SHERLOCK à la recherche du SARS-CoV-2, c’est devenu élémentaire !

La méthode SHERLOCK (Specific High-sensitivity Enzymatic Reporter unLOCKing) qui repose sur la technique d’édition du génome CRISPR (clustered regularly interspaced short palindromic repeats) dite « des ciseaux moléculaires » a fait ses preuves dans la détection des agents pathogènes qu’il s’agisse de virus ou de bactéries. Le virus Zika et le virus de la dengue ont été ainsi les premiers à être identifiés par cette technique à des concentrations aussi faibles qu’une seule copie du virus par µl. Dès le mois d’avril 2020, SHERLOCK a été proposées pour la détection du SARS-CoV2 et s’est révélée prometteuse en termes de sensibilité et de spécificité y compris dans des échantillons salivaires. La procédure s’avère cependant globalement fastidieuse puisque, dans cette première version dite STOPCovid.v1, elle nécessite deux étapes, avec un risque élevé de contaminations croisées des échantillons.

Schématiquement, l’ARN viral est extrait puis amplifié de manière isotherme et déposé dans un milieu réactionnel où sont ajoutés dans un second temps : (1) une protéine Cas chargée de couper cet ARN ; (2) un ARN « guide » qui va positionner cette protéine en un site de l’ARN spécifique du SARS-CoV-2 ; (3) des molécules qui deviennent fluorescentes quand la protéine s’active, ce signal révélant la présence du virus dans le tube à essais.

L’équipe qui maîtrise cette méthode de pointe a entrepris de la simplifier au point de la rendre réalisable en une seule étape. Elle a été baptisée fort logiquement STOPCovid.v2 et est décrite dans le New England Journal of Medicine dans un article dont le titre est révélateur : « Detection of SARS-CoV-2 with SHERLOCK One-Pot Testing ».

Amplification et ciseaux moléculaires en une seule étape

Toutes les réactions se déroulent maintenant en une seule étape à la température fixe de 60°C dans un seul tube à essais en moins d’une heure au prix d’un équipement minimal. L’amplification de la cible virale – par la transcription inverse et la technique LAMP (loop-mediated isothermal amplification)- et la détection du virus par la technique CRISPR se déroulent dans le même milieu réactionnel. Par rapport à leur première version dite STOPCovid.v1, les auteurs ont par ailleurs introduit une méthode de purification protéique par aimantation à la fois pour simplifier l’extraction et augmenter la sensibilité tout en raccourcissant la durée de la procédure.

La sensibilité de STOPCovid.v2 s’avère extrême puisqu’elle a permis, dans le cas du SARS-Cov2, de détecter des quantités d’ARN viral 600 fois inférieures à celles accessibles à la technique RT-PCR standard utilisée dans les CDC (Centers for Diseases Control and Prevention). En termes de charge virale, le facteur multiplicatif est d’environ 30, soit 33 copies/ml versus 1 000 copies/ml.

Beaucoup plus performant que la RT-PCR

Les performances diagnostiques de ce test innovant ont été évaluées dans un laboratoire externe de l’Université de Washington. Au total, 402 échantillons obtenus par écouvillonnage nasopharyngé (dont 202 positifs et 200 négatifs en RT-PCR pour le SARS-CoV2) ont été rétrospectivement analysés. Par rapport à la RT-PCR, la sensibilité et la spécificité de STOPCovid.v2 ont été respectivement estimées à 93,1 % et 98,5 %. La positivité du test est obtenue en 15 à 45 minutes ce qui fait rêver… Une validation prospective a porté sur 15 prélèvements nasaux recueillis conformément aux recommandations des CDC : les cinq positifs ont été correctement identifiés, tout comme les dix négatifs.

SHERLOCK dans sa version simplifiée STOPCovid.v2 se présente donc comme une alternative à la RT-PCR avec des avantages au moins théoriques en termes de simplicité (relative) et de coût. Par ailleurs, les résultats sont obtenus en moins d’une heure ce qui fait de ce test un candidat idéal pour le traçage des patients et explique sa dénomination STOPCovid, quelle que soit sa version : encore faut-il que la méthode soit validée sur une plus grande échelle avant d’être adoptée par des plates-formes dotées de tous les outils de la biologie moléculaire dans les pays qui en ont les moyens. C’est à la fois un défi et une autre histoire… d’autant que l’amplification génique reste un préalable nécessaire à la détection du virus. SHERLOCK à la recherche des cas contacts ? Une éventualité qui se dessine mais qui nécessite encore du peaufinage ce à quoi s’emploient d’ailleurs les auteurs…

Dr Peter Stratford

Référence
Joung J et coll. Detection of SARS-CoV-2 with SHERLOCK One-Pot Testing. N Engl J Med 2020 (16 septembre) : publication avancée en ligne. DOI: 10.1056/NEJMc2026172.

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