Brigitte Bourguignon court-circuite la mission flash et propose 4 mesures d’urgence pour les urgences

Paris, le jeudi 9 juin 2022 – Invitée à s’exprimer au congrès Urgences 2022 à Paris, la ministre de la Santé, Brigitte Bourguignon a annoncé une première série de mesures visant à répondre à la crise des urgences hospitalières…sans attendre les conclusions de la mission flash confiée au Dr François Braun par le Président de la République (élections législatives oblige !).

« Au Congrès Urgences, j’ai voulu rencontrer les urgentistes, non pas pour minimiser les difficultés de notre système de santé, mais pour leur dire, en responsabilité, que nous bâtirons, avec la ville et l’hôpital, des solutions nouvelles, rapides et efficaces pour les dépasser » a ouvert la ministre.

Doublement de la rémunération des heures supplémentaires

Elle a ensuite détaillé 4 mesures :

- un doublement de la rémunération des heures supplémentaires du personnel non médical et du temps de travail additionnel des médecins ;

- la possibilité pour les élèves infirmiers achevant leur formation d’ici le début de l’été de commencer à exercer sans attendre la remise de leur diplôme à la rentrée ;

- la mise en place de « facilités de cumul avec les pensions » pour les soignants retraités volontaires pour reprendre une activité durant la période estivale ;

- enfin, le gouvernement a demandé aux agences régionales de santé (ARS) de « remobiliser les dispositifs territoriaux de gestion de crise » pour renforcer la coordination entre les différents acteurs locaux de santé (hôpitaux, cliniques, etc.).

Ces premières mesures doivent être complétées par les propositions de la mission Braun dont les résultats sont attendus le 1er juillet.

Remettre à plat le système de santé

Au-delà de ces mesures et de la mission flash, Brigitte Bourguignon a averti « nous devrons ensuite aller plus loin, pour transformer partout en France notre système de santé, dans un esprit de responsabilité et de solidarité. C’est ce qu’attendent nos concitoyens ». « Je n’accepterai ni l’instrumentalisation politique, ni que l’on fasse croire aux Français que partout, le système s’effondre. Ce serait méconnaître les efforts de tous sur le terrain », a encore prévenu la ministre.

Mission flash : vers un plan de 150 propositions ?

Concernant la mission flash le Dr François Braun était auditionné le même jour au Sénat.

Une intervention accueillie avec un certain scepticisme dans les couloirs du Palais du Luxembourg, où les rapports sur la situation de l’hôpital s’empilent depuis des lustres. « Je suis assez étonnée qu’il y ait une énième mission-flash. Cette mission-flash est parfaitement inutile ! », a notamment taclé la communiste Laurence Cohen.

« Derrière le délai d’un mois annoncé pour cette mission, il y avait certainement une volonté d’enjamber les législatives avant de devoir trancher. Désormais, on a l’impression d’avoir un président de la République nouvellement élu, qui découvre l’urgence d’une situation bien connue depuis longtemps » observe Catherine Deroche, sénatrice LR.

« Le traitement est dans sa globalité connu, puisque toutes les solutions ont été mises sur la table », a reconnu François Braun devant les sénateurs,  « l’objectif est de maintenant rédiger l’ordonnance et de s’assurer que les médicaments sont bien donnés ».

Son groupe de travail a déjà listé 150 pistes, élaborées aussi bien par les professionnels, les syndicats ou les parlementaires. Il ne reste plus qu’à les « prioriser » et voir lesquelles semblent « réalistes » pour une mise en œuvre à court terme.

« Dès qu’une idée fait consensus, elle est tout de suite transmise au ministère de la Santé, pour regarder si d’un point de vue réglementaire c’est possible, pour que ce soit réellement applicable au 1er juillet », explique François Braun.

Les premiers remèdes du Dr Braun

Parmi les pistes qui sont presque actées, François Braun avance l’idée de réguler l’accès aux urgences, grâce à un recrutement massif d’assistants de régulation médicale. Or, une certification sera bientôt exigée et pourrait empêcher l'arrivée des renforts dans les équipes. « Si on ne repousse pas cette date [de certification], on ne pourra pas recruter » annonce-t-il aussi.

Pour éviter le naufrage de cet été, le Dr Braun propose de suspendre, de juillet à septembre, les tâches administratives des médecins…Sans donner néanmoins de solutions de rechange.

Il suggère aussi une revalorisation des actes de médecine générale pour les prises en charge au titre de la régulation du Samu et une meilleure reconnaissance de la pénibilité du travail de nuit.

Interrogé à plusieurs reprises sur le volet budgétaire le médecin a botté en touche. « Ce n’est pas mon cadre », prévient-il. « La décision ne sera pas prise par moi ».

Des mesures bien accueillies…mais jugées insuffisantes

Sur les annonces de Brigitte Bourguignon, les syndicalistes restent mitigées, bien que le doublement de la rémunération des heures supplémentaires et du travail additionnel et l’appel aux retraités semblent déjà faire consensus.

Mais globalement ces mesures sont jugées insuffisantes. Par exemple, Thierry Amouroux, président du SNPI explique sur France Info : « on est dans une situation où l'hôpital s'effondre, pas simplement les urgences mais dans tous les services avec 15% des lits qui sont fermés dans les hôpitaux de Paris par exemple. Ces mesures ne répondent absolument pas à ça. Il faut se donner les moyens, changer le logiciel : revaloriser les salaires certes, mais aussi revoir les ratios de patients par infirmière pour redonner envie à ceux qui ont arrêté d'exercer de revenir à l'hôpital. Les moyens annoncés ne suffisent pas ».

« Le bateau coule et Mme Bourguignon nous fournit un verre pour écoper » conclut-il.

F.H.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions (10)

  • Les 4 mesures miraculeuses

    Le 09 juin 2022

    Quelles mesures ? Aucune embauche, aucune revalorisation de salaire, qui voudra faire des heures supplémentaires ? Les retraités n’ont pas l’envie de revenir au vu du chaos actuel.
    Ces 4 propositions salvatrices m’ont bien fait rire…….
    L’été sera chaud ……

    Anna Cannavacciuolo (IDE)

  • Le bateau coule...

    Le 10 juin 2022

    ...et on distribue des cuillers pour écoper sans empêcher ceux qui font des trous dans la coque de continuer!... Quand la santé redeviendra-t-elle un SERVICE public, et non une ENTREPRISE à privatiser ?

    Dr François Balta

  • Une machine à remonter le temps ?

    Le 10 juin 2022

    Avant le Flash , l'Utra-Flash : et moi et moi.
    Hier 9/6, gréve à Roissy CDG : Une mobilsation syndicale unanime (CGT, FO, CFDT, CFTC, CFE - CGC, Unsa, SUD) pour une requête univoque si simple et comme de coutume avec beaucoup moins d’états d’âme : « 300 € d’augmentation pour tous les salariés travaillant sur la plateforme de Roissy ». Qui veut le plus peut le moins ?

    On y retrouve les standards : Intérimaires, arrêts maladie, arrêts de travail et son corollaire : « une accélération des recrutements »
    Bilan Roissy CDG : 1 vol sur 4 annulé.

    Corporatismes pour corporatismes, notons que la « mobilisation des soignants » cette semaine fut bien moindre dans ses moyens, son impact et donc dans sa portée si ce n’est que médiatique.
    Un fonctionnement adaptatif en mode dégradé, en nivelant à nouveau par le bas, pour passer l’été sans penser à l’automne puis l’hiver est évoqué. Pas sûr qu’il sera du goût d’usagers soudainement compréhensifs
    Ramener la problématique à une question de primes ou salaires (de la peur ?) est une bévue « Flash ». Quelle corporation ne réclame pas une hausse de salaire ? Quelle corporation accepte le principe de priorités en renonçant enfin au « quoi qu’il en coute » ? et à l’open bar.
    Accélérer les recrutements, c’est aussi raccourcir les formations : quoi qu’il en coute à nouveau ?
    Reste l'appel désespéré aux bonne volontés, quitte à avaler à nouveau quelques couleuvres par Sacerdoce , quitte à ratisser large faute de pouvoir creuser profond.
    Restera les appels à la Liberté : La liberté de ne pas prendre de gardes, celle de prescription, d'installation.
    Restera les appels des idéologues à la grande réquisition du "privé".
    Restera à dire publiquement que peu des usagers des urgences en relèvent stricto-sensu.
    Restera à dire que limiter la problématique aux Urgences et Urgentistes est un raccourci démagogique.

    LA solution ? : « une machine à remonter le temps » qui nous absoudrait des bévues structurelles antérieures que nous savons.
    S’il en existait d’autres, ça se saurait à l’issue de n rapports , n grêves sparadrap , un Ségur et 1 crise sanitaire et sociale en cours.

    Dr JP Bonnet PH

Voir toutes les réactions (10)

Réagir à cet article