
Face au syndrome de détresse respiratoire aigu occasionné par
le SARS-CoV-2, il n'existe ni vaccin ni médicament dont
l'efficacité clinique est prouvée. Il est encourageant de constater
que la réaction de la communauté des chercheurs à la pandémie de
COVID-19 est vigoureuse. Un examen des registres d'essais
cliniques, en date du 24 mars 2020, a permis d'identifier 536
essais cliniques pertinents enregistrés. Sur les 332 essais
cliniques liés au COVID-19, 188 étaient en phase de recrutement de
patients et 146 se préparaient à recruter. Ces essais cliniques
sont centrés sur les pays riches les plus touchés au cours des deux
derniers mois : Chine, Corée du Sud, pays à revenus élevés d'Europe
et d'Amérique du Nord et peu en Afrique, en Asie du Sud et du
Sud-Est, en Amérique centrale et du Sud.
Or, la capacité des systèmes de santé faibles à gérer une
poussée de pneumonie grave est limitée, et la faible disponibilité
des équipements de protection individuelle (EPI) pour le personnel
de santé de première ligne signifie que ce personnel clé sera
probablement affecté de manière disproportionnée par le COVID-19.
Donc, une perturbation ou une panne complète de ces systèmes de
soins de santé entraînerait une mortalité directe et indirecte
élevée puisque toutes les prises en charge des autres maladies
seraient affectées.
Des obstacles organisationnels et bureaucratiques importants à une réponse rapide de la recherche dans les pays à ressources limitées
Les essais doivent être de grande envergure, bien conçus et
suffisamment puissants pour produire des preuves, en priorisant les
interventions qui reflètent les besoins spécifiques des pays et qui
sont facilement applicables : c’est-à-dire abordables, disponibles
et adaptables aux systèmes de soins de santé et aux populations
qu'ils desservent.
Ne pas surcharger les systèmes de santé fragiles
Autres impératifs, ces essais ne doivent pas surcharger les
systèmes de santé et doivent être conçus de manière à permettre le
déclenchement et la surveillance à distance et à vaincre des défis
supplémentaires liés à l'évaluation éthique, à la réglementation, à
la fabrication, au soutien et à la logistique des essais cliniques,
au partage des données ainsi qu'à l'accès équitable et abordable
pour les patients.
L'autorisation réglementaire - y compris l'importation de produits - est nécessaire pour de nombreux essais de médicaments et de vaccins et, comme pour l'autorisation délivrée par le comité d’éthique, cela peut être très lent. Des procédures d'autorisation accélérées, telles que celles récemment mises en place par l'OMS, l'Agence européenne des médicaments, l'Agence britannique de réglementation des médicaments et des produits de santé et la Food and Drug Administration américaine, sont nécessaires dans tous les pays où des essais auront lieu. En termes de fabrication, la préparation des médicaments et vaccins destinés aux essais cliniques peut nécessiter de nouvelles doses ou formulations et des placebos. De nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire n'auront pas accès à des fabricants respectant les bonnes pratiques de fabrication, ainsi que pour les tests à visée diagnostique.
Une coalition internationale pour la recherche
Afin de relever ces défis et d’accélérer la recherche nécessaire dans ces contextes aux ressources limitées, il est proposé une coalition internationale de recherche qui rassemble les compétences multinationales et multidisciplinaires existantes et les capacités d'essais cliniques. Cette coalition agira en synergie avec les initiatives existantes, telles que l'accélérateur thérapeutique COVID-19, la coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies et le pipeline de diagnostic du SRAS-CoV-2. L’objectif est d'utiliser les capacités de recherche existantes pour soutenir, promouvoir et accélérer les essais multicentriques sur la sécurité, l'efficacité et l'efficience des interventions contre COVID-19 dans ces contextes à ressources limitées.Quatre objectifs
En ce qui concerne la thérapeutique, la recherche devrait se
concentrer principalement sur l'évaluation de médicaments de
reconversion abordables - c'est-à-dire ceux déjà développés et
approuvés pour d'autres indications. Le cas échéant, l'essai de
nouveaux outils de diagnostic, de vaccins et d'autres stratégies
potentiellement bénéfiques sera ajouté aux études. L’objectif n'est
pas de contrôler le programme de recherche, mais de le
faciliter.
2. Faciliter l'approbation de l'importation de médicaments et de matériel d'étude par le biais de mécanismes accélérés coordonnés et convenus.
3. Assurer une collecte standardisée et simple de données clés, suffisante pour une analyse solide de l'efficacité et de la sécurité des interventions testées.
4. Faciliter la recherche COVID-19 dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire en identifiant et en soutenant les chercheurs locaux, les fabricants locaux et les sites d'essais cliniques avec la mise à disposition des capacités de soutien aux essais cliniques et les plateformes d'essais existantes.
Un appel à rejoindre la COVID-19 Clinical Research Coalition
Scientifiques, médecins, bailleurs de fonds et décideurs de plus de 70 institutions de plus de 30 pays participent déjà à cette initiative.« Nous sommes des scientifiques, des médecins, des bailleurs de fonds et des décideurs politiques réunis au sein d'une coalition internationale, la COVID-19 Clinical Research Coalition*, pour soutenir les efforts de l'OMS dans la lutte contre la pandémie de COVID-19. Nous engageons notre expérience, notre expertise et notre capacité d'essai combinées pour accélérer la recherche sur COVID-19 dans des contextes à ressources sont limitées. Nous nous félicitons de la collaboration avec des organisations prêtes à mettre à contribution leurs capacités existantes pour nous rejoindre sur le site web de la Coalition pour la recherche clinique COVID-19 ».
Dr Bernard-Alex Gaüzère