Oui, certains salariés dépourvus de passe sanitaire pourraient bien être licenciés
Paris, le mercredi 28 juillet – Contrairement à ce qui avait
été compris dans un premier temps, la loi sanitaire qui vient
d’être votée (et est en cours d’examen par le Conseil
Constitutionnel) permettrait bien le licenciement de certains
salariés dépourvus de passe sanitaire.
« Il ne faut pas laisser croire aux salariés qu’il ne peut pas
y avoir de licenciement » a ainsi indiqué la ministre du travail
Elisabeth Borne, hier, sur BFM TV. Si le Parlement a rejeté la
possibilité d’un licenciement automatique pour les personnes qui ne
respecteraient pas l’obligation vaccinale ou de passe sanitaire
durant une période de deux mois, le Code du travail actuel
permettrait bien des licenciements liés au passe.
Un passe sanitaire, trois motifs de licenciement
Me Eric Rocheblave détaille auprès du Parisien « si je
devais conseiller un employeur, je lui dirai d’envoyer son salarié
devant le médecin du travail. Lui seul peut dire si un employé est
apte ou pas à travailler. En constatant que ce salarié n’a pas de
passe sanitaire, condition rendue obligatoire par la loi pour le
poste qu’il occupe, il sera déclaré inapte. L’employeur disposera
alors d’un motif sérieux et réel pour le licencier ». Pour
Corinne Metzger, s’exprimant sur France Info on pourrait également
soulever « l'idée d'un licenciement pour 'désorganisation', ça
existe déjà lorsque l'absence du salarié pénalise le bon
fonctionnement de l'entreprise, mais est-ce que ce sera retenu ?
Est-ce qu'aux prud'hommes ce sera recevable ? »
s’interroge-t-elle. Les institutions prud’homales étant laissées
dans un certain flou artistique...
Déborah David, interrogée par l’AFP ajoute une troisième cause
possible : celle d’un licenciement économique. Elle prend l'exemple
d'un restaurateur qui n'arriverait pas à trouver un intérimaire ou
un CDD pour remplacer un salarié suspendu et dont la seule solution
serait d'embaucher un CDI. Mais il devra, souligne-t-elle,
démontrer qu'il n'a pas d'autres choix.
Quoi qu’il en soit, ces licenciements devraient s’accompagner
d’indemnités selon les premières analyses des juristes. Pour
Élisabeth Borne, le retrait de l’article prévoyant le licenciement
possible de certains salariés sans passe sanitaire est donc plutôt
un recul pour les salariés ! « On avait souhaité dans la loi
encadrer la façon dont on pourrait avoir recours au licenciement,
en disant notamment que ce licenciement ne pouvait pas intervenir
avant deux mois et s’accompagnait d’indemnités pour le salarié
».
Mais tous les juristes qui sont intervenus dans les médias ne
partagent pas l’avis d’Elisabeth Borne. Le dispositif, est «
beaucoup plus équilibré » désormais qu'une « espèce de
licenciement automatique au bout de deux mois d'une violence
absolue » indique pour sa part Me Deborah David. Une loi
suffisamment imprécise, que la ministre du Travail, elle-même, a
indiqué être prête à compléter, notamment si le passe sanitaire
devait s’installer durablement au-delà du 15 novembre : « Si la
situation sanitaire le nécessite et qu’on doit prolonger ces
dispositions alors il faudra qu’on revienne vers le Parlement pour
bien encadrer cette procédure de licenciement »
prévient-elle.
D’ici là des tensions et des conflits judiciaires sont à
prévoir dans les entreprises (notamment dans les hôpitaux et les
cliniques) soumises à cette obligation encore trop
floue.
Les salariés ? Enfin ceux du Privé, ceux du Public, les chères âmes, seront à une autre enseigne. On va quand même pas licencier ceux de la fonction publique hospitalière, par exemple. Il manquerait plus que ça. Le scandale n'est pas que cette inégalité existe, mais que personne ne l'évoque, comme si elle n'existait tout simplement pas. Je crois que le pire, c'est qu'ils ne s'en rendent même pas compte, tant ils ont intégré l'asymétrie dans leur vision. Résumons : on pourra virer une infirmière non vaccinée d'un hôpital privé ESPIC, mais pas sa collègue d'un hôpital public voisin.