
Illusionnisme
Les récits rares, mais réguliers, d’usurpation du titre de docteur en médecine suscitent toujours un mélange d’incrédulité et de fascination. Comment, compte tenu de la complexité et de la technicité de cette profession, certains parviennent pourtant à créer l’illusion ? Quelle est la posture médicale que ces usurpateurs parviennent à imiter de façon si convaincante que leurs manquements ne sont pas si facilement repérés ? Quel degré d’assurance faut-il maîtriser pour réussir à tromper dans la même heure des faux pairs, des patients et tout un chacun ?Grâce au confinement et à un site internet pernicieux
Ces questions s’imposent face à la dramatique histoire de
Samantha A.. Pendant plusieurs mois, cette femme de 36 ans, est
parvenu à convaincre son entourage mais surtout les responsables du
Centre de santé (minier) de Montceau-les-Mines qu’elle était
médecin généraliste.
L’usurpatrice a profité du désordre créé par le confinement
pour obtenir son enregistrement auprès de l’Ordre des médecins. La
procédure de vérification a en effet été modifiée ce printemps
quand les déplacements étaient très restreints et la jeune femme a
donc plus facilement expliqué les bizarreries de son parcours. Par
ailleurs, les pièces qu’elle a envoyées, une falsification réalisée
grâce à un site internet « spécialisé » dans les faux
diplôme ont convaincu sans difficulté le Conseil départemental de
l’Ordre des médecins.
Ne pas hésiter à en faire trop
Munie de ce sésame, aucune étrangeté n’a plus alerté les responsables du centre de santé qui ont accueilli cette recrue bienvenue en cette période d’épidémie. Samantha A. a également poussé la supercherie jusqu’à assurer à ses proches qu’elle avait bien décroché son diplôme de médecine, parvenant apparemment à duper jusqu’à son mari, qui n’a donc pas voulu trouver d’incohérence dans le fait que son cursus d’aide-soignante ne correspondait pas exactement à l’idée que l’on se fait de longues études de médecine. Son époux s’est peut-être laissé convaincre par la verve de sa femme, dont il a confié au Quotidien du médecin qu’elle n’hésitait pas à critiquer les praticiens.Erreur funeste
Si sa formation d’aide-soignante a sans doute permis en partie à Samantha A. de donner le change, elle ne l’a pas empêché de commettre des erreurs irréparables. Ainsi, a-t-elle recommandé à Jean-Marc Gauthier (67 ans) qui consulta cet été le centre de Monceau les Mines à deux reprises pour des œdèmes des membres inférieurs d’interrompre son traitement contre l’hypertension artérielle. Non seulement, cette recommandation a potentiellement accéléré son œdème aigu du poumon, mais elle en a surtout probablement retardé la prise en charge. Le 13 août, Jean-Marc Gauthier était hospitalisé pour un AOP dont il est mort au début du mois d’octobre.Découverte fortuite
Aurélie Haroche