Quelques vérités bonnes à dire sur la nécessité du passe vaccinal
Alors que le gouvernement fourbit ses armes pour faire face à
la 5e vague qui déferle en France comme dans le reste de l’Europe,
en élargissant les indications de la 3e dose et en resserrant les
limites du passe sanitaire, le Pr Dominique Baudon revient sur
quelques vérités qu’il est bon de dire sinon de répéter sur les
taux d’incidence mal interprétés, les dangers paradoxaux de trop
grandes restrictions, l’inutilité d’un vaccin avant 12 ans mais la
nécessité impérieuse de vacciner les deux millions de sujets à
risque qui ne le sont pas encore.
Par le Pr Dominique Baudon, Professeur du
Val-De-Grâce
La vaccination nous protège contre les formes sévères et
graves de Covid-19 (protection de 90 à 95 % avec les vaccins
utilisés en France). C’est la meilleure arme pour éviter les décès,
les hospitalisations et l’éventuelle saturation des services de
réanimation. Aujourd’hui plus de 90 % des sujets en réanimation
sont non vaccinés et les sujets vaccinés en réanimation sont le
plus souvent immunodéprimés.
La vaccination limite la circulation du virus et le nombre de
cas de maladies.
La vaccination n’évite pas d’être infecté, mais diminue
d’environ 50 % le risque d’infection ; Il est en effet normal
qu’un sujet vacciné puisse être infecté (comme dans toutes maladies
infectieuses), mais grâce à la vaccination la réponse immunitaire
rapide va éliminer le virus ; il y a donc une période brève en
général où le sujet vacciné peut être porteur du virus. Dans la
majorité des cas, si infecté, le sujet vacciné reste
asymptomatique.
Le sujet vacciné peut donc transmettre le virus mais avec une
probabilité plus faible qu’un sujet infecté non
vacciné.
Pour l’Hôpital, la 5e vague épidémique est la « vague des
non-vaccinés ». Dans la population c’est une vague de cas
(asymptomatiques surtout) avec un impact pour l’instant modéré sur
l’hôpital. On observe en effet un découplage, une dissociation
entre les courbes des cas détectés très ascendantes, et celles des
cas hospitalisés et des décès en légère ascension, et cela un peu
partout en Europe dans les pays où la couverture vaccinale est
supérieure à 70 %.
Le variant delta du SARS-CoV-2 qui circule majoritairement
aujourd’hui est très contagieux, ce qui explique cette 5e vague et
cela malgré la vaccination. Les gestes barrières, même correctement
appliqués, sont moins efficaces.
Ne pas trop limiter la circulation virale
La circulation active du virus participe à l’acquisition et au
renforcement de l’immunité spécifique contre le SARS-CoV-2.
C’est une règle « classique » dans les maladies
infectieuses immunisantes. Elle permet aussi chez un sujet ayant
été infecté une première fois de relancer et renforcer son immunité
spécifique. Une immunité dite « hybride » associe l’immunité
naturelle à l’immunité vaccinale ; elle apparaît chez des sujets
qui après avoir été malades de la Covid-19 ont été vaccinés. Dans
une étude parue au mois de juin 2021, des chercheurs américains ont
montré que cette immunité "hybride" est « extrêmement
efficace » et qu’elle permet de ne plus quasiment transmettre
le virus (1).
Vouloir trop limiter cette circulation virale (port du masque
en extérieur qui n’a jamais prouvé son efficacité, voire
confinement), c’est permettre à la crise de perdurer.
Les conditions d’obtention du passe sanitaire en vigueur
aujourd’hui en France sont les suivantes : être vacciné avec le
schéma vaccinal complet ou avoir la preuve d’un test négatif de
moins de 24 h (test RT-PCR, test antigénique, autotest supervisé ;
depuis le 25 novembre 2021), le résultat d'un test RT-PCR ou
antigénique positif attestant de la guérison de la Covid-19, datant
d'au moins 11 jours et de moins de 6 mois. Ce passe (QR Code) est
exigé pour se rendre dans des « établissements et les
rassemblements où le brassage du public est le plus à risque sur le
plan sanitaire » (2). À compter du 15 décembre 2021, les
personnes de plus de 65 ans et les personnes vaccinées avec le
vaccin Janssen devront avoir reçu une dose de rappel (3e dose) pour
que leur passe sanitaire reste valide. La même procédure sera
progressivement appliquée à toute la population début 2022.
Ce passe sanitaire « favorise » donc l’infection d’un sujet «
négatif » au dépistage ; cette situation anormale est probablement
due au fait que lorsque le passe sanitaire a été instauré, les
autorités sanitaires, et bien d’autres, pensaient que le sujet
vacciné ou celui ayant eu la maladie Covid 19 ne pouvait
transmettre le virus.
Les indicateurs retenus pour surveiller l’évolution de
l’épidémie ne sont pas fiables
La stratégie de lutte en France a toujours eu pour objectif
principal d’éviter la saturation des hôpitaux. Pour surveiller
l’épidémie les indicateurs étaient le nombre de sujets hospitalisés
pour la Covid 19, le nombre de sujets en réanimation et le nombre
de décès. Ces nombres diminuant malgré la succession des vagues,
c’est le taux d’incidence « des cas » qui est devenu l’indicateur
principal (on ne « parle » quasiment plus des décès !) ; pourquoi
?
J’ai déjà dans des tribunes publiées sur JIM.fr montré que ce
taux n’était pas un indicateur fiable (3, 4) ; il s’agit en effet
du taux d’incidence des tests positifs (porteurs asymptomatiques et
malades de la Covid-19) qui varie selon le nombre de tests réalisés
et selon la population testée. Pour exemple, lors de la mise en
place du passe sanitaire, les sujets non vaccinés ont massivement
été se faire « gratuitement » dépister pour bénéficier de ce passe
; le taux d’incidence a artificiellement augmenté
détectant une majorité de cas asymptomatiques.
Par contre, depuis que les tests sont devenus payants, le
nombre de dépistage a nettement baissé ; l’augmentation observée
des taux d’incidence lors de la 5e vague est artificiellement
abaissée ;
Mi-septembre (période où le nombre de tests de dépistage a été le
plus élevé), 817 000 tests réalisés, taux d’incidence = 250 p 100
000 soit plus élevé qu’aujourd'hui.
Si le 18 novembre 800 000 tests avaient été réalisés, le taux
d’incidence aurait été de l’ordre de 391 p 100 000, soir 2,7 fois
plus élevé, et inversement mi-septembre avec seulement 324 000
tests réalisés, le taux d’incidence aurait été de 99 p 100 000,
soit plus faible qu’aujourd’hui !
Quelle stratégie pour mieux contrôler l'épidémie
La vaccination de la population (12 ans et plus) doit rester
la stratégie prioritaire.
L’objectif principal devrait être de vacciner ceux qui ne le
sont pas encore (6 millions dans la population cible des 12 ans et
plus, dont surtout environ deux millions de sujets âgés et/ou à
risque lié aux comorbidités). Il faut, comme cela a déjà été
préconisé, aller chercher ces deux millions de sujets pour les
inciter à la vaccination, et, pour ceux qui sont isolés ou en
situation précaire leur permettre d’être vaccinés. C’est en effet
cette population qui pourra éventuellement saturer les hôpitaux
lors de cette 5e vague. Le gouvernement insiste sur l’importance de
la 3e dose (rappel) incluse dans la passe sanitaire pour les sujets
de 65 ans et plus ; elle est recommandée pour la population de 50 à
64 ans à partir de début décembre ; elle vient d’être recommandée à
partir de 40 ans par la Haute autorité de santé (5) et sera
proposée à tous les sujets de plus de 12 ans dès ce
samedi.
Peut-être devrait on arriver à la vaccination obligatoire pour
ces populations à risque qui risquent lors de cette vague de
saturer les hôpitaux ; mais il s’agit là d’une décision
controversée, purement politique, avec une alternative le « Passe
vaccinal ».
Les enfants (< 12 ans) sont moins infectés que les adultes
et moins transmetteurs. Les formes clinique sont rares, les cas
graves et décès exceptionnels. Une étude chinoise dont les
résultats ont été récemment présentés sur jim.fr a montré un taux
d’attaque plus de dix fois moindre et surtout que la contamination
se fait essentiellement dans le sens adultes vers enfants
(6).
Selon moi la vaccination de ces enfants n’est pas utile, le
port du masque ne devrait pas être obligatoire et la fermeture de
classe est injustifiée. Il faudrait enfin instaurer un vrai débat
avec arguments scientifiques pour discuter de ces obligations chez
les jeunes enfants, pour étudier l’intérêt individuel pour les
enfants par rapport à l’intérêt collectif.
Il faut instaurer le passe vaccinal
Il permettra aux seuls sujets complètement vaccinés de se rendre
dans les lieux soumis aujourd’hui au passe sanitaire. Cela limitera
encore plus la circulation du virus et surtout évitera le risque
pour des sujets non immunisé d’être contaminé par un sujet vacciné.
Cela évitera le confinement des sujets non vaccinés. Le virus
circulera encore longtemps et il n’est pas envisageable d’arrêter
sa circulation. Même avec une couverture vaccinale maximale de la
population, sachant que le taux d’efficacité des vaccins est
d’environ 90 à 95 %, le virus continuera à circuler. Mais cela aura
aussi des conséquences positives avec la relance de
l’immunité.
On se met à parler de passe vaccinal plutôt que de passe sanitaire, mais quelque chose doit m'échapper: on obtient un passe sanitaire en règle grâce à la vaccination, où se trouve la nuance dans les 2 termes ?
Dr B Bidet
Pass vaccinal ou liberté raisonnée ?
Le 27 novembre 2021
Excellente mise au point amenant cependant quelques questions : « À compter du 15 décembre 2021, les personnes de plus de 65 ans et les personnes vaccinées avec le vaccin Janssen devront avoir reçu une dose de rappel (3e dose) » Quand est prévue la 2e dose pour le Janssen qui a un schéma de primo vaccination à une dose ? Est-ce qu'on ne confond pas dose complémentaire (pour Janssen et immuno-déprimés) et dose de rappel (comme pour la grippe). Considérant que les enfants (peu transmetteurs) et les personnes isolées âgées (peu mobiles) ne sont pas déterminant pour la contagion, pourquoi leur imposer la vaccination ? De surcroît un test négatif est plus protecteur qu'une vaccination, et de fait le pass sanitaire est aussi efficace que le pass vaccinal, donc pour quoi imposer le vaccin à une part (peu importante) de la population au détriment des libertés individuelles ? Jusqu'à quel point vouloir à tout prix le 100%de vaccinés, et au delà de 85 % ? En tout cas tant que la plupart des services de réanimation ne sont pas vraiment proches de la saturation. Surtout si l'on considère bon de « Ne pas trop limiter la circulation virale : La circulation active du virus participe à l’acquisition et au renforcement de l’immunité spécifique contre le SARS-CoV-2. »
Dr Jean-Jacques Le Moine
Passe sanitaire ou vaccinal ? Rappel Janssen ?
Le 27 novembre 2021
On obtient un passe sanitaire avec la vaccination, mais également pour 6 mois (moins 15 jours) après un test positif et pour 24 h seulement, maintenant avec un test négatif...d’où la nuance sur la notion de passe qui n'est pas que "vaccinal". Concernant le Janssen, il semble bien maintenant qu'une dose unique ne soit pas suffisante et qu'une 2° dose par un vaccin ARN soit nécessaire à partir de 28 jours;, si ce n'est pas le cas, le passe serait désactivé le 15 décembre si la personne est éligible depuis plus de 5 semaines. Dans les dernières recommandations, un rappel serait même préconisé au bout de 5 mois après cette deuxième injection.