Vaccination : une course européenne et française toujours semée d’obstacles

Paris, le mercredi 27 janvier 2021 – Entre les représentants du laboratoire AstraZeneca et les responsables européens, la tension monte. Ce mercredi à 14 h, différentes informations assurent que les représentants invités d’AstraZeneca ont quitté une réunion organisée par l’Union européenne consacrée notamment aux livraisons des vaccins contre la Covid-19. Mais AstraZeneca a nié une telle attitude et a assuré que le laboratoire participerait bien à une rencontre plus tard dans la journée.

Insupportables retards et explications insatisfaisantes

Le quiproquo s’inscrit dans une période de turbulences débutée ce vendredi après l’annonce par les laboratoires britanico-suédois que le volume de doses délivré à l’Union européenne au premier trimestre serait moins important que prévu. Immédiatement, le commissaire européen à la Santé, Stella Kyriakides a dénoncé le caractère « insupportable » de ces retards et demandé un « mécanisme de transparence ». De façon claire, l’Europe soupçonne AstraZeneca d’accorder sa préférence à d’autres pays plutôt qu’à l’Union européenne. Mais les laboratoires affirment que ces délais supplémentaires sont liés à une baisse de rendement d’un site de fabrication, des explications jugées insatisfaisantes par Bruxelles à plusieurs reprises en ce début de semaine.

Ici Londres, AstraZeneca boude-t-il les européens ?

Le point de crispation concerne notamment le choix d’AstraZeneca de réserver les doses issues des usines britanniques à la Grande-Bretagne. Or, le contrat de précommande conclu entre les laboratoires et l’Union européenne, prévoirait qu’en cas de difficultés sur une chaine de distribution en Europe, les autres sites pourraient être mis à contribution, ce qui pour Bruxelles inclut les usines anglaises. Cependant, le patron d’AstraZeneca fait remarquer dans une interview diffusée par plusieurs médias européens : « L’accord britannique a été conclu en juin (2020), trois mois avant l’accord européen (…) Londres a stipulé que l’approvisionnement provenant de la chaîne d’approvisionnement britannique irait d’abord au Royaume-Uni ».

Pascal Soriot ajoute encore : « L’UE voulait plus ou moins autant de doses que le Royaume-Uni alors qu’ils signaient trois mois après. On a donc dit : on fera de notre mieux, mais nous n’allons pas nous engager contractuellement », observe-t-il. Cette interprétation des accords est fortement contredite par Bruxelles.

Les erreurs d’appréciation de Bruxelles

Si l’Union européenne se débat ici probablement avec les conséquences du Brexit, cette affaire met au-delà en lumière les possibles erreurs d’appréciation de la Commission et la fragilité européenne dans cette course aux vaccins. En écho, par exemple, le patron des laboratoires Moderna, Stéphane Bancel, sur LCI, a rappelé comment les négociations entre son entreprise et l’Union européenne avaient été bien plus tardives que celles avec Washington. Il a encore souligné que la priorité donnée aux Etats-Unis était légitimée par le soutien financier bien plus fort accordé par ces derniers, dans le cadre de l’opération Warp Speed.

Annulation de rendez-vous pour des soignants et de nouveaux créneaux qui se font attendre

Dans ce contexte, l’Europe doit donc probablement en partie faire l’analyse de ses failles, mais aussi savoir exploiter ses capacités. C’est ce qui est fait notamment avec l’annonce hier de l’accord entre les laboratoires Sanofi et Pfizer/BioNTech afin que le premier puisse procéder au conditionnement du vaccin Comirnaty. Si bien sûr cette situation suppose une forme de subordination pour la firme française, elle doit permettre la production de 100 millions de doses du vaccin à ARN-messager à partir du mois de juillet. D’une manière générale, l’augmentation du nombre de doses est indispensable pour permettre l’organisation d’une campagne vaccinale plus sereine. En France, la confusion règne toujours. Ainsi, l’ouverture de 500 000 nouveaux créneaux de rendez-vous de vaccination était prévue hier, alors qu’aujourd’hui il est dans notre pays quasiment impossible de s’inscrire pour recevoir une première injection. Cependant, hier soir, le gouvernement a annoncé que le déblocage de ces dates était finalement repoussé à vendredi. Mais l’absence de nouveaux créneaux n’est pas la seule manifestation d’une campagne perturbée : de nombreux médecins d’Ile-de-France dénoncent l’annulation à la dernière minute de leur rendez-vous (pour l’administration d’une première dose principalement). La vaccination des soignants hospitaliers de plus de 50 ans, même travaillant dans les unités Covid est ainsi parfois repoussée sine die.

Aurélie Haroche

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