
New Delhi, le mercredi 9 septembre 2020 – Le bilan réel de
l’épidémie de Covid-19 en Inde, où 74 000 personnes auraient perdu
la vie, interroge.
Girondins ou Jacobins ? Il y a quelques jours, le JIM se
demandait si, pour être efficace, la gestion de l’épidémie devait
se faire de façon uniforme et centralisé ou particulière et par
territoire. Cette question, qui semble franco-française, concerne
en réalité tous les pays, y compris les plus éloignés de nous. En
Inde par exemple, la forme fédérale du gouvernement met à mal la
lutte contre l’épidémie et perturbe le décompte des morts.
Seulement 74 000 morts officiellement
Officiellement, 74 000 Indiens sont morts du Covid-19 depuis
le début de l’épidémie. Un chiffre important en valeur absolue
(c’est le 3ème pays le plus endeuillé après
les Etats-Unis et le Brésil) mais très faible relativement à
l’énorme population indienne (1,3 milliard d’habitants). Avec 53
morts pour un million d’habitants, l’Inde présente l’un des taux de
mortalité les plus faibles du monde, plus de 10 fois inférieur à
celui des Etats-Unis. Selon le gouvernement indien, ces bons
chiffres s’expliquent par une prise en charge rapide et efficace
des cas graves. Mais, sans vouloir vexer les médecins indiens, il
semble que ces résultats soient surtout dus à un problème de
décompte des cas et des morts.
En Inde, pays fédéral, la santé et la lutte contre l’épidémie
sont du domaine de chacun des 28 États de l’Union Indienne. En
principe, ils sont censés suivre les recommandations de l’OMS et du
gouvernement fédéral selon lequel tout décès suspecté d’être lié au
Covid-19 doit être inclus dans le bilan de l’épidémie. Mais il ne
s’agit que de recommandations et, ces informations n’étant pas
publiques, il est impossible de savoir si les États les suivent ou
appliquent leur propre méthodologie.
Pas de politique fédérale de dépistage
Autre problème, dans les régions les plus rurales et les moins
développés de l’Inde, le décompte des morts liés au Covid-19 et
même des décès en général est particulièrement difficile. Seul 22 %
des morts en Inde font l’objet d’un certificat médical de décès
indiquant la cause de la mort. Dans ces conditions, difficile de
tenir un décompte exact. On notera d’ailleurs que les États qui
comptent officiellement le plus de morts du Covid-19 sont les plus
développés, c’est-à-dire ceux où 100 % des morts sont certifiés
médicalement.
Enfin, dernier problème, chaque État mène sa propre politique
de dépistage. Certains se tournent en effet de plus en plus vers
les tests antigéniques, plus rapide que les tests PCR mais
également moins fiables. Et là encore, les autorités locales ne
communiquent pas sur le taux d’utilisation de ces nouveaux
tests.
Des centaines de milliers de morts ?
Il semble tout de même que petit à petit, chaque
administration modifie sa méthodologie et affine son décompte,
s’approchant du nombre réel de décès. Régulièrement, certains États
rajoutent à leur bilan macabre des morts oubliés. L’État du
Bengale-occidentale (91 millions d’habitants mais seulement 3 400
morts) a ainsi récemment mis fin à sa politique consistant à ne
compter que les morts du Covid-19 ne présentant aucune autre
comorbidité.
QH