
Les troubles du sommeil sont intimement liés au trouble du
spectre de l’autisme (TSA). Ils ont un impact considérable sur le
TSA, notamment concernant l’attention, le comportement, la
régulation émotionnelle, et globalement la qualité de vie. On
considère aujourd’hui que les troubles du sommeil et l’autisme
pourraient avoir des causes communes, mais la nature du lien
complexe entre sommeil et autisme reste encore mal comprise. Les
troubles du sommeil touchent 80 % des enfants avec TSA et
constituent bien souvent la plainte numéro 1 des
parents.
Fréquents et souvent réfractaires aux mesures d’hygiène du
sommeil, les troubles du sommeil chez les enfants autistes sont
marqués par les difficultés d’endormissement, la fréquence du
décalage de phase, ainsi que les réveils nocturnes.
Biologiquement, on retrouve chez les patients autistes une
diminution de la production de mélatonine, mais également une
diminution de la variabilité de la mélatonine entre le jour et la
nuit. Pour un tiers des patients, on ne retrouve pas de cycle
circadien de la production de mélatonine.
La mélatonine n’agit pas que sur le sommeil
Les anomalies précoces de la production de la mélatonine ont
un effet sur le développement de l’enfant en interférant avec la
constitution de l’architecture du sommeil dans les premières années
de vie. De plus, la mélatonine participe à la synchronisation des
grandes fonctions biologiques (dont, par exemple, le cortisol). Une
anomalie dans le cycle de la mélatonine pourrait ainsi rendre
compte des difficultés d’adaptation des enfants autistes avec leur
environnement. Enfin, le développement des capacités de
communication passe normalement par la synchronisation avec son
environnement social, perturbée chez les autistes par la
désorganisation de la production de mélatonine. On peut ainsi faire
l’hypothèse d’un lien entre le sommeil, la mélatonine et les
capacités de communication sociale.
La première stratégie thérapeutique des troubles du sommeil de
l’autisme consiste dans le renforcement des « Zeitgebers »,
c’est-à-dire des repères contribuant à la régularité de la vie des
enfants. Il faut ainsi fixer les heures du coucher, des repas, des
activités scolaires etc… Ces mesures, qui nécessitent l’implication
des parents, sont à mettre en place en plus des recommandations
d’hygiène du sommeil plus classique (environnement propice au
sommeil, limitation de l’exposition à la lumière, mise en place
d’un "rituel" pour le coucher…). On estime qu’environ 25 % des
enfants vont améliorer leur sommeil avec cette approche (ce qui est
nettement inférieur à ce que l’on constate en l’absence de TSA).
Dans tous les cas, la prise en charge comportementale est une
condition sine qua non de l’efficacité des mesures pharmacologiques
introduites dans un second temps.
Comment prescrire la mélatonine chez l’enfant ?
Une étude évaluant le Slenyto contre placebo chez 125 enfants
sur 13 semaines a montré une augmentation du temps total de sommeil
de 57 minutes (contre 9 minutes dans le groupe placebo, p = 0,034),
ainsi qu’une diminution de la latence d’endormissement de 39
minutes (contre 12 minutes dans le groupe placebo), associé à une
amélioration de la qualité de vie. On retrouve une somnolence chez
23,8 % des patients (contre 12,3 % dans le groupe placebo), ainsi
que des maux de tête chez 13,3 % des patients (contre 6,2 % dans le
groupe placebo). Cet essai a été poursuivi par une étude en ouvert
sur 2 ans qui a confirmé la bonne tolérance à long terme du
traitement (contrastant avec les risques associés à la prescription
des hypnotiques, benzodiazépines ou neuroleptiques au long cours).
Il n’y a pas eu de syndrome de sevrage ni d’effet rebond à l’arrêt
de la molécule. Aucune accoutumance n’a été observée pendant le
traitement.
Dr Alexandre Haroche