Covid-19, et si c’était une histoire d’allèle

Les récepteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2 angiotensin-converting enzyme 2) sont largement impliqués dans le Covid-19, mais aussi le SARS. Les deux virus SARS-CoV et SARS-CoV-2 se lient en effet à leurs cellules-cibles par l’intermédiaire de ces récepteurs. L’ACE2 facilite l’invasion cellulaire en aidant à la réplication rapide du virus, mais au fur et à mesure de sa déplétion membranaire, la destruction des tissus pulmonaires s’amplifie sous l’effet de l’angiotensine II. L’ACE1 qui agit en amont se caractérise par la fréquence d’un polymorphisme de son gène à type de délétion/insertion siégeant au niveau de l’intron 16, lequel peut influer considérablement sur les concentrations circulantes et tissulaires de l’ACE. C’est ainsi que l’allèle D est associé à une réduction de l’expression de l’ACE2. Certes, l’ACE2 et l’ACE n’ont en commun que 42 % d’acides aminés dans leur formule moléculaire. Elles ne s’en comportent pas moins toutes deux comme des carboxypeptidases qui agissent au niveau des peptides en leur enlevant quelques acides aminés à partir de leur terminaison carboxyl.

Les variations de la prévalence du Covid sont corrélées avec celle du polymophisme du gène de l’ACE1

La distribution du polymorphisme D/I suit d’importantes variations géographiques. Ceci peut-il alors expliquer la prévalence variable de l’infection par le Covid-19 d’un pays européen à l’autre ? L’hypothèse mérite d’être soulevée. Elle est d’ailleurs examinée dans une petite étude transversale, réalisée dans 25 pays européens : Autriche Belgique, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Germanie, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Lituanie, Moldavie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse et Turquie. Une corrélation inverse a été mise en évidence entre la transformée logarithmique de la prévalence du Covid-19 et la fréquence de l’allèle D du gène de l’ACE1 : log (prévalence ; nombre de cas/106 habitants) = 6,358 – 0,079 (fréquence de l’allèle D, %), r2= 0,378; p = 0,001).

La variabilité de la prévalence a pu être partiellement expliquée (à 38 %) par la fréquence relative de l’allèle D du gène de l’ACE1. Par ailleurs, une corrélation significative a été mise en évidence entre la mortalité liée au Covid-19 et la prévalence de ce même allèle, le coefficient de Spearman r étant estimé à – 0,510 (p=0,01). En outre, il s’avère qu’au début de l’épidémie, deux pays asiatiques ont été sévèrement touchés par le Covid-19, en l’occurrence la Chine et la Corée du sud : comme par hasard, la prévalence de l’allèle D y est particulièrement faible.

Ces données suggèrent que le polymorphisme D/I du gène de l’ACE1 pourrait expliquer au moins en partie les variations de la prévalence du Covid-19 en fonction du pays. Cette hypothèse est  en accord avec le rôle que semble jouer l’ACE dans la pathogénie des infections liées aux coronavirus. Par ailleurs, ce polymorphisme pourrait également influer sur l’évolution clinique de la maladie et son pronostic mais cela reste à confirmer sur une échelle géographique plus vaste.

Dr Peter Stratford

Référence
Delanghe JR et coll. : The host’s angiotensin-converting enzyme polymorphism may explain epidemiological findings in COVID-19 infections. Clinica Chimica Acta 2020 : publication avancée en ligne 20 mars. doi.org/10.1016/j.cca.2020.03.031.

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Vos réactions (2)

  • Rôle de l'ACE 1 ou 2

    Le 17 avril 2020

    Ne peut on imaginer que les traitements par inhibiteur de l'ACE soient efficace pour inhiber la fixation du coronavirus?

    Dr Gilles Michel

  • Covid/allèles/angiotensine

    Le 18 avril 2020

    Article très intéressant.
    Les IEC fonctionnant mal chez les populations noires, ceci peut il expliquer l'importance de la population Commorienne atteinte du covid à Marseille ?

    Dr Bernard Ripoll

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