Paris, le mercredi 5 janvier 2022 – Les déclarations
d’Emmanuel Macron sur les non-vaccinés ont soulevé l’indignation
des élus de l’opposition et provoqué un blocage du débat
parlementaire.
Une phrase qui met le feu aux poudres. En déclarant dans les
colonnes du Parisien « les non-vaccinés, j’ai très envie
de les emmerder et donc on va continuer de le faire jusqu’au
bout », le Président de la République Emmanuel Macron a fait
éclater une crise politique à l’Assemblée Nationale(et ailleurs).
Moins de 24h après le « coup du rideau » de l’opposition,
qui avait repoussé à ce mardi l’examen du projet de loi sur le
passe vaccinal, l’ambiance était déjà passablement tendue entre la
majorité et l’opposition au Palais Bourbon. Mais les propos
agressifs du chef de l’Etat envers les non-vaccinés ont envenimé la
situation.
L’examen du projet de loi sur le passe vaccinal suspendu
Une fois les propos du Président de la République connus, les
élus insoumis, communistes mais également Les Républicains (qui
soutiennent pourtant en principe le projet de loi) se sont succédés
pour dénoncer la dernière sortie d’Emmanuel Macron. « Nous
voulons savoir si nous sommes ici pour amender un texte de loi
visant à emmerder les non-vaccinés » a déclaré le candidat
communiste à l’élection présidentielle Fabien Roussel. « Je ne
peux pas cautionner un texte qui a pour objectif d’emmerder les
Français » a expliqué d’un autre bord de l’échiquier politique
Christian Jacob, président de LR.
Le président de séance Marc Le Fur (LR) a bien tenté de recentrer
le débat sur l’examen du projet de loi, mais le mal était fait.
Exigeant la venue du Premier Ministre Jean Castex dans l’hémicycle,
les députés de l’opposition ont multiplié les incidents de
procédure (rappels au règlement, suspension de séance…) pour
bloquer la discussion. Attendu pour 1 heure du matin, le chef du
gouvernement ne s’est finalement pas déplacé. A 2 heures, la
majorité a finalement abdiqué et voté la suspension de
séance.
Arrêtez d’emmerder Pompidou
A court terme, la sortie d’Emmanuel Macron risque de retarder
l’adoption du passe vaccinal. L’exécutif tablait sur une adoption
très rapide du projet de loi au Parlement pour une entrée en
vigueur le 15 janvier. Mais après deux journées complètes de débat
à l’Assemblée Nationale, il reste encore près de 450 amendements à
examiner. Sans compter que l’opposition de droite est désormais
bien décidée à « emmerder » l’exécutif (par exemple en
saisissant le Conseil Constitutionnel) et à faire patiner le
processus parlementaire.
D’un point de vue sémantique, soulignons, à décharge, que le
chef de l’Etat ne dit pas « emmerder » les non-vaccinés,
mais qu’il a « envie de les emmerder ». Il n’a donc pas
(officiellement) de mépris global pour les non-vaccinés mais
simplement une volonté, au nom d’un certain réalisme sanitaire, de
les contraindre à se faire vacciner. Emmanuel Macron se retranche
ainsi derrière la fameuse phrase de Georges Pompidou, qui avait dit
en 1966 vouloir « arrêter d’emmerder les Français ». Il fait
pourtant précisément l’inverse….
Les propos du Président de la République et sa stratégie de
communication ne manquent pas d’interroger.
Si son objectif était de provoquer et de ramener l’attention
autour de sa personne, le résultat est atteint. Mais cette
déclaration est, pour ses opposants, aussi le signe d’une certaine
arrogance, de l’hubris* qu’évoquait Gérard Collomb lors de sa
démission. Il y a trois semaines à peine, le Président déclarait
pourtant regretter avoir tenu par le passé des propos « qui
peuvent blesser ».
La fin d’une hypocrisie ?
Mais peut être aussi Emmanuel Macron veut-il mettre fin à une
certaine hypocrisie autour de la politique vaccinale. Dire vouloir
« emmerder les non-vaccinés » n’est que la traduction
vulgaire du mantra gouvernemental selon lequel il faut « faire
peser les contraintes sur les non-vaccinés ».
A ce titre, la position de LR parait intenable : peut-on
vraiment vouloir interdire aux non-vaccinés d’accéder aux lieux
publics sans les emmerder ?
Le Président de la République n’a-t-il finalement pas dit tout
haut ce que beaucoup de vaccinés pensent tout bas ? C’est en tout
cas l’explication que défendent ce mercredi matin les représentants
de la majorité. « Il porte une parole que beaucoup de Français
partagent » explique ainsi Christophe Castaner, président du
groupe LREM à l’Assemblée Nationale.
Depuis le 9 août dernier, le Président de la République a fait le
choix clair de distinguer parmi les Français les vaccinés et les
non-vaccinés, considérés par lui comme des citoyens irresponsables.
Un choix qui semble, si on en croit les sondages, approuvé par la
majorité de la population. Un choix que le chef de l’Etat défend
désormais crument, au risque de choquer.
*Selon le Larousse l’hubris est tout ce qui, dans la conduite
de l'homme, est considéré par les dieux comme démesure, orgueil, et
devant appeler leur vengeance.
Emmanuel Macron ne fait, par son propos très direct, que renvoyer l'ascenseur de l'emmerdement à toutes celles et ceux qui en France créent par leur muflerie citoyenne, une situation dramatique pour les malades vaccinés qui ne peuvent obtenir la chirurgie urgente que leur état réclame, faute de place et de soignants, dans certains cas après des démissions (entre autres raisons parce que écœurés de bloquer les lits de soins intensifs avec des non vaccinés).
Dr Xavier Baizeau
L'emmerdant, c'est la prose
Le 05 janvier 2022
Quelle que soit l'idée que l'on peut se faire de l'attitude de certains de nos concitoyens, je pense qu'il importe de ne pas sombrer dans la vulgarité, sauf à vouloir rejoindre dans le caniveau d'autres penseurs, généralement extrémistes, pour qui la violence des propos sert à cacher la vacuité de leur idées. Désolé, Mr Macron, plus rien ne vous sépare des Bolsonaro, Zemmour ou autre Salvini, au moins dans le phrasé. Le monde politique va mal, mais les Français ont certainement les élites qu'ils méritent.