
Diverses sources d’information plaident en faveur d’un impact
négatif de l’obésité sur le pronostic des formes sévères du
Covid-19. A partir des statistiques nationales ou d’observations
émanant de pays tels l’Italie, l’Espagne ou encore les Etats-Unis,
il est possible d’identifier des cas cliniques souvent dramatiques
de jeunes patients obèses chez lesquels l’évolution de la maladie a
conduit rapidement à une insuffisance respiratoire aiguë et au
décès. Les explications à ces drames restent hypothétiques et l’on
peut évoquer pêle-mêle plusieurs facteurs péjoratifs. L’obésité
sévère s’associe volontiers à un syndrome d’apnées du sommeil ou à
un diabète de type 2, ainsi qu’à des altérations de la fonction
respiratoire. Ceci contribuerait au moins en partie à la lourde
mortalité de la maladie dans un pays comme les Etats-Unis où la
prévalence de l’obésité et de la surcharge pondérale est
particulièrement élevée.
Prévalence élevée de l’obésité parmi les formes graves de Covid-19
Cependant, en France, une étude rétrospective (1) émanant d’un
seul centre, sur 124 patients admis en unité de soins intensifs
(USI) en raison d’une forme grave de Covid-19, retrouve, au sein de
cette cohorte, une prévalence de l’obésité (IMC>30 kg/m2) à 47,6
% (28,2 % pour les formes sévères IMC > 35 kg/m2.) La proportion
de patients chez lesquels une ventilation assistée s’est avérée
nécessaire a augmenté avec les valeurs de l’IMC (p<0,01, test du
Chi-2). Elle a atteint sa valeur maximale, soit 85,7 % en cas d’IMC
>35 kg/m2. Une analyse multivariée par régression logistique
multiple a montré que l’indication de la ventilation assistée était
significativement associée au sexe masculin (p<0,05) et à l’IMC
(p<0,05), indépendamment de l’âge, du diabète et de
l’hypertension artérielle. Le risque correspondant exprimé sous la
forme d’un odds ratio (OR) a été calculé chez les patients les plus
obèses (IMC>35 kg/m2), comparativement aux patients de poids
normal (< 25 kg/m2). L’OR a été ainsi estimé à 7,36 (intervalle
de confiance à 95 % : 1,63-33,14 ; p = 0,02). Cette étude
transversale tend à confirmer la grande fréquence de l’obésité chez
les patients admis en USI pour une forme grave de Covid-19. Par
ailleurs, la sévérité de la maladie apparaît étroitement corrélée à
l’IMC, au point que cette dernière semble bien représenter un
facteur de risque majeur qui doit être pris en compte dans sa prise
en charge.
2 à 4 fois plus de risque d’aller en USI quand l’IMC dépasse 30
Au total, 1 853 patients (51 %) ont quitté les services
d’urgence, tandis que 1 331 (37 %) ont été hospitalisés en soins
aigus dont 431 (12 %) directement ou ultérieurement
transférés en USI. L’analyse des données a mis en évidence un
risque d’évolution défavorable en fonction de l’IMC… uniquement
chez les patients âgés de moins de 60 ans. Ainsi, dans ces tranches
d’âge, le risque s’est avéré deux fois plus élevé en cas d’IMC
compris entre 30 et 34 kg/m2, comparativement aux valeurs < 30
kg/m2, l’odds ratio étant respectivement de l’ordre de 1,8
(p<0,0001) et 2,0 (p=0,006) selon que l’admission se fait en
soins aigus ou en USI. Si l’on considère la même tranche d’âge
(< 60 ans), pour un IMC ≥ 35 kg/m2, les valeurs correspondantes
ont été respectivement de 2,2 (p < 0,001) et de 3,6 (p <
0,001), toujours comparativement aux valeurs de référence avec un
IMC 30 kg/m2.
Sans doute le principal facteur de gravité avant 60 ans
Dr Philippe Tellier