La France sur un fil

Paris, le dimanche 3 mai 2020 - Emmanuel Macron ou Edouard Philippe doivent dire au Français, jeudi, si la sortie du confinement pourra bien commencer le 11 mai, mais cette équation à plusieurs inconnues est loin d’être totalement résolue !  

Ce n’est pas une « ligne de crête » c’est un fil !

A tel point que dans le Parisien, Olivier Véran rappelle à ceux qui comptent les jours jusqu’au 11 mai que : « si le nombre de nouveaux malades devait être trop élevé, la date de lever du confinement pourrait être remise en question et appréciée selon les départements ».

En pratique, il faut qu’au 11 mai « il y ait suffisamment peu de malades par jour à tester, tracer et isoler pour réussir le déconfinement ».

Dans ce contexte, selon un indiscret du Journal le Dimanche, le Premier ministre, dans une visioconférence avec des députés du groupe LREM a prévenu « j'ai parlé de ligne de crête, en fait nous marchons sur un fil ».

En effet si le nombre d'hospitalisations et de patients en réanimation poursuit sa décrue, le réseau sentinelles note une forte hausse de l'estimation du nombre de cas de Covid-19 ayant consulté un médecin généraliste (5 977 vs 2846). Une donnée qui peut laisser craindre un rebond de l’épidémie dans les jours à venir. Aussi selon des épidémiologistes le R0 remonterait sensiblement et les mêmes qui prévoyaient l'occupation de 1 500 lits de réanimation au 11 mai, estiment qu’avec 3 827 patients en soins intensifs pour Covid au 2 mai il y a très peu de chance que ce chiffre de 1 500 lits occupés soit atteint. Notons que depuis le 9 avril, on compte environ 230 patients en moins chaque jour en réanimation et qui si cette courbe se prolonge, il y aurait environ 2000 patients Covid + en réanimation le 11 mai.

Tests en masse et brigades Covid : un mirage ?

Au centre de la stratégie du gouvernement, la mise en place de brigades Covid et de tests en masse. Sur le premier point les services du Premier ministre ont adressé à tous les préfets une circulaire, mais impossible de savoir si ces "brigades d’anges gardiens" selon l’expression moins militaire d’Olivier Véran, chargées d'identifier les cas contacts seront opérationnelles le 11 mai.

C’est en effet un véritable défi organisationnel et on estime qu’il faudrait au moins 30 000 de ces brigadiers Covid à recruter en 8 jours !

L'objectif de la multiplication des tests virologiques, indispensable à la politique de sortie du confinement, semble lui aussi difficile à atteindre.

Le ministre de la Santé, Olivier Véran avait fixé à 700 000 par semaine les capacités de tests PCR nécessaires au déconfinement, mais selon François Blanchecotte, président du Syndicat national des médecins biologistes, les laboratoires publics et privés ne réalisent ensemble qu'environ 250 000 tests chaque semaine en ce moment.  Difficile d’imaginer que ce chiffre soit multiplié par 3 en 8 jours.

Les élus se rebiffent

Nouvelle épine dans le pied du gouvernement, les élus se rebiffent contre le plan de sortie du confinement.

Concernant les écoles, beaucoup affirment ne pas disposer de bâtiments assez grands pour permettre le respect de la distanciation sociale. En outre, certains élus pensent qu’ils n’auront pas les moyens suffisants pour entretenir les lavabos, désinfecter le mobilier, poser des marquages au sol, particulièrement dans les petites communes et ils redoutent d'être tenus pour responsables de contaminations par leurs administrés.

Dès lors le ton monte et certains menacent de laisser les écoles fermées, ce qui obligerait les préfets à ordonner des réquisitions.

Leader de cette fronde, le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau prévient que les sénateurs de son groupe saisiront le Conseil constitutionnel notamment sur la notion de responsabilité des élus.

« Emmanuel Macron s'était engagé auprès de Gérard Larcher à traiter la question de la responsabilité des élus locaux. Or, elle est absente du texte » prolongeant l’état d’urgence sanitaire s’indigne Bruno Retailleau.

Le protocole sanitaire de 63 pages prévu pour les écoles « est une défausse. C'est une usine à gaz hors sol qui vise à protéger la bureaucratie et met sur les épaules des élus plus de contraintes qu'ils ne peuvent en porter. Ces règles sont autant de potentielles mises en cause de la responsabilité pénale d'un élu », selon lui.

Le sénateur de Vendée pointe également la stratégie de « contact tracing » qui ne prévoit pas la mise en place d’une instance de contrôle de cette collecte des données.

Pourrait-t-on vraiment ne pas sortir du confinement ?

Au-delà, la question se pose également de savoir si, dans les faits, le gouvernement pourrait annoncer la prolongation du confinement sans se confronter à la colère de la population.

Ainsi, comme le note le Dr Jean Paul Hamon auprès de France Info : « on est dans une course de fond (…) si on ne laisse pas aux gens un peu de respiration tout en respectant les mesures barrières, on va avoir des personnes qui vont se retrouver en burn-out, en complète dépression, parce qu'ils ne supportent plus le confinement. Et puis, on va avoir des problèmes de couple, avec des violences conjugales qui commencent à se produire »…

Certains estiment aussi que la meilleure des solutions serait de maintenir le confinement uniquement là où les services de réanimation demeurent en très forte tension et où le virus circule activement (notamment à Paris et dans sa petite couronne).

F.H.

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