
La chirurgie laparoscopique assistée par robot (CLAR) gagne du
terrain. Le pneumopéritoine créé afin d’exposer de façon optimale
le champ opératoire, a un impact négatif sur la mécanique
respiratoire en majorant la pression intra-abdominale et provoque
un déplacement du diaphragme, ce qui altère la compliance du
système respiratoire et la capacité fonctionnelle résiduelle,
phénomène amplifié par la position de Trendelenburg. D’où un risque
accru d’atélectasie et de complications pulmonaires postopératoires
(CPP). Les données sur la pratique de la ventilation artificielle
et les résultats chez les patients bénéficiant de la CLAR font
défaut.
L'objectif de cette étude internationale, multicentrique et
prospective, menée dans 34 centres de neuf pays était de combler
cette lacune, d'évaluer l'incidence des CPP et de décrire la
gestion des respirateurs après une CLAR abdominale.
Les patients âgés de plus de 18 ans ont été recrutés entre avril 2017 et mars 2019, à l’exclusion des patientes enceintes et des conversions en chirurgie ouverte ou par laparoscopie sans assistance robotique. Le score ARISCAT (Assess Respiratory Risk in Surgical Patients in Catalonia) a été utilisé pour stratifier le risque élevé de CPP (≥ 26). L’objectif principal était la mesure de l'incidence des CPP. Les critères d'évaluation secondaires comprenaient le risque préopératoire de CPP et la gestion des ventilateurs.
Besoin imprévu en oxygène
Parmi les 905 patients inclus, 590 (65,2 %) présentaient un risque accru de CPP ; 172 (19 %) patients ont effectivement eu une complication pulmonaire dont 132 (22,4 %) étaient jugés à risque accru, tandis que 40 (12,7 %) étaient à faible risque de CPP (différence de risque absolue : 12,2 % [intervalle de confiance à 95 % IC 95 % = 6,8 - 17,6 %] ; p < 0,001). Les pressions du plateau étaient plus élevées chez les patients à risque accru que chez les patients à faible risque de CPP, mais aucune variable ventilatoire n'a été associée de manière indépendante à l'augmentation de la fréquence des CPP. L'apparition de CPP a été associée à un séjour hospitalier plus long.Outre son caractère observationnel, cette étude présente plusieurs biais : les anesthésistes, se sachant observés, pourraient avoir modifié leurs pratiques qui ne reflétaient alors pas la pratique clinique moyenne ; le suivi limité à 5 jours ou à la sortie de l'hôpital ; l'atélectasie n'a pas été prise en compte dans la définition des CPP ; l’exclusion de 5 % de patients après conversion en chirurgie conventionnelle.
Il n’en reste pas moins qu’un patient sur cinq a développé une ou plusieurs complications pulmonaire, principalement un besoin imprévu en oxygène. Une ventilation de protection des poumons a été fréquemment utilisée avec un faible volume courant, mais les pressions de pointe ont été élevées. Aucune variable ventilatoire n'a été associée de manière indépendante aux CPP. La survenue de complications pulmonaires, même sans gravité a été associée à un allongement de la durée du séjour hospitalier. Nous voici donc rassurés. Mais est-ce plus ou moins que lors de la chirurgie abdominale conventionnelle ?
Dr Bernard-Alex Gaüzère