La Guadeloupe reconfinée, la Martinique submergée (et mal vaccinée)

Pointe-à-Pitre le Mardi 3 aout 2021 - « Nous sommes dans une situation catastrophique, nous avons dépassé les 3 000 cas par semaine », a alerté Valérie Denux, directrice générale de l’agence régionale de santé (ARS) de Guadeloupe, lors d’une conférence de presse commune organisée le 2 août avec le préfet. Après la Martinique et la Réunion, c’est au tour de la Guadeloupe de faire face à une déferlante de cas de Covid-19 rendant nécessaire la mise en place de mesures de restrictions fortes. 

Un confinement d’une durée d’au moins trois semaines a été décrété dans l’île, ce dernier devant entrer en vigueur à partir de mercredi 20 heures. Dans la journée, les déplacements hors d’un rayon de 10 kilomètres du domicile seront proscrits, sauf motif impérieux. Si les commerces restent ouverts, ainsi que les restaurants à midi, les bars seront tous fermés, tout comme les gymnases, stades et piscines. Sur les plages, seule la présence « dynamique » (promenade, baignade ou activité sportive) sera autorisée. En complément de ces mesures, un couvre-feu strict sera appliqué de 20 heures à 5 heures du matin.

« Situation catastrophique »

Pour justifier la mise en œuvre des nouvelles mesures, la directrice de l’ARS a souligné que le nombre de cas de coronavirus sur l’île avait été multiplié par dix en moins de trois semaines. Avec l’apparition du variant delta, le taux d’incidence est passé à 828 cas sur une semaine pour 100 000 habitants, un taux inédit pour le territoire.

Pour le préfet, Alexandre Rochatte, un tour de vis supplémentaire pourrait être pris en cas d’augmentation : « il s’agit d’une première phase, j’espère que nous n’aurons pas à aller plus loin. » Si les courbes des contaminations et des hospitalisations continuaient de grimper, le confinement se durcirait, avec un couvre-feu dès 18h et la fermeture des restaurants et des commerces non-essentiels. A l’heure actuelle, vingt deux patients atteint de Covid-19 (tous non vaccinés) se trouvent en réanimation sur l’île de 400 000 habitants.

Une couverture vaccinale insuffisante en Martinique comme en Guadeloupe

C’est sans doute là l’une des pistes d’explication de la crise sanitaire dans les Antilles françaises. Au 29 juillet, 79,5 % de la population en Guadeloupe n’était pas vaccinée, un taux similaire en Martinique et en Guyane. Par comparaison, 63,48 % des habitants de la métropole  avaient reçu une première dose de vaccin au 1er août.

Une faible couverture en partie explicable par des raisons socio-culturelles et par la lenteur de la mise en place de la campagne de vaccination (notamment en raison de la logistique nécessitée par les vaccins à ARN messager). Mais ce retard n’a jamais été rattrapé, malgré des doses désormais bien disponibles.

Autre explication, « le foisonnement de fausses informations circulant sur les réseaux sociaux » comme le soulignent des experts dans une tribune parue dans les colonnes de France Antilles.

A noter dans ce contexte, un nouvel appel à la mobilisation (pour protester contre l'élargissement du passe sanitaire mais également contre l'obligation vaccinale des soignants) lancé pour ce week-end par une trentaine d'organisations dont plusieurs syndicats qui appellent à la « résistance ».

Cette défiance s’explique également par les scandales sanitaires passés, et notamment celui du chlordécone, un pesticide utilisé pour protéger les bananes et qui a empoisonné les sols antillais. Pour essayer de comprendre les raisons de cette défiance, l'Agence régionale de santé a lancé une grande enquête en ligne. Les résultats devraient être connus à la rentrée.

Fait inquiétant, la couverture vaccinale insuffisante touche aussi le secteur médical aux Antilles. Comme le rapporte France Info, 80 % des 3 600 soignants du CHU de Martinique ne seraient pas protégés par le vaccin.

C.H.

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Vos réactions (1)

  • Chronique d'une catastrophe annoncée

    Le 06 août 2021

    On nous avait ré-expliqué que l'Australie ou la Nouvelle-Zélande sont des iles. Les Antilles aussi , comme la Corse.
    L'évolution décrite laisse rêveur sur l'application pérenne des mesures barrières, Delta ou pas.
    Elle interroge sur l'application du contrôle sanitaire aux frontières, faute de contrainte effective jugée " liberticide" à fortiori quand elle est issue du "diktat" de Paris acutisé en outre-mer;

    Il semble notoire que la réticence vaccinale aux Antilles est alimentée par les drames phyto-sanitaires évoqués mais aussi par le gouffre de l'indigénisme et apparentés.

    • Nos compatriotes seront t'ils sensibles aux courbes (et non projections incompréhensibles) Incidence / Hospitalisation UK (> 70% adultes complêtement vaccinés) vs Antilles (<20%) ? J'en doute . Le poids du DENI est sous estimé.

    • Nos compatriotes seront t'ils sensibles à l'impact économique , touristique , de la crise sanitaire et sociale en cours ? Probablement , paradoxalement . Mais notre filet social tant envié amortira partiellement les choses
    Il est indiqué que "80 % des 3 600 soignants du CHU de Martinique (NDLR : Ambassadeurs vaccinaux théorique) ne seraient pas protégés par le vaccin " : Ce point tendrait à confirmer que Soignants et Soignés n'ont jamais été aussi proches aux Antilles comme en métropole. Un partage de sources d'information identiques peut être un élément d'explication.

    Notons l'effort pédagogique de l'ARS Guadeloupe et une tribune incitative pédagogique (France - Antilles 11 Janv 2021) : "TRIBUNE DES 83 EXPERTS GUADELOUPÉENS* ".

    * https://www.guadeloupe.franceantilles.fr/actualite/sante/coronavirus/tribune-libre-pourquoi-faut-il-se-faire-vacciner-contre-la-covid-19-583907.php

    Quel est l' impact de cette paucité vaccinale chez les seuls soignants et du "particularisme" :
    1- Exemplarité nulle, incitation majorée à la réticence vaccinale.
    2- Réflexion sur l'appel à la mobilisation des moyens humains et matériels depuis la métropole.
    3- La perte (provisoire?) de l'emploi par " 80% des 3 600 soignants du CHU de Martinique " ne risque pas d'améliorer les prises en charge, Covid ou pas, et les morbi-mortalités attenantes.
    4- Conséquences du retour en métropole et mesures envisagées ? A nouveau la contrainte ne devrait pas trouver la place que d'autres démocraties lui accorde : L'avis du conseil constitutionnel le 5/8 le confirme.

    Dr JP Bonnet (PH, vacciné)

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