
La dermatite atopique (DA) se caractérise par une grande
hétérogénéité à la fois sur le plan clinique (symptômes, sévérité)
mais aussi épidémiologique (âge de début, comorbidités) et
évolutif. Beaucoup de tentatives ont été faites pour distinguer des
sous-types de la maladie afin d’en améliorer le diagnostic, la
prise en charge et l’évaluation pronostique. Aucune ne se révélant
satisfaisante, des auteurs ont décidé d’exploiter les données de la
cohorte de naissance Avon Longitudinal Study of Parents and
Children dans laquelle ont été incluse initialement 14 551
femmes enceintes résidant à Avon (Royaume-Uni) et devant accoucher
entre le 1er avril 1991 et le 31 décembre
1992. Les mères des 13 988 enfants vivants à l’âge de 1 an (96 % de
Blancs) ont été soumises à un questionnaire à 11 reprises alors que
leur enfant avait entre 6 mois et 14 ans, questionnaire qui
s’enquerrait de la présence d’une dermatite flexurale : sécheresse,
démangeaisons, rougeurs dans les creux des coudes et des genoux. En
cas de réponse positive, il était demandé de qualifier la sévérité
de l’atteinte : ne posant guère de problème, peu importante,
importante, très importante. Les antécédents familiaux de maladie
atopique, l’exposition environnementale, le niveau social ont été
notés tout comme l’allaitement au sein, les comorbidités, la
présence d’une fratrie.
Par ailleurs une recherche de mutations sur le gène de la
filaggrine a été effectuée, voire une étude du génome.
Les 13 972 enfants éligibles ont été divisés au hasard en deux
groupes (l’un de développement l’autre de validation). Des réponses
relatives à la dermatite flexurale étaient disponibles dans 85 %
des cas. Dans les deux cohortes, un peu moins de la moitié étaient
des filles, un peu plus de 7 % avaient une mutation (perte de
fonction) sur le gène de la filaggrine, un peu moins de 30 %
avaient au moins un parent avec des antécédents de dermatite
atopique (18 à 19 % avec de l’asthme).
Asthme, antécédents parentaux, genre, anomalies génétiques sont les facteurs de risque de sévérité
A partir des données de la cohorte de développement, cinq sous
types ont été distingués : DA absente ou avec de rares
manifestations (66 % des cas), DA sévère avec des poussée
fréquentes (4 %), DA modérée avec des poussées fréquentes (7 %), DA
modérées régressive (11 %) c’est-à-dire avec des symptômes
équivalents au groupe précédent jusqu’à l’âge de 2,5 ans puis
s’amenuisant au-delà, DA légère intermittente (12 %). Les
observations ont été similaires dans la cohorte de
validation.
Après ajustements pour les autres variables et les mutations
sur le gène de la filaggrine, il est apparu que la présence
concomitante d’un asthme, une dermatite atopique parentale et le
genre influaient sur le phénotype de la DA. Ainsi les enfants avec
un asthme avaient trois fois plus de risque d’être dans le groupe «
DA évère avec poussées fréquentes » (risque relatif RR :
3,19 ; intervalle de confiance à 99 % : 2,02-5,06) et deux fois
plus de risque d’être dans le groupe DA modérée avec poussées
fréquentes. Les enfants avec des antécédents familiaux de DA
avaient deux fois plus de chances d’être atteint de DA sévère ou
modérée avec poussées fréquentes. Les filles avaient plus
fréquemment une DA légère à poussées intermittentes. Les autres
variables examinées (fratrie, classe sociale, allaitement au sein,
présence d’animaux domestiques, tabagisme de la mère) n’ont pas
semblé être associées de manière indépendante au phénotype de la
DA.
Enfin en cas de mutation (perte de fonction) sur le gène de la
filaggrine, les enfants étaient 4 fois plus susceptibles d’avoir
une DA sévère à poussées fréquentes (RR 4,32, IC 3,07-6,07) et deux
fois plus susceptibles d’avoir une DA modérée à poussées
fréquentes, qu’en l’absence d’une telle mutation. Huit SNP
(single nucleotide polymorphism) sur les chromosomes 1, 6
,11, 14 et 19 ont été également associés aux phénotypes de la
DA.
Dr Marie-Line Barbet