Couacs en stock autour de la réforme des études de médecine

C’est une réforme du « monde d’avant » qui peine à convaincre dans « le monde d’après ». Pour diversifier les profils des futurs médecins, et assurer une poursuite d’études en licence, la réforme des études de santé avait introduit deux nouvelles voies d’entrée dans les études de santé.

D’un côté le parcours d’accès spécifique de santé (PASS) (l’équivalent de l’ancienne première année commune aux études de santé, la PACES) et de l’autre, la possibilité d’effectuer dans les licences classiques (économie, biologie, droit) une option accès santé (L.AS) permettant aux étudiants de tenter leur chance dans les études de médecine tout en gardant un pied dans d’autres disciplines.

Le numérus clausus a laissé place à un numerus apertus désormais fixé par les universités en concertation avec les ARS. Après une année de PASS ou de L.AS, les étudiants peuvent tenter leur chance une première fois, et, en cas d’échec, une seconde chance leur est donnée à l’issue de leur deuxième ou troisième année d’études.

Manque de transparence autour des places disponibles

Par cette réforme, le gouvernement entendait réduire le taux d’échec en première année mais aussi permettre une meilleure orientation pour ceux qui n’obtiennent pas le précieux sésame pour la suite des études médicales. Mais quelques mois après l’entrée en vigueur de la première année, beaucoup de doutes sont affichés autour de ce numerus apertus qui ressemble de plus en plus à un numerus clausus.

« Les étudiants se sont fait avoir par ces effets d’annonce », indique au journal Le Monde Morgane Gode-Henric, présidente de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).

Un collectif national PASS/L.AS, créé en vue de défendre les intérêts de cette première génération d’étudiants soumis à la réforme, exigent une certaine visibilité sur leur avenir. Une pétition en ligne « Réforme des études de santé : nous voulons les moyens promis ! Pas de génération sacrifiée ! » a recueilli près de 42 000 signatures.

Fin janvier, le collectif a déposé un recours auprès du défenseur des droits afin de dénoncer le traitement inégalitaire des étudiants de première année. Jusqu’ici, très peu d’universités ont en effet indiqué combien de places seraient disponibles, laissant les étudiants dans le flou quant à leurs chances de poursuite d’études.

Une augmentation nécessaire des capacités d’accueil

D’après le collectif, pour respecter les objectifs fixés par la loi, il faudrait financer une augmentation exceptionnelle de plus d’un tiers des capacités d’accueil pour cette année de transition. Ce taux de 33 % correspond en moyenne à celui déjà mis en place dans les universités qui ont testé la réforme avant l’heure en 2019 (Angers, Paris-V, Paris-VI et Paris-VII et université de Bretagne occidentale) pour gérer la dernière promotion autorisée à redoubler la Paces.

La réponse embarrassée du ministère de l’Enseignement supérieur

Face aux inquiétudes, le ministère de l’Enseignement supérieur a tenté de déminer lors d’une visioconférence consacrée aux filières PASS et LAS. Selon une estimation réalisée avec chaque université, « le nombre de places offertes pour les primants est au moins équivalent à celui qui était proposé dans le cadre de la PACES sur les trois années précédentes, qui variait de 8 % de reçus à 23 %. Aujourd’hui, on est à environ +10 % d’augmentation du nombre de places (par rapport à 2020) pour l’accès à la seconde année ». Un chiffre qui reste toutefois insuffisant pour le collectif.

Comment alléger les programmes ? En rajoutant des matières !

Dernière désillusion des étudiants (et pas des moindres) : alors que l’objectif de la réforme était de conduire à un allègement des programmes, les étudiants de PASS inscrits dans un double cursus se retrouvent le plus souvent à devoir intégrer dans le programme dantesque de la première année de médecine une mineure dans une discipline (exemple : droit ou biologie). Les étudiants de L.AS se retrouvent également dans la situation où il devient difficile de jongler entre la médecine et les autres disciplines (qui présentent elles aussi un certain degré d’exigence).

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire encore plus compliqué ?

C.H.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions (2)

  • Réforme vraiment ?

    Le 23 mars 2021

    Cette soi-disante ouverture à des candidats faisant des études mixtes est une idée étonnante. Dès la 1ère année (PACES) le bachotage est terrible. Y rajouter une autre discipline exige des efforts peu communs, et ceux qui les feront avec succès auraient certainement réussi le PACES.

    La médecine devrait être réformé autrement : arrêter de former des bêtes de concours qui bachotent pendant 6 ans et ouvrir l'entrée à des étudiants aux qualités plus humaines et moins mathématiques, rétablir un enseignement moins oppressant et arrêter d'imaginer que les futurs médecins sont tous des prix Nobel en devenir.

    Dr Astrid Wilk

  • Il ya 40 ans déjà (au Dr Wilk)

    Le 29 mars 2021

    Mille fois d’accord ; le problème, c’est que j’ai déjà fait cette réflexion (qualité plus humaine et moins mathématique) à un ponte parisien venu faire une conférence à Amiens sur les études médicales ( « pourquoi réserver les études médicales aux bac S » ) il y a...40 ans !

    Dr Guy Keldermans

Réagir à cet article