2019-nCoV : un risque de contamination par des sujets asymptomatiques

L’épidémiologie de l’infection à coronavirus 2019-nCoV, décrite pour la première fois fin décembre 2019, se précise à une vitesse inusitée. Et ceci  grâce à la coordination du travail des cliniciens, des biologistes, des virologues et des médecins de santé publique en Chine mais aussi dans le monde entier, sans oublier la réactivité de la presse scientifique qui contribue à la diffusion quasi instantanée de l’information. 

Comme toujours avec les affections contagieuses, pour bien évaluer le risque et donc adapter les mesures de lutte et de prévention, il nous faut préciser le plus rapidement possible certains paramètres épidémiologiques essentiels et notamment la nature d’un éventuel réservoir animal de virus, les modes de transmission interhumaine, la durée de la période d’incubation, le niveau et la durée de contagiosité et bien sûr la morbimortalité.

Une publication d’une équipe allemande dans le New England Journal of Medicine, le 30 janvier 2020, apporte des réponses pour 2 de ces paramètres fondamentaux.

4 patients Allemands

Camilla Rothe C et coll. de Munich rapportent dans une lettre à l’éditeur les cas très documentés de 5 malades.

Le patient index est une chinoise de Shanghai ayant séjourné à Munich pour affaires jusqu’au 22 janvier 2020, date de son retour en Chine. Durant son séjour en Allemagne, alors qu’elle était totalement asymptomatique, elle a eu plusieurs réunions de travail du 19 au 22 janvier avec des partenaires commerciaux allemands. Lors du vol de retour vers son pays, des symptômes d’infection respiratoire sont apparus qui ont conduit à la pratique d’une PCR. Celle-ci s’est révélée positive au 2019-nCoV le 27 janvier 2020. Les partenaires commerciaux allemands ont été prévenus immédiatement de cette positivité et une enquête épidémiologique a été diligentée à Munich auprès des sujets contacts à Munich (alors qu’elle était totalement asymptomatique). 

Quatre d’entre eux ont présenté des symptômes respiratoires à partir du 24 janvier et se sont révélés être contaminés par 2019-nCoV, PCR à l’appui (avec une charge virale élevée chez le premier patient). Ces 4 malades allemands ont été hospitalisés à Munich et isolés pour rompre la chaine de transmission. A la date de publication de cette lettre ils ne présentaient pas de signes de gravité.

Des conséquences pour la lutte contre l’épidémie

Il est à noter que deux de ces 4 patients n’avaient eu aucun contact avec la malade index chinoise ce qui signifie qu’ils ont dû être contaminés par un des cas contacts allemands en début de période d’incubation.  

Il est donc démontré, premièrement, que des sujets asymptomatiques peuvent être contagieux durant la phase d’incubation, même à son début, ce qui devrait peut-être conduire à revoir nos modèles de propagation de l’épidémie et les mesures de protection nécessaires.

De plus, deuxièmement, la mise en évidence d’une charge virale élevée chez un de ces malades lors de sa convalescence laisse penser que l’excrétion virale, et donc possiblement la contagiosité, peut se prolonger au-delà de la guérison clinique. Pour confirmer ce phénomène inquiétant on doit toutefois attendre les résultats des cultures virales chez ce malade pour s’assurer que le virus détecté par PCR était viable.

Dr Nicolas Chabert

Références
Rothe C et coll. : Transmission of 2019-nCoV infection from an asymptomatic contact in Germany. N Engl J Med 2020 ; Publication avancée en ligne le 30 janvier 2020.

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Vos réactions (2)

  • De la notion de porteur sain et des hôpitaux de campagne...

    Le 01 février 2020

    En France, par principe, un employé est sain, mais la réalité est bien autre, voir, par exemple, le monde de la restauration et les pathogènes alimentaires. Dans le dossier peste porcine africaine, le délai pour un employé pour retourner au travail suite au contact avec des sangliers est de 48 heures. Il est de 72 heures en Belgique. L'on pourrait aussi parler du taux de portage de pathogènes avec x résistance de tous ces personnels rentrant de vacances au bout du monde. Pourtant, on ne les met pas en quarantaine avant de les autoriser à reprendre leur travail ...

    Les mondes médicaux seraient bien inspirés de faire acte d'une grande humilité. Pour être concret, voici deux exemples:

    - comme la construction de ces deux hôpitaux particuliers en Chine en choque plus d'un, il faudrait faire quoi à Paris si une vraie épidémie se produisait: construire des hôpitaux de campagne dans les "bois" de Vincennes et Boulogne ou ?

    - alors qu'il est évoqué une source alimentaire comme cause possible, ils sont où les conseils alimentaire en phase d'épidémie ?

    Pour limiter les problèmes, en phase de crise , on doit avoir anticiper, donc diffuser la science des dangers, alors que l'on se gausse encore trop dans celle des risques…

    Dr Bertrand Carlier

  • Coronavirus ; contagiosité en phase invasive ?

    Le 05 février 2020

    Quand aura-t-on des nouvelles de la mise en culture des virus détectés chez ses 4 patients allemand.
    Car la description de ces cas (https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMc2001468) peut faire craindre que la phase invasive soit à la fois très brève et contagieuse.

    Dr Pierre Blanié

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