Néphropathie à IgA : deux pistes thérapeutiques à l’horizon
La néphropathie à IgA dite aussi maladie de Berge est la plus
fréquente des glomérulonéphrites primitives qui, pour être rares au
sein de la population générale, n’en sont pas moins la cause de 14
à 21 % des cas d’insuffisance rénale chronique (IRC) terminale.
D’ailleurs, malgré l’avancée thérapeutique représentée par
l’inhibition pharmacologique du système
rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), un tel risque concernerait
jusqu’à 40 % des patients atteints d’une néphropathie à IgA. Des
traitements un tant soi peu innovants sont donc les bienvenus et
deux études présentées au récent congrès international de
néphrologie méritent à cet égard d’être rapportées.
Sur le plan pathogénique, les plaques de Peyer iléales seraient
largement incriminées au travers de la production abondante d’une
immunoglobuline (IgA) pauvre en groupements O-galactosyl et, de ce
fait, capable de déclencher la formation de complexes immuns au
sein des glomérules rénaux. De ce fait, ces plaques sont des cibles
thérapeutiques potentielles, comme l’ont suggéré les résultats d’un
essai randomisé de phase 2 : un corticoïde, en l’occurrence le
budésonide sous une forme galénique adaptée ciblant ces dernières a
fait preuve d’une efficacité biologique encourageante chez des
patients atteints d’une néphropathie à IgA en réduisant
l’albuminurie et en stabilisant le débit de filtration glomérulaire
estimé (DFGe).
Le NefIgArd trial : 360 patients atteints d’une néphropathie à
IgA
L’étude randomisée de phase 3, menée en double insu contre
placebo, à la fois multicentrique et internationale, dite NefIgArd
trial s’inscrit dans le prolongement de la précédente (1). Elle a
inclus 360 patients atteints d’une néphropathie à IgA, recrutés
dans 155 centres de néphrologie implantés dans 20 pays. Le
diagnostic avait été, dans tous les cas, confirmé par la biopsie
rénale et la protéinurie des 24 heures était > 1 g, cependant
que le DFG e était compris entre 35 et 90 mL/min/1,73
m2 en dépit d’une inhibition
pharmacologique optimale du SRAA. Le budésonide a été administré à
la dose de 16 mg/jour.
Au terme de 9 mois de suivi, les résultats obtenus chez les 199
premiers patients inclus dans l’essai confirment les précédents. La
comparaison intergroupe est en faveur du traitement qui a permis de
réduire de 27 % la moyenne géométrique du rapport
albumine/créatinine urinaires par rapport au placebo (p=0,0005).
Par ailleurs, dans le groupe traité, le DFG a augmenté en moyenne
de 7 % (3,87 ml/min/1,73m2 ; p=0,0029 versus
placebo). La fréquence des évènements indésirables a été voisine
dans les deux groupes. Les résultats de l’essai NefIgArd qui se
poursuit actuellement autorisent les plus grands espoirs dans le
traitement de la néphropathie à IgA car ils témoignent a priori
d’un bénéfice clinique potentiel qui devrait se confirmer à plus
long terme.
Le DAPA-CKD trial : 270 patients atteints d’une néphropathie à
IgA
Une autre étude (2) qui émane du DAPA-CKD trial suscite
également le plus grand intérêt. Cet essai randomisé de grande
envergure avait pour objectif d’évaluer l’efficacité de la
dapagliflozine -un inhibiteur du cotransporteur sodium-glucose de
type 2 (SGLT2)- chez les patients atteints d’une IRC associée ou
non à un diabète de type 2. Il s’avère que cet antiabétique actif
per os est à même de freiner la progression de l’IRC dans un
tel contexte. Qu’en est-il dans le cas de la néphropathie à IgA ?
L’essai en question permet de répondre en partie à cette question
dans la mesure où il a inclus 270 patients atteints de cette
maladie confirmée par biopsie dans 93 % des cas, dont 137 affectés
au groupe dapagliflozine et 133 au groupe placebo. Le DFGe basal
était compris entre 25 et 75 ml/min/1,73m2
et le rapport albumine/créatinine urinaires entre 200 et 5000
mg/g.
Au terme d’un suivi médian de 2,4 années, le critère de jugement
primaire -combinant diminution soutenue du DFGe ≥ 50 %, survenue
d’une IRC terminale et décès en rapport avec une cause rénale ou
cardiovasculaire- a été atteint chez 6 patients du groupe traité (4
%) versus 20 dans l’autre groupe (15 %), ce qui conduit à un
hazard ratio de 0,29 (intervalle de confiance à 95% [IC],
0,12-0,73). La baisse du DFGe a été en moyenne de −3,5
ml/min/1,73m2/an dans le grouoe traité (versus
−4,7 ml/min/1,73m2/an dans le groupe placebo), cependant que le
rapport albumine/créatinine urinaire a été réduit de 26 %,
comparativement au groupe placebo. L’acceptabilité de la
dapagliflozine s’est avérée satisfaisante. Cet antidiabétique oral
serait à même d’exercer un effet néphroprotecteur dans la
néphropathie à IgA : une piste thérapeutique sérieuse qui mérite
d’être explorée.
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