Le risque cardiovasculaire serait aussi élevé dans la PR que dans le diabète

Le risque cardiovasculaire (CV) peut être évalué par divers scores cliniques dont le plus célèbre est celui de Framingham. En Europe, c’est SCORE (Sytemic Coronary Risk Estimation) qui lui est préféré, mais cette approche ne prend pas en compte tous les facteurs susceptibles de favoriser la MCV, par exemple le diabète. Ce dernier est intégré dans la classification européenne du risque CV à quatre niveaux qui est plus globale sans pour autant prendre en compte certaines maladies chroniques telles la polyarthrite rhumatoïde (PR).

Or ce rhumatisme inflammatoire chronique est à même d’augmenter significativement le risque CV du fait de ses mécanismes pathogéniques voire de son traitement qui peut inclure, par exemple, une corticothérapie. D’ailleurs, dans l’estimation personnalisée du risque CV, il est recommandé de rechercher une PR pour adapter au mieux la prise en charge. Force est cependant de reconnaitre que rares sont les études prospectives capables d’estimer avec précision le risque CV encouru en cas de PR.

Les résultats de l’étude de cohorte prospective CARRÉ (CARdiovascular research and RhEumatoid arthritis) méritent à cet égard d’être rapportés, dans laquelle ont été inclus 353 patients atteints d’une PR confirmée. La fréquence des évènements cardiovasculaires majeurs (ECVM) a été évaluée au cours d’un suivi à très long terme (15 ans) au sein de cette cohorte et d’une autre, composée de 2 540 témoins, dont un grand nombre atteint d’un diabète de type 2.

Au total, 95 patients ont été victimes d’un ECVM au cours d’un suivi estimé à 2 973 sujets-années, soit une incidence de 3,20 pour 100 sujets-années. Dans la cohorte témoin, 257 patients ont connu le même sort au cours d’un suivi de 18 874 sujets-années, soit une incidence de 1,36 pour 100 sujets-années.

Au moins 2 fois plus de risque d’événements cardiovasculaires majeurs

Le risque d’ECVM a été calculé sous la forme d’un Hazard Ratio (HR) après ajustement selon l’âge et le sexe : il a atteint respectivement 2,07 (intervalle de confiance à 95 %, IC95% 1,57-2,72, p < 0,01) et 1,51 (IC 95% 1,02-2.22, p = 0,04) en cas de diabète de type 2, comparativement aux participants non diabétiques. Le risque associé à la PR est resté élevé, même après ajustement selon les facteurs de risque CV, le HR étant alors estimé à 1,82 (IC95% 1,32-2,50, p<0,01). L’association d’une PR et d’un diabète- ou d’une insulinorésistance- a conduit à un risque de MCV particulièrement élevé, le HR atteignant en effet respectivement 2,21 (IC 95% 1,01-4,80, p = 0,046) et 2,67, IC 95% 1,30-5,46, p < 0,01 en cas d’insulinorésistance).

Cette étude de cohorte prospective de type cas-témoins illustre la notion de risque CV associé à une maladie chronique telle la PR. Par rapport à une population témoin, le risque CV semble être plus que doublé et même supérieur à celui encouru lors d’un diabète de type 2. L’ajustement selon les facteurs de risque CV traditionnels ne change rien à la dimension quantitative de l’association : faut-il y voir la conséquence de l’inflammation systémique chronique qui caractérise la PR ? Cette hypothèse est plausible, mais cette étude cas-témoins ne permet pas de conclure plus avant. Elle souligne surtout la nécessité de prendre en compte l’existence d’une PR dans l’estimation personnalisée du risque CV global qui doit aller au-delà de SCORE et de la classification européenne du risque CV dont les limites apparaissent clairement.

Dr Philippe Tellier

Référence
Agca R et coll. : Cardiovascular Event Risk in Rheumatoid Arthritis Compared with Type 2 Diabetes: A 15-year Longitudinal Study. J Rheumatol., 2020; 47(3): 316-324. doi: 10.3899/jrheum.180726.

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