Une mission flash pour les urgences, la solution « miracle » d’Emmanuel Macron

Cherbourg, le mercredi 1er juin 2022 – Emmanuel Macron a annoncé lancer une mission flash d’information d’un mois pour répondre à la crise des urgences.

C’est ce qui s’appelle faire mauvaise impression. Pour le premier déplacement de son second quinquennat, Emmanuel Macron est arrivé avec près de 2 heures de retard ce mardi au centre hospitalier de Cherbourg. S’il avait une bonne excuse (il participait à un sommet européen sur la guerre en Ukraine), le chef de l’Etat n’a pas évité les remontrances du personnel soignant, qui lui ont fait part de leur désarroi et de leurs nombreuses difficultés quotidiennes.

Manque de moyens, pénurie de soignants et de lits, départ massif de salariés, conditions de travail détériorées : l’hôpital public et en particulier les services des urgences traversent une crise sans précédent. Depuis plusieurs semaines, nombreux sont les médecins qui tirent la sonnette d’alarme sur une situation devenue critique et qui pourrait encore s’aggraver cet été avec le départ en vacances des professionnels de santé.

Ce mardi, c’est le Syngof, principal syndicat de gynécologues de France, qui pointait le risque de « fermetures estivales inopinées de maternités ».

Le Dr François Braun, le Monsieur santé d’Emmanuel Macron

Selon l’association Samu-Urgences de France, 20 % des services des urgences de France connaissent des difficultés dans l’accueil des patients. A Cherbourg où s’est rendu le chef de l’Etat, les urgences ne sont désormais ouvertes la nuit qu’aux personnes ayant préalablement appelé le 15, faute de personnel pour accueillir tous les patients.

Face aux soignants excédés, le Président de la République a joué les équilibristes, défendant à la fois son bilan et les « investissements sans précédent » réalisés après le Ségur de 2020 tout en reconnaissant les « difficultés profondes qui rendent aujourd’hui ces métiers difficiles et pas assez attractifs ».

Si Emmanuel Macron n’a avancé aucune mesure concrète, il a annoncé vouloir mettre en place une mission d’information « flash » d’un mois sur les « soins non programmés » qui permettrait « d’objectiver les choses et de passer en revue les manques existants ». Selon le chef de l’Etat, cette mission permettra d’évaluer la situation « territoire par territoire » et « d’apporter des réponses très fortes pour consolider nos urgences dès cet été ».

Elle sera suivie d’une conférence sur la santé « avec tous les acteurs de la santé » en juillet. Une mission flash qu’Emmanuel Macron a décidé de confier au Dr François Braun, chef du service des urgences du CHR de Metz, président de Sami-Urgences de France et référent santé du candidat Macron lors de la dernière élection présidentielle (on notera que cette nomination jupitérienne met la nouvelle ministre de la Santé Brigitte Bourguignon sur la touche).

Faut-il réintégrer les soignants non-vaccinés ?

Les médecins hospitaliers se montrent quelque peu dubitatifs face à cette annonce, qui semble relever plus de la communication politique que de l’action concrète. Connu pour son franc parler, le Dr Mathias Wargon estime que cette mission d’un mois « ne changera rien ». Selon lui, aucune solution ne pourra être trouvée d’ici cet été. « Il va falloir limiter les dégâts pour cet été et puis peut être faire un travail de fond qui n’a jamais été fait et ne pas se contenter d’un rapport qui va répéter la même chose que ce qu’on a dit la dernière fois » explique-t-il.

Revalorisation des gardes et des astreintes, obligation de garde pour les libéraux, tri aux urgences…les différentes solutions envisageables pour résoudre la crise des urgences sont connues. Mais face à l’urgence, beaucoup estiment nécessaire de réintégrer les soignants qui ont refusé de se vacciner contre la Covid-19, suspendus depuis le 15 septembre dernier. 

Si la solution est régulièrement avancé par l’extrême-droite, elle a désormais les faveurs de certains médecins et ce alors que l’épidémie de Covid-19 continue de reculer. « On ne peut pas se passer de 15 000 personnes suspendues, même si elles ont fait une erreur, il faut une amnistie » expliquait il y a deux semaines le Dr Patrick Pelloux.

S’il avait lui-même évoqué une éventuelle réintégration le 29 avril dernier, Emmanuel Macron a fermé la porte ce mardi. « La réintégration des soignants non vaccinés n’est absolument pas une réponse au problème » a expliqué le Président de la République, estimant que les soignants non-vaccinés « ont un rapport à la déontologie médicale très marginal ».

Emmanuel Macron ferait-il passer l’idéologie avant le pragmatisme ?

Quentin Haroche

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Vos réactions (7)

  • Monsieur la morale

    Le 01 juin 2022

    Le refus du vaccin des soignants suspendus n'a rien à voir avec la déontologie et le Dr Macron devrait relire le code de déontologie. Par la même occasion il devrait se pencher sur la déontologie financière et politique de membres de LREM et sur celle de sa police. Bref, qu'il balaie devant sa porte avant de donner des leçons de morale à tout le monde. Cet homme ne sait rien de la vrai vie parce qu'il a toujours vécu en marge de la société.

    Dr Pierre-André Coulon

  • Vraiment tout est permis...

    Le 01 juin 2022

    ...y compris à un président de dire que les médecins non vaccinés ont un rapport marginal à la déontologie médicale ?
    La déontologie comporte une part évolutive : elle est le reflet des valeurs et des préoccupations de la société. L'épidémie n'est plus ce qu'elle était et la répétition des doses entraîne semble-t-il une immunité de plus en plus volatile. Les personnels de santé vont-ils se faire vacciner toutes les semaines pour être déontologiquement acceptables ?
    A-t-on vraiment un président éthiquement et moralement acceptable ?

    Dr Françoise Albertini

  • Médecine virtuelle ?

    Le 02 juin 2022

    On ne va pas rattraper en un mois 50 ans de numerus clausus, ni rajeunir la population. La réduction du nombre de soignants ne réduit pas la demande médicale, et ne comble pas le trou de la Sécu, n’en déplaise aux ENArques qui se sont succédé depuis les années 70.

    Dr Jean-Marie Malby

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