La France s’interroge sur la géolocalisation des sujets contaminés

Paris, le samedi 27 mars 2020 – La France veut renforcer son arsenal numérique dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus, en mettant en place un système de géolocalisation des personnes, sur le modèle asiatique. Une option qui soulève des questions éthiques et juridiques.

En Corée du Sud, à Taiwan et en Israël, les citoyens sont désormais surveillés en permanence par les autorités via leurs smartphones, pour mieux limiter la propagation du coronavirus. Avec des résultats probants, puisque ces pays sont parmi ceux qui déplorent le nombre de morts le plus faible depuis le début de la pandémie. Comme sur les masques et les tests, la France tente peu à peu de rattraper son retard sur la réponse numérique à apporter à l’épidémie.

Depuis ce mardi, le Président de la République s’est entouré d’un Comité analyse recherche et expertise (CARE) qui doit plancher sur une « stratégie numérique d’identification des personnes ». Sur le modèle asiatique, la géolocalisation systématique des individus permettrait d’informer les citoyens lorsqu’ils ont été en contact avec une personne contaminée mais également de faire respecter le confinement, puisque les autorités seraient en mesure de savoir à tout moment si les habitants restent chez eux.

Les opérateurs téléphoniques se mobilisent

Plusieurs opérateurs téléphoniques se sont d’ores et déjà dits prêt à prêter main forte au gouvernement dans la mise en place de ce dispositif. Orange a déjà prouvé qu’il était en capacité de géolocaliser ses abonnés, tout en préservant leur anonymat. Dans une étude commandée par les autorités sanitaires, il a ainsi pu établir que 17 % des Franciliens avaient quitté la région parisienne pour la province à l’annonce de la mise en place du confinement le 17 mars dernier.

Orange fait d’ailleurs partie des huit opérateurs téléphoniques qui ont accepté de fournir leurs données de géolocalisation à la Commission européenne. Thierry Breton, commissaire européen, a affirmé que la récolte de ces données n’avait qu’un but épidémiologique, « avec comme objectif clair d’anticiper les pics de contamination », tout traçage systématique des individus étant (pour l’instant) exclu.

Un risque de dérives ?

En France, l’hypothèse d’une géolocalisation des citoyens fait grincer des dents. Beaucoup affiche une certaine réticence à l’idée que les autorités puissent connaitre la position des citoyens en permanence, au mépris de leur droit à la vie privée. Plusieurs députés de la majorité, mais également plusieurs membres du gouvernement, ont exprimé leur opposition. Olivier Véran, ministre de la santé, a ainsi rappelé que « l’impératif sanitaire ne justifie pas d’être aveugle aux enjeux éthiques » et ne se dit « pas convaincu » quant à l’opportunité de suivre le modèle coréen.

Ce mercredi, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a par ailleurs tenu à rappeler à l’exécutif que l’éventuel mise en place d’un traçage des individus devait passer par la loi et respecter certains impératifs fondamentaux, en s’assurant notamment que les données restent anonymes et soient rapidement détruites.

Pour beaucoup d’experts, la géolocalisation serait incompatible avec un certain esprit de français, marqué par la défiance vis-à-vis des autorités et un certain conservatisme quant aux outils numériques. Mais les mentalités changent très vite en ces temps d’épidémie.

Rappelons-nous qu’il y a encore deux semaines, l’hypothèse du confinement restait inenvisageable !

QH

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article