
Hantise de l’erreur médicale
Le service des urgences adultes de l’établissement de l’Assistance publique – hôpitaux de Paris (AP-HP) compte un tiers de postes de médecins équivalents temps plein vacants. Cette pénurie se fait notamment sentir au cœur de la nuit. Témoignant à propos de ce défaut d’encadrement, un jeune praticien décrivait cet été : « À partir de minuit, les internes sont quasiment seuls pour assurer le circuit long, pour le reste de la nuit. Les internes deviennent chefs et les externes internes ». Cette situation est non seulement dommageable pour la qualité de la formation des futurs médecins, mais également potentiellement dangereuse pour le suivi des patients. Nombre d’internes évoquent ainsi leur hantise de l’erreur médicale.Perte d’agrément
Face à cette situation et alors que d’une manière plus générale les conditions de travail du Service des urgences adultes de l’hôpital Bicêtre n’ont cessé de se dégrader, plusieurs signalements ont été envoyés tout au long de l’année notamment à l’Agence régionale de santé (ARS). Ces derniers ont finalement abouti en juillet à la suspension du service des urgences comme terrain de stage pour les internes. Cette décision est regrettée par l’Assistance publique – hôpitaux de Paris qui assure : « La suspension de l’agrément a été prononcée malgré les mesures d’améliorations des conditions de travail et de sécurisation des internes ». Ces améliorations sont cependant relativisées par les internes, notamment en ce qui concerne le nombre de médecins séniors.Grève des gardes
Surtout, afin de pouvoir continuer à faire fonctionner le
service des urgences, faute d’agrément, le service aura recours à
partir d’aujourd’hui pour assurer les gardes à des Faisant fonction
d’internes (FFI) et réquisitionnera également les internes des
étages. Une solution qui ulcère les jeunes médecins qui considèrent
que ce « contournement » se fait en dehors de toute
légalité. D’abord selon Léonard Corti, président du syndicat des
internes des Hôpitaux de Paris (SIHP), cité par le Parisien
: « un service qui n’a pas d’agrément ne peut accueillir des
FFI, c’est illégal ». Concernant la réquisition des internes
des étages, le SIHP se montre plus ulcéré encore. Le vice-président
du syndicat, Alexandre Brudon rappelle dans le Quotidien du médecin
« Nous demandions de considérer le fait que les internes,
n’étant plus dans un stage pourvu d’un agrément, ne pouvaient faire
l’objet d’une simple affectation. Car sans agrément ni
subordination au chef de service, cela place les internes dans un
exercice illégal de la médecine ». Aussi, le syndicat
considérait que les gardes aux urgences ne pouvaient se faire que
sur la base du volontariat et moyennant une rémunération
supplémentaire. Des revendications qui ont été repoussées. Face à
cette rupture du dialogue, le syndicat a lancé un appel à la grève
de ces gardes. « Tous les internes des étages, mobilisés aux
urgences de façon illégale, vont pouvoir déposer une déclaration
individuelle de grève, pour ne pas faire les gardes », explique
Alexandre Brudon.
Pas d’eau chaude en neurologie
La situation catastrophique des urgences est loin d’être le seul point critique à l’hôpital Bicêtre. Récemment, la sénatrice (PCF) Laurence Cohen a interpellé le directeur de l’AP-HP pour évoquer l’état déplorable du service de neurologie. Faute d’effectif, jusqu’à 60 % des lits de ce service sont fermés. Cette situation s’explique facilement par des conditions de travail qualifiée « d’épouvantables » : « Il n’y a pas d’eau chaude, pas de lève malade, la porte menant aux soins continus est cassée », résume la sénatrice dans le Parisien offrant un énième témoignage de la dégradation alarmante d’un grand nombre de nos hôpitaux.Léa Crébat