Paris, le vendredi 6 novembre 2020 – La confusion règne en
cette fin de première semaine de confinement : confusion sur les
données épidémiologiques, confusion sur les mesures à prendre,
confusion sur l’évolution de l’épidémie dans un avenir
proche.
Santé publique France, Pennsylvanie : même désarroi
?
Le bulletin épidémiologique de cette semaine traduit une
certaine fébrilité des systèmes de surveillance, victimes,
peut-être du manque de recul avec lequel les épidémiologistes se
voient contraints de publier des chiffres.
Ainsi, le « point épidémiologique hebdomadaire Covid-19
» sur lequel la presse (dont le JIM) se penche chaque semaine avec
avidité s’ouvre sur un avertissement de mauvais augure : « en
raison d’un défaut de remontées de données sur les tests par le
système d’information SI-DEP vers Santé Publique France, les
indicateurs basés sur les données des tests de diagnostic réalisés
par les laboratoires de biologie médicale sont sous-estimés en
semaines 43 et 44 ». Il se clos tout aussi piteusement par
cette précision de taille glissée en dernière page : « on entend
comme admission en réanimation l’admission en services de
réanimation, en unités de soins intensifs et en unités de
surveillance continue* ». Soit 19 326 lits au 31/12/2018 (5 432
de réanimation, 5 832 de soins intensifs et 8 062 de soins
continus) selon la DREES (Direction de la Recherche, des Études, de
l'Évaluation et des Statistiques). SPF reconnaît ainsi que le taux
d’occupation en réanimation, répété à l’envie, y compris par les
autorités ministérielles, ne correspond tout simplement pas à la
réalité !
Malgré ces difficultés de comptage, digne d’un dépouillement
électoral en Pennsylvanie, la progression de l’épidémie est
importante, qu’il s’agisse des indicateurs précoces ou des
marqueurs de gravité (voir tableau ci-dessous).
Les trois scénarios d’Olivier Véran
Amplifiant l’impression de flottement au sommet, Olivier Véran
s’est laissé aller hier à des prévisions, contestées, nous le
verrons, dans sa propre administration.
Partant du principe, basée sur une « intime »
conviction « que le confinement est bien respecté par les
Français » (ce qui est confirmé par certains indicateurs
techniques mais largement contredit par certains observateurs comme
le Pr Gilles Pialoux), le locataire de l’Avenue de Ségur estime
qu’il faut s’attendre à « un pic de 6 000 patients en
réanimation » (et en soins intensifs et en soins continue,
aurait-il dû ajouter) à la mi-novembre. La courbe redescendrait
ensuite et la vague serait « moins intense que la première
vague ».
Deuxième scénario du ministre de la santé « si nous ne
respectons pas suffisamment le confinement (…) nous connaîtrons un
risque fort de saturation au niveau national dès la mi-novembre
avec plus de 7 000 patients atteints de Covid en réanimation ».
La deuxième vague serait alors « plus haute et plus longue que
la première » avec une stabilisation « au moins jusqu'à la
mi-décembre ».
Dernier scénario, purement hypothétique: selon le ministre,
sans confinement, la France aurait connu, le 11 novembre, quelque 9
000 patients Covid en réanimation et tous les services auraient été
alors saturés.
Riposte : guerre de religion au sommet de l’État
Près d’un an après son identification en Chine, force est de
constater que les autorités ne se sont pas encore fait de religion
en matière de riposte à la Covid-19.
Ainsi, Europe 1 nous apprend que dans une note confidentielle,
le Directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, dresse un constat
alarmant quant à l'efficacité du confinement actuel et prévoit que
l’inflexion de la courbe sera plus lente qu’au printemps avec
"un plateau haut et prolongé". Il rapporte ainsi que, selon
les modélisations dont il dispose : « il ne semble pas possible
d’obtenir un taux de reproduction du virus à 0,7, comme en avril,
mais plutôt à 0,9 ».
Pour expliquer l’inefficacité relative du confinement actuel,
le Pr Salomon pointe les décisions de maintenir les visites en
EHPAD et de laisser ouverts les établissements
scolaires.
Cette note semble d’ailleurs faire bouger les
lignes.
Ainsi, Jean-Michel Blanquer après avoir juré dimanche que
l’éducation ne saurait être une nouvelle fois sacrifié sur l’autel
de la santé publique a proposé, hier, des « demi-groupes »
dans les lycées… (avant de les fermer la semaine prochaine ?)
À force d'imprécisions, de contradictions, de prévisions cacophoniques il ne faudra pas s'étonner de la déferlante judiciaire qui se profile. Pas s'étonner non plus de l'entrée en rébellion d'un nombre de plus en plus important probable de nos concitoyens. Il serait vraiment temps que le corps médical retrouve la sagesse et la sérénité.
Dr Bernard Deuxville
Noël et Covid...
Le 07 novembre 2020
Le Pr Salomon me parait bien plus prêt de la réalité que le ministre de la santé. Les cas explosent, l'acmé est espérée dans une dizaine de jours, et la décroissance va souffrir de la proximité des fêtes de Noël. La bronca est déjà telle que les magasins rouvriront en décembre, les réunions familiales auront lieu, la fête de Nouvel An est encore bien plus problématique...et l'épidémie ne décroîtra vraisemblablement pas avant mi-janvier, ce qui reporte les mesure "de confinement" à quelque part bien ...après janvier.