet que « la mobilisation est très diverse et en déclin à certains endroits », notamment dans les Hôpitaux de Paris (AP-HP), où le taux de grévistes « se situe aujourd’hui autour de 10% à 15% » contre « 30% au début de l’été ». Il remarque encore que des négociations ont contribué à des « protocoles de sortie de grèves » dans 28 établissements, dont sept à l’AP-HP. Par ailleurs, concernant les services toujours en grève, le ministère n’exclut pas que certains le demeurent en « solidarité alors même que les situations ont été réglées localement ». Cette formulation est jugée « présomptueuse » par le collectif qui estime « que rien n’est encore effectif pour l’amélioration des conditions d’accueil » et cite un certain nombre d’incidents survenus ces derniers jours.
6 jours et 12 heures sur un brancard
« A Saint-Quentin le record de Saint-Etienne a été battu hier, avec un patient de 70 ans stagnant aux urgences pendant 6 jours et 12 heures. Un record dans un contexte où la direction fait la sourde oreille sur les revendications du personnel » illustre ainsi le collectif, qui poursuit :
« dans un hôpital du nord parisien ce week-end, sept infirmiers étaient en poste au lieu de onze. Pour assurer l’accueil il n’y avait qu’une seule infirmière au lieu de trois, induisant des temps d’attente avant évaluation des patients de 40 minutes (…). Dans ce contexte un patient est tombé dans le coma avant d’être vu, et a été transféré en réanimation après les premiers soins d’urgences ».
Dans cette affaire, le collectif révèle qu’ « après avoir fait peser la responsabilité sur l’infirmière d’accueil, [l’encadrement] s’est voulu rassurant auprès des équipes en leur disant que l’affaire serait étouffée. Le patient étant sans domicile fixe, peu de chances en effet d’un recours au pénal. Nous souhaitons, à travers ce communiqué, remercier le management de culpabiliser les agents pour ne pas avoir su effectuer seul le travail de trois personnes » et de ne pas manquer d’un certain cynisme vis-à-vis des patients quant à leur situation sociale.
Compte tenu de ces éléments concernant la situation actuelle des urgences, le collectif continue à juger totalement insuffisantes les rallonges budgétaires annoncées jusqu’à aujourd’hui. Hugo Huon, président du collectif Inter-Urgences et infirmier à l’hôpital Lariboisière à Paris dénonce ainsi dans Le Figaro : « 70 millions en l’état des choses, c’est ridicule. C’est typique de la stratégie du gouvernement qui joue l’essoufflement ».
Cependant, le ministre de la Santé et des Solidarités a assuré hier qu’il annoncerait très prochainement de nouvelles mesures en lien avec les premières recommandations du député LREM Thomas Mesnier et du chef du Samu de Paris, le professeur Pierre Carli.
« On attend au tournant la fameuse solution d’Agnès Buzyn.
Si cela se finit par une "boîte à outils" on va bien rigoler »
prévient Hugo Huon qui dit espérer à parvenir à « fédérer tout
l’hôpital » dans ce mouvement social.
X.B.