L’Outre-mer s’enfonce dans la crise

Fort-de-France, le vendredi 6 août 2021 – Ces derniers jours la situation dans les Outre-mers continue de s’aggraver, sur fond de défiance envers les autorités et la vaccination.

1 122 cas/100 000 habitants en Martinique

A la Martinique, confinée depuis le 31 juillet, le taux d’incidence continue de grimper pour atteindre, hier, 1 122 cas pour 100 000 habitants par semaine.

Même hausse spectaculaire en soins critiques avec un taux d’occupation* de 188 %. Une situation d’autant plus tendue qu’à ce jour seuls 3 patients ont pu être transférés vers la métropole ! Concernant les décès, on en dénombre entre 5 et 8 chaque jour, un chiffre jamais atteint depuis le début de la pandémie.

Sur RCI (Radio Caraïbes International), le professeur André Cabié (pathologies infectieuses, CHU de Martinique [CHUM]) décrit la situation catastrophique de son hôpital « aux urgences, les patients continuent d'affluer en grande quantité (…) Outre le manque d'espace pour accueillir les patients, le CHUM manque encore de personnel malgré l'activation du plan blanc, l'annulation des congés des soignants, l'appui de la réserve sanitaire et l'appui des forces armées ».

Le salut, semble-t-il, ne viendra pas de la vaccination

En effet, malgré cette situation sanitaire critique on constate dans le département, comme en Guadeloupe, une défiance « culturelle » envers le vaccin qui trouverait sa source dans le scandale du chlordécone. Ainsi, en Martinique, 18,6 % des plus de 12 ans seulement ont bénéficié d’un schéma vaccinal complet, 3 fois moins qu’en métropole. 

Céline Barclay, jeune chanteuse martiniquaise explique à Europe 1 : « Il est évident que l'État a une méconnaissance de notre culture, de notre rapport au monde, à la nature, et qu'il ne suffit pas de dire de faire pour que l'on fasse (…). Je pense que la confiance est perdue et il faudrait prouver, et cela avec de solides preuves, qu'il y a bienveillance dans cette histoire de vaccinations et de passe sanitaire ».

A contrario, dans un texte publié sur ses réseaux sociaux, Serge Letchimy, président du Conseil exécutif de Martinique lance un appel : « Nous devons tous prendre conscience que nous allons vers une catastrophe sans précédent, et le chiffre de 5 morts par jour, va bientôt doubler ou tripler si nous n’agissons pas. Face à cette situation, nous devons nous battre et faire bloc en optant pour la vaccination et le respect des gestes barrières et du confinement ».

Guadeloupe : « la catastrophe se confirme »

« La catastrophe se confirme » c’est par ces mots, que la directrice générale de l'ARS Guadeloupe, Valérie Denux a débuté son point épidémiologique hebdomadaire. « Nous sommes face à un tsunami et on est en train de se prendre la vague, c'est très très très inquiétant » a-t-elle poursuivi.

Ces déclarations pourraient alimenter la défiance. Ainsi, comme le montrent les images de RCI Guadeloupe, le préfet de région Alexandre Rochatte s’est penché vers la responsable de l’ARS Valérie Denux juste avant d’entamer le point presse sur les nouvelles restrictions, pour lui dire : « On adopte un ton grave, catastrophique, pas moralisateur mais juste catastrophique. » Une séquence abondamment commentée sur les réseaux sociaux et vue par certains comme une volonté délibérée d’exagérer la situation.

Quoi qu’il en soit, la Guadeloupe dénombre : 1067 cas/100 000 habitants, une tension en soins critiques de 114 % et un taux de positivité des tests de 16,5 %.
Dans ce contexte, le département est confiné depuis mercredi soir, pour au moins trois semaines. Ce reconfinement "ne passe pas auprès d'une partie de la population", note la journaliste de France 2 Christelle Théophile. "Certains accusent le coup ; c'est le cas des restaurateurs et des professionnels du tourisme. Ils espéraient profiter de la saison pour pouvoir rattraper les périodes d'inactivité (…). Le contexte est aussi celui de la contestation. Samedi dernier, et pour la troisième fois, plusieurs centaines de personnes ont manifesté Basse-Terre, dans le chef-lieu, afin de protester contre le passe sanitaire et l'obligation vaccinale", poursuit-elle.  

La Guyane bientôt confinée ?

Plus au sud, en Guyane, une nouvelle décision de confinement pourrait intervenir dans les jours à venir.

Ainsi, la situation sanitaire continue de se dégrader. Si le taux d’incidence reste relativement contenu (223 cas/100 000 habitants), la tension monte progressivement et 71 % des lits de soins critiques sont occupés par des patients Covid. La aussi, la vaccination est encore peu pratiquée, puisque seul un quart de la population a reçu une première dose de vaccin.

Le vaccin séduit plus dans l’Océan Indien

A La Réunion, qui est également confinée pour 3 semaines, l’Agence Régionale de Santé indique "La situation sanitaire poursuit sa dégradation, tous les indicateurs augmentent" avec le franchissement de la barre symbolique des 3 000 nouveaux cas hebdomadaire. La préfecture annonce aussi que "la forte progression des hospitalisations en médecine, a contraint le CHU à augmenter le nombre de lits de médecine spécialisé pour assurer la prise en charge des patients Covid".

En revanche, contrairement à ce que nous avons vu aux Antilles, le rythme de la vaccination s'accélère à La Réunion. Début août, 40,43 % des habitants en âge de se faire vacciner avaient reçu au moins une première injection. Ce n'était le cas que de 31,47 % d'entre eux mi-juillet.

Parmi les 5 DOM, seul Mayotte semble encore relativement épargnée malgré un léger rebond de l’épidémie, le taux d’incidence y est ainsi de 12,1 cas pour 100 000 habitants.

*nombre de patients en soins critiques pour covid sur le nombre de lit disponible au 31 décembre 2019.

Marlène Augustin

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