
Rein génétiquement modifié
Les détails de cette intervention et du traitement immunosuppresseur mis en place devraient être présentés dans quelques semaines via une publication dans une revue à comité de lecture.Cette dernière décrira également les caractéristiques du greffon. Il s’agit en effet d’un organe de porc génétiquement modifié, afin qu’il ne produise plus de glycane, un sucre à l’origine d’une réponse immunitaire importante chez l’humain et qui avait été identifié comme la cause du rejet cataclysmique dont avait été victime une jeune femme de 26 ans en 1993, qui avait reçu une greffe de foie de cochon. La production de ces reins de porc modifiés a été réalisée par l’entreprise américaine Revicivor (qui appartient à United Therapeutics). Les étapes à venir sont la réalisation d’expérimentations similaires (chez des sujets en état de mort cérébral) mais pendant une durée plus longue, avant d’envisager non seulement une production industrielle de ces greffons génétiquement modifiés, mais surtout des xénogreffes en routine si la tolérance de ces greffons était confirmée.
Apprendre aux cochons à faire le singe
Valves et fragments de peau
Avec le développement des travaux évaluant la xénotransplantation à partir d’organes de porcs, les manipulations génétiques nécessaires à l’élimination de certaines différences rédhibitoires entre ces animaux et les humains (qui concernent notamment la transmission de certains virus) se sont également développées. Ainsi, une ferme allemande basée à Munich est spécialisée dans l’élevage de porcs génétiquement modifiés. Cet élevage (et d’autres dans le monde) contribue ainsi à la production de valves cardiaques ou de fragments de peau utilisés pour les grands brûlés.Des expériences remarquables chez le primate
Ces « fermes » fournissent également les équipes qui mènent des expérimentations chez le primate. Ainsi, en décembre 2018 ont été publiés dans Nature les travaux fondamentaux d’une équipe allemande. Ils ont mis en évidence que des greffons génétiquement modifiés (afin d’inhiber certains marqueurs spécifiques à l’espèce porcine et parallèlement de favoriser l’expression de marqueurs comparables à ceux des primates) implantés chez des singes privés de leur cœur (alors que les cœurs natifs des babouins ainsi transplantés auparavant étaient conservés) permettaient de garder en vie les animaux receveurs pendant plus de 180 jours. Ces résultats étaient d’autant plus remarquables qu’ils se rapprochaient des préconisations de la Société internationale de transplantation cardiaque considérant que pour envisager la transposition des travaux conduits chez l’animal à l’homme, il fallait obtenir la survie de 60 % de primates ayant reçu un cœur de porc pendant plus de trois mois avec au moins 10 animaux survivants. L’intervention newyorkaise est indubitablement une étape supplémentaire (même s’il s’agit ici de transplantation rénale).Aurélie Haroche