Des troubles neuropsychiatriques 6 mois après une Covid-19
Le retentissement neuropsychiatrique de la Covid-19 a suscité de
nombreuses études et fait couler beaucoup d’encre au cours de
l’année écoulée. A l’atteinte intrinsèque du système nerveux
central, s’ajoutent les effets collatéraux d’une pandémie qui n’en
finit pas, lesquels tiennent en grande partie aux mesures de
restriction sanitaires drastiques adoptées dans la plupart des pays
du monde. Le confinement dont il existe plusieurs modèles, du plus
strict au plus souple (aéré…), en est l’exemple caricatural. Les
études menées sur ce thème se résument souvent à des séries de cas
ou portent sur des effectifs relativement restreints suivis pendant
au plus trois mois après le diagnostic positif de la maladie.
236 379 patients identifiés sur la plateforme TriNetX
Une étude de cohorte rétrospective diligentée par une équipe
universitaire britannique se démarque des autres par l’importance
de la cohorte et la durée du suivi. Les données ont été obtenues
par l’intermédiaire de la plateforme TriNetX dédiée à la recherche
clinique.
Cette dernière recueille les dossiers médicaux électroniques
auprès de 62 structures de soins réparties dans le monde entier
mais principalement aux Etats-Unis. C’est ainsi que la santé de
plus de 81 millions de patients est étroitement suivie sous couvert
d’un anonymat garanti par la plateforme et ses
utilisateurs.
Une première cohorte a été constituée de patients âgés d’au
moins dix ans chez lesquels le diagnostic de Covid-19 avait été
porté avec certitude entre le 1er janvier
et le 13 décembre 2020. Deux cohortes « témoins » ont, pour
leur part, été constituées de patients atteints d’une grippe ou
d’une autre infection des voies respiratoires, contractées au cours
de la même période.
L’incidence de diverses affections neurologiques ou
psychiatriques a été estimée dans les six mois qui ont suivi le
diagnostic. Quatorze entités cliniques ont été ainsi prises en
compte : hémorragie intracrânienne, AVC Ischémique, syndrome
parkinsonien, syndrome de Guillain-Barré, atteinte radiculaire,
paralysie d’un plexus, myopathie, atteinte neuromusculaire,
encéphalite, démence, psychose, trouble de l’humeur, troubles
anxieux, toxicomanie et insomnie.
Les cohortes ont été appariées selon la méthode du score de
propension. L’analyse des données qui a reposé sur le modèle des
risques proportionnels de Cox a tenu compte de la sévérité des
formes cliniques de la Covid-19 en s’aidant des indicateurs
suivants : hospitalisation, séjour en unité de soins intensifs
(USI), notion d’encéphalite évoquée devant un syndrome confusionnel
ou des troubles neuropsychiatriques apparentés. La robustesse des
différences entre les trois cohortes a été testée par des analyses
de sensibilité ad hoc. Une comparaison de plus a été faite entre la
cohorte Covid-19 et quatre autres cohortes constituées dans le même
laps de temps avec les diagnostics suivants : infection cutanée,
lithiase rénale, fracture d’un os long ou encore embolie
pulmonaire. Un luxe de précaution méthodologique louable du fait de
la nature rétrospective de l’étude.
Des troubles neuropsychiatriques dans un tiers des cas
Chez les 236 379 patients atteints d’une Covid-19 confirmée,
la fréquence (plus que l’incidence) des diagnostics
neuropsychiatriques précédemment évoqués a été estimée à 33,62 %
(intervalle de confiance à 95 % IC 95% 33,17–34,07) et dans 12,84 %
(IC 95 % 12,36–13,33), les manifestations en rapport étaient
inaugurales. Pour les patients admis en USI, les chiffres
correspondants ont été respectivement de 46,42 % (IC 95 %
44,78–48,09) et de 25,79 % (IC 95 % 23,50–28,25). Si l’on considère
les diagnostics individuels, ce sont les troubles anxieux qui
dominent la scène (17,39 % [17,04–17,74]), loin devant les AVC
ischémiques (2,10 % [(1,97–2,23]), les troubles psychotiques et
apparentés (1,40 % [1,30–1,51]) ou encore les démences, les
syndromes parkinsoniens, ou les hémorragies intracrâniennes
(également < 1 % dans les 3 cas).
Dans le groupe des patients qui ont séjourné en USI, les valeurs
précédentes doivent être revues à la hausse, les chiffres étant de
: (1) troubles anxieux : 19,15 % (IC 95 % 17,90–20,48) ; (2) AVC
ischémiques : 6,92 % (IC95 % 6,17–7,76) ; (3) hémorragies
intracrâniennes : 2,66 % (IC95 % 2,24–3,16) ; (4) troubles
psychotiques : 2,77 % (IC 95 % 2,31–3,33) ; (5) démence : 1,74 %
(IC 95 % 1,31–2,30) ; (6) syndrome parkinsonien : 0,26 % (IC 95 %
0,15–0,45).
Plus souvent en cas de Covid 19 qu’avec la grippe
Tous ces diagnostics confondus ont été portés plus fréquemment
en cas de Covid-19 : comparativement aux cas de grippe, le hazard
ratio [HR] était à 1,44 (IC 95 % 1,40–1,47). Par rapport à la
cohorte des cas d’autres infections respiratoires, le HR a été
estimé à 1,16 (IC 95 % 1,14-1,17). Les analyses de sensibilité sur
les cohortes complémentaires ont conduit à des résultats
similaires.
Cette étude de cohorte rétrospective de grande ampleur donne une
idée assez précise de la morbidité neuropsychiatrique observée dans
les six mois qui suivent une infection par le SARS-CoV-2. Les
formes sévères sont celles qui comportent le plus de risque de
séquelles, mais elles ne sont pas les seules : les formes plus
bénignes de l’infection ne mettent pas à l’abri de tels troubles,
tout particulièrement ceux de nature psychiatrique. Dans
l’ensemble, ce sont les troubles anxieux qui dominent de loin la
scène, bien loin devant les séquelles neurologiques qui n’en sont
pas moins constatées dans un nombre substantiel de cas, compte tenu
de l’amplitude et de la durée de la pandémie. Des études de cohorte
prospectives sont nécessaires pour confirmer ces résultats et mieux
comprendre les mécanismes complexes qui les sous-tendent, tout en
précisant leur pronostic à (encore) plus long terme….
La covid 19 est un virus neurotrope, les troubles dits"psychiatriques" étant sous tendus par des lésions neurologiques directement visibles au 18 FDG.
La question pourrait se poser du caractère systématique de l'imagerie cérébrale PETSCAN dans le bilan des covids, en particulier des "covids longs"...mais on en est loin, hélas
Dr Yves Darlas
Vers un nouveau diagnostic de troubles neurocognitifs ?
Le 30 avril 2021
Merci JIM de relayer cette étude malheureusement très inquiétante. J'ignorais que cette sal****** s'en prenait au cerveau au même titre que la syphilis ou le VIH...
Les types de l'American Psychiatric Association n'ont plus qu'à se pencher sur l'étude d'une nouvelle catégorie de troubles neurocognitifs dû à une infection par le SARS-COV-2.
+1 Dr. Darlas merci du partage de la vidéo [quant à dire que les stats ne servent à rien vous y allez un peu fort surtout quand on sait qu'en l'absence de statistiques on ne peut pas conclure et on oublie l'impact factor, l'evidence-based-practice etc etc.]