Paris, le vendredi 29 octobre 2021 – Hier, le Collectif
inter-hôpitaux organisait, dans l’urgence, une (visio)conférence de
presse pour alerter sur la situation dramatique de la pédiatrie
hospitalière (couplée à une désertification galopante de la
spécialité en ville).
Désormais, ce ne sont pas ‘’juste’’ les services de pédiatrie
générale des hôpitaux généraux qui sont en difficultés, c’est toute
une filière, des hôpitaux de proximité au CHU, du service général
au centre de références pour les maladies rares.
Le collectif dresse le sinistre tableau de la spécialité : « A
l’instar de la grave crise que traverse l’hôpital public, les
services de pédiatrie font face à la fermeture de lits ou à
l’impossibilité d’ouvrir leurs lits saisonniers par manque de
puéricultrices et d’infirmières, d’auxiliaires puéricultrices et de
pédiatres. Les urgences pédiatriques sont submergées comme tous les
hivers par les épidémies virales (…) Les fermetures de services
d’urgences pédiatriques ou accueillant des enfants dans les villes
de taille moyenne font la une des journaux. (…) Se surajoutent des
consultations par manque de recours en ville, les pédiatres sont en
nombre insuffisant, et dans de nombreux territoires, les médecins
généralistes sont saturés, seul l’hôpital public a un recours
pédiatrique. La situation mentale de notre jeunesse est, elle
aussi, alarmante : une vague de troubles psychiatriques
principalement chez les adolescents vient heurter notre système qui
connait à la fois un déficit chronique de l’offre de
pédopsychiatrie et une situation aigue de tension sur l’ensemble de
la pédiatrie hospitalière publique. »
Des filières d’excellence en pédiatrie sont-elles encore
possible ?
Concernant les services de pointe de prise en charge de
pathologies rares, le Dr Oanez Ackermann (service d’hépatologie
pédiatrique du Centre Hospitalier Universitaire Bicêtre) a livré un
témoignage édifiant.
« La situation actuelle ne nous permet plus de prendre en charge
l’ensemble des patients qui relèvent de l’expertise de notre
centre, et les conditions de prise en charge des patients qui ont
accès à nos équipes se dégradent (…) La pénurie de personnel
paramédical, et en particulier, infirmier a maintenant franchi un
point critique. Quand seules 2 infirmières au lieu de 4, voire même
une seule pendant une partie de la journée parfois, doivent assurer
cette charge de travail, non seulement la sécurité de nos patients
n’est plus garantie, mais en plus les infirmières n’ont pas le
temps d’accompagner, de soutenir et d’écouter. (…) Nous vivons une
situation dramatique inédite, mettant en jeu le pronostic vital
d’enfants en situation d’urgence. En ce mois d’octobre, nous
n’avons pas pu accueillir 5 enfants en situation d’urgence vitale,
ayant une hépatite aiguë grave ou une aggravation brutale d’une
maladie chronique du foie et relevant d’une transplantation à tout
moment. Certains ont dû passer par plusieurs centres de
transplantation avant de pouvoir être pris en charge. 2 enfants ont
été pris en charge très loin de leur domicile. Nous devons confier
à une équipe de transplantation d’adulte de jeunes adolescents
faute de place en réanimation, alors que les recommandations sont
de les hospitaliser en pédiatrie. (…) Nous sommes aussi contraints
d’annuler, au dernier moment, en fonction des places restantes
disponibles, des hospitalisations programmées depuis plusieurs
mois. Nous sommes arrivés déjà à un compte de 25 annulations en 4
semaines. Toutes les semaines, nous devons choisir parmi nos
patients, lesquels nous allons pouvoir faire venir, et lesquels
vont devoir attendre. »
Il manque 20 % de lits
Concernant la pédopsychiatrie, en grande difficulté de longue
date, le Pr Lisa Ouss (Pédopsychiatrie, Hôpital Necker) a détaillé
: « Nous estimons que 25 à 30 % des lits de pédiatrie sont
occupés par des adolescents « psy », parfois en unité des tout
petits. (…) Si nous avions eu 30, 40, 50 lits, ils seraient tout
occupés. Par de jeunes suicidants, par des enfants ou adolescents
en situation de maltraitance, actuellement exacerbées ou présentant
des troubles somatoformes ».
Une des clefs de compréhension de cette crise d’une ampleur
inédite : la situation des infirmiers de ces services.
Laurent Rubinstein (CHU Robert Debré, Paris) et Yann Simon
(CHU Bicêtre), tous deux infirmiers ont traduit « l’angoisse
» des personnels face à « l’augmentation de la violence »,
elle-même fruit de temps d’attente augmenté par une pénurie de
soignants qui ne peut aller qu’en s’aggravant.
Ainsi, comme l’a souligné le Pr Isabelle Desguerre
(Neuro-Pédiatrie, Hôpital Necker) : « Les soignants continuent à
quitter l’hôpital, découragés, maltraités, ne trouvant plus sens à
leur métier en raison des conditions de travail et d’accueil
proposées : horaires infernaux, manque de moyens, manque de
formation (la pédiatrie a été supprimée dans le programme des
études d’infirmières), manque de sens à leur pratique quotidienne.
A ce jour, 20 % des lits nécessaires et souvent déjà insuffisants
sont fermés en pédiatrie ».
En d’autres termes, il ne suffira pas d’un Ségur pour sauver la
pédiatrie française du naufrage…
Pour tout le monde! mais ceci était malheureusement prévisible depuis plus de 20 ans et tout le monde le savait, les médecins, nos organismes de tutelles, et l'argent injecté a été dilapidé par une administration hospitalière pléthorique, dangereuse et nuisible! Depuis 20 ou 30 ans! tout le monde le savait, et ceux qui pouvaient en douter en ont maintenant la preuve!
Je me suis battu contre le centre 15 vers les années 2000, ou nous fonctionnions sous forme d'association, ça ne marchait pas assez bien, alors nos politiques et autres administrations ont gonflé leurs effectifs pour régler le problème! Reconnaissons que nous avons laissé faire, et faire gréve en cessant le travail n'aurait pas été éthique! Il y a 6 mois, nous manquions de lits, aujourd’hui, nous en avons trop, faute de personnel§ mais il nous reste les CME et les syndicats, dont certains, passent encore à la télé. Je savais que tout cela tournerait mal, mais à ce point! Je ne serais pas en retraite pour raison de santé, je pense que j'aurais été radié dans un tel contexte ou les libertés médicales sont bafouées, et les généralistes ignorés jusqu'à ce que... regardez la moyenne d'age des médecins, le désespoir du personnel soignant, la détresse de nos patients! J'ai vraiment mal aux tripes!