
Vide et creux
Cette semaine, les Nations Unies organisaient à Glasgow la COP26, présentée comme un sommet d’importance sur le sujet majeur des conséquences du réchauffement climatique ; même si beaucoup d’observateurs redoutaient une manifestation creuse. Elle l’aura été d’une façon probablement inattendue même pour ses détracteurs, en rappelant le vide qui existe derrière les belles déclarations d’intention.Drôle de climat
Parmi les nombreux représentants officiels ayant fait le déplacement jusqu’à Glasgow, il est tout naturel que les ministres de l’énergie figurent en bonne place. Pourtant, le ministre israélien n’a pas pu assister aux débats du premier jour, le lundi 1er novembre. Karin Elharar était bien présente à Glasgow, mais l’accès à la salle de conférence lui a été refusé par la sécurité. En cause : son fauteuil roulant qui a semblé contrevenir au protocole. Malgré deux heures d’explications, elle n’a pas réussi à convaincre les responsables de la laisser rentrer. « Je suis venue à la COP26 pour rencontrer mes homologues dans le monde et faire avancer notre lutte commune contre la crise climatique. Il est triste que les Nations unies, qui promeuvent l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, ne se préoccupent pas en 2021 de l’accessibilité à leurs propres événements » a-t-elle commenté. Bien sûr, l’incident a soulevé une certaine indignation tant au sein de la délégation israélienne que de la part de plusieurs autres responsables politiques. Le ministre des affaires étrangères israélien, Yaïr Lapid, a ainsi remarqué sur Twitter : « Il est impossible de se préoccuper de l’avenir, du climat et de la durabilité si nous ne nous occupons pas d’abord des gens, de l’accessibilité et des personnes handicapées ». Et alors que le premier ministre israélien, Naftali Bennet avait menacé de ne pas participer au reste des réunions si une solution n’était pas trouvée, une discussion avec son homologue Boris Johnson a permis d’assurer que Karin Elharar pourrait être accueillie dans les salles de conférence en étant intégrée dans l’équipe même de ce dernier.Service militaire
Karin Elharar, qui a appris à l’âge de 9 ans qu’elle était
atteinte d’une dystrophie musculaire, qui peu à peu l’a privée de
l’usage de ses jambes, l’empêchant depuis près de vingt ans de se
déplacer aisément sans fauteuil roulant (elle a 44 ans) a toujours
refusé que son handicap représente un obstacle à ses ambitions.
Après avoir passé son baccalauréat sur ses deux jambes, elle s’est
très jeune engagée en politique (au sein notamment du parti Yesh
Atid, classé au centre) parallèlement à ses études de droit. Après
avoir constamment œuvré et milité au sein d’associations de défense
des personnes handicapés, elle a été élue député en janvier 2013.
Son rôle comment présidente de la commission du contrôle de l’État
l’a beaucoup marqué. Elle a en effet renforcé sa conviction de
l’importance de veiller constamment à ce que les lois ne demeurent
pas des coquilles vides et qu’un véritable engagement politique
permette leur application. Elle lui a également enseigné la
nécessité d’une circulation fluide de l’information, notamment
entre le ministère de la Défense et le Conseil de sécurité
nationale, afin de contribuer à un véritable partage de la décision
sur des sujets cruciaux. En tant que présidente de cette
commission, dans un pays où l’armée a une importance majeure, son
handicap qui l’a exempté du service militaire a parfois pu faire
sourciller. Comme l’a illustré de manière anecdotique sa ténacité
devant les représentants de la Cop26, elle n’a jamais voulu
renoncer : « La première fois que des officiers parmi les plus
hauts gradés de l’armée se sont retrouvés face à moi, je pense
qu’ils ont été surpris de trouver une femme en fauteuil roulant,
qui n’avait même pas fait l’armée. Il y avait des choses que je ne
savais pas et qu’eux savaient, mais avec le temps, tout le monde
s’adapte… » expliquait-elle, il y a quelques années au
Jérusalem Post. Son engagement en tant que député a également
concerné l’amélioration des conditions de vie des personnes
handicapées, avec deux orientations majeures : la lutte contre la
bureaucratie entrave majeure à l’accès aux droits et l’augmentation
des allocations.
Aurélie Haroche