Vaccination en EHPAD : un défi logistique et juridique

Paris, le mercredi 9 décembre 2020 – Les résidents et le personnel des EHPAD seront les premiers en France à bénéficier de la vaccination contre la Covid-19. Une opération d’envergure qui pose le problème du stockage des vaccins et du recueil du consentement des résidents.

Plus de 40 % des personnes décédés de la Covid-19 en France sont des résidents d’EHPAD ou d’établissements médico-sociaux (EMS), soit plus de 22 000 morts, l’âge étant le principal facteur de risque de décès dans la Covid-19. C’est donc logiquement que la Haute Autorisé de Santé (HAS) a, dans ses recommandations du 30 novembre dernier, désigné les résidents et personnel des EHPAD comme prioritaires pour recevoir la vaccination.

Les 750 000 résidents et 100 000 membres du personnels répartis dans quelques 7 000 établissements seront donc les premiers en France à recevoir le vaccin, sans doute celui élaboré par le laboratoire Pfizer et la firme BionTech. La campagne de vaccin devrait démarrer à la mi-janvier selon Florence Arnaiz-Maumé, délégué général de la Synerpa, principal syndicat des acteurs privés de la prise en charge des personnes âgés.

Dans les ministères, les réunions se multiplient pour organiser ce qui « représente un défi logistique et organisationnel sans précédent » selon les termes de Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie. Ce lundi, la ministre a réuni autour d’elle les représentant des directeurs d’EHPAD pour jeter les premières bases de la future campagne de vaccination. Une seconde conférence aura lieu lundi prochain, à laquelle participera le professeur Alain Fischer, le « monsieur vaccin » du gouvernement. « Pendant cette campagne de vaccination, je serais particulièrement attentive à ce que les acteurs soient étroitement associés à tous les niveaux » a indiqué la ministre.

A la sortie de cette réunion, les syndicats de dirigeants d’EHPAD ont notamment souligné les difficultés juridiques et logistiques de la future opération.
Juridique d’abord. Puisqu’il est désormais acquis que la vaccination contre la Covid-19 ne sera pas obligatoire, il sera nécessaire de recueillir le consentement des résidents. Un consentement « libre et éclairé » selon les termes de l’article L. 1111-4 du Code de la Santé Publique (CSP) difficile à recueillir chez les très nombreuses personnes âgées qui souffrent de troubles cognitifs graves et notamment de la maladie d’Alzheimer.

Cette difficulté sera écartée lorsque la personne âgée bénéficiera d’une mesure de protection juridique (tutelle, curatelle…) ou qu’elle aura désigné une personne de confiance, prévue à l’article L. 1111-6 du CSP, qui pourra l’aider dans son choix. Mais ces mécanismes sont trop rarement utilisés et souvent méconnus par le grand public. En l’absence de toute mesure de protection, le médecin devra donc consulter sa famille à défaut, un de ses proches (L. 1111-4 alinéa 4 du CSP). 

Défi logistique également puisque le vaccin de Pfizer, probablement le premier qui sera utilisé, doit être stocké à -70°. Une fois sorti des stocks, les doses de vaccin doivent donc être utilisé dans les cinq jours, ce qui nécessite « une logistique quasi militaire » selon Mme Arnaiz-Maumé. On ignore encore si, une fois sortie des stocks, les vaccins seront directement envoyés aux EHPAD ou transiteront d’abord par des pharmacies. Selon les conclusions de la réunion ayant eu lieu ce lundi, toute vaccination devra être précédée d’une consultation médicale. Ce qui risque d’allonger encore un peu plus le délai avant le début effectif de la vaccination.

Quentin Haroche

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Vos réactions (1)

  • Défi éthique aussi

    Le 13 décembre 2020

    Défi juridique et logistique : d'accord, mais défi éthique aussi. L'administration d'un vaccin à des personnes âgées de plus de 75 ans, quasi exclues des études, pose question. Que signifie consentement lorsque l'on s'adresse à une personne en état de dépendance partielle ou totale ? Que signifie le consentement d'un membre de la famille dit référent faute d'une personne de confiance désignée en conscience avant cet état de dépendance ou ces troubles cognitifs, comportementaux ou démentiels ? Etc. Quelle titration ? Quelle fréquence ?
    Bien que favorable à cette vaccination, ces interrogations m'inquiètent.

    Dr Claude Rougeron

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