
Paris, le samedi 21 décembre 2019 – L’année qui s’achève a été marquée par l’annonce d’une réforme majeure concernant la première année commune aux études de santé, symboliquement marquée par la suppression du numerus clausus. Si l’ensemble des acteurs pressaient les pouvoirs publics de s’orienter sur cette voie, la désillusion est forte aujourd’hui alors que le projet du gouvernement manque considérablement de clarté. Ainsi, trois organisations d’étudiants, représentant les futurs médecins, pharmaciens et kinésithérapeutes manifestent dans cette tribune leur déception et leur souhait d’une réforme répondant réellement au défi soulevé.
Par Roxane Hellandsjö-Prost, présidente de l’Association Nationale des Etudiants en Médecine de France, Gautier Davrainville-Simonato, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France et Hadrien Thomas, président de la Fédération nationale des étudiants en kinésithérapie.
L’avenir du système de santé se dessine aujourd’hui avec tous les changements inhérents aux projets de transformation du secteur. Le vieillissement de la population, le numérique, l’intelligence artificielle ou encore l’exercice coordonné viennent bouleverser des concepts établis depuis un demi-siècle. Ces évolutions impliquent l'ensemble de la société : État, professionnels de santé, citoyens et étudiants. Faire marche commune semble constituer l'évidence qui mènera à un système transformé, inclusif et multidisciplinaire.
Multiplier les collaborations et coordonner les acteurs, c’est la voie que prend notre futur système de santé. Le décloisonnement des professions sera une force pour la prise en charge des patients. Les évolutions du système vont engendrer de nouveaux métiers. Les barrières historiques entre les différentes professions de santé n’existeront plus mais laisseront la place à des pratiques nouvelles repensées par compétences au plus près des besoins des territoires.
Notre vision de la santé place le patient au cœur d’une médecine personnalisée et moderne. Chaque professionnel de santé s’adaptera à la singularité du patient, parce qu'il n'exercera plus seul et qu'il sera accompagné de nouveaux outils. Ce parcours doit être continu de la ville à l’hôpital. On ne systématise pas un parcours, on le crée au fur et à mesure des besoins du patient. L’accessibilité aux soins est revue face à la disponibilité et aux compétences de chaque profession de santé. Nous voulons redonner du temps aux professionnels pour intégrer le patient dans une relation humaine le reliant à ses soignants. La formation des étudiants est la base d'un système de santé que nous souhaitons co-construit avec l'ensemble des parties prenantes.
Reproduction de pratiques passées et dépassées
À défi majeur, réforme ambitieuse. La fin du Numerus Clausus et de la Première Année Commune aux Etudes de Santé (PACES) annoncée par le Président de la République devait nous permettre de repenser l’entrée dans les études de santé. Fin de la voie d’entrée unique, du bachotage et introduction d’une sélection respectueuse de la diversité des profils et de l’impact humain sur les futurs étudiants, nombre d’objectifs nobles devaient être les piliers de cette réforme. Mais aujourd’hui l’heure est à la désillusion. Devant des textes aussi flous, et l’absence de moyens financiers suffisants de la part de l’Etat, les seules possibilités que l'on nous offre sont la reproduction de pratiques passées et dépassées.
À la volonté d'une transformation imminente du système de santé, on nous répond par une réforme s’étalant sur des années. À la volonté d'une transformation en profondeur, on nous répond par la promesse du statu quo.
Finalement, le recrutement des étudiants ne changera pas et
peut-être pourrons-nous espérer un léger renouveau des programmes.
Pourtant les discours sont unanimes : changer le paradigme du
système de santé ne se fera pas sans une formation efficiente des
futurs professionnels de santé.
Les futurs étudiants ne savent toujours pas à quoi va ressembler
leur première année de formation. Comment susciter des vocations en
repoussant l'échéance du changement. Nous y sommes prêts. La
décision est entre les mains des Universités.
La réforme se voulait ambitieuse. Force est de constater qu’elle a, aujourd’hui, perdu de vue ses objectifs. Ne laissons pas le manque de temps expédier la formation des futurs soignants et condamner l’avenir de la Santé en France !