Les industriels du médicament déçus par le PLFSS

Paris, le lundi 10 octobre 2022 – Faisant part de son opposition à plusieurs mesures du PLFSS, les industriels du médicament ont déjà obtenu quelques concessions de la part du gouvernement.

En juin 2021, le Leem (Les Entreprises du médicament) saluait les annonces du Président de la République visant à « renforcer l’autonomie stratégique de notre pays en matière de médicaments ». Plus d’un an plus tard, la bonne entente entre l’exécutif et l’industrie pharmaceutique semble être définitivement enterrée. Le projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour l’année 2023, présenté le 26 septembre dernier, qui prévoit d’importantes économies dans le domaine du médicament, a fortement déçu les industriels et ils ne s’en cachent pas.

Au total, selon les membres du G5 Santé (groupe qui rassemble les huit plus grandes entreprises pharmaceutiques françaises partageant 5 ambitions), c’est 1,1 milliard d’euros d’économie qui vont être demandés à l’industrie pharmaceutique, dont 800 millions d’euros de baisse de prix des médicaments. Les représentants de l’industrie pharmaceutique s’inquiètent également de la réévaluation de la clause de sauvegarde, qui permet de taxer jusqu’à 70 % les revenus dépassant un certain seuil et qui pourrait atteindre un montant total 2,4 milliards d’euros en 2023. Une charge « insupportable et confiscatoire » pour Didier Véron, président du G5 Santé.

Pas de concession du gouvernement sur la clause de sauvegarde


Pour Eric Ducournau, président de la société Pierre Fabre, ce PLFSS ne prend pas en compte « la hausse des coûts liées à la crise énergétique de 10 à 15 % » alors que la pharmacie « est le seul secteur industriel ne pouvant recourir à des hausses de prix ». « Avec l’inflation, pour certains produits, le coût de revient industriel est supérieur au prix de vente » abonde dans le même sens Didier Véron.

Au-delà des questions purement budgétaires, les représentants de l’industrie du médicament regrettent que rien ne soit prévu pour remédier aux lourdeurs administratives dénoncées par le secteur depuis plusieurs années. Selon le G5 Santé, un tiers des médicaments qui bénéficient d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) au niveau européen n’ont pas encore été intégrés au marché français. Le délai moyen de définition des modalités de remboursement d’un médicament est de 500 jours en France, alors que l’Union Européenne demande de ne pas dépasser 180 jours.

Invité ce jeudi aux rencontres du G5 Santé organisé à Paris, le ministre de la Santé François Braun a tenté de calmer la colère des industriels. Sur la question de la clause de sauvegarde, le ministre a assuré que le gouvernement ne céderait pas. Selon lui, « il est équitable et nécessaire à l’équilibre de nos comptes sociaux que les entreprises pharmaceutiques contribuent à hauteur de leur dynamisme », rappelant que le taux de croissance de l’industrie sur le marché français est de 6 %.

Une procédure d’appel d’offre qui passe mal


En revanche, le ministre a indiqué que le gouvernement était prêt à lâcher du lest sur un point qui irrite particulièrement les industriels : l’article 30 du PLFSS. Cette disposition prévoit de mettre en place un système d’appel d’offres selon lequel, parmi les médicaments de même cible thérapeutique, seul serait pris en charge par l’Assurance maladie celui qui répond le mieux à des critères de prix et de sécurité d’approvisionnement.

Selon le G5 Santé, qui s’appuie sur les conclusions d’un rapport de l’Inspection Générale des affaires sociales (IGAS) de 2012, un tel dispositif aurait des effets pervers, en ce qu’il inciterait les laboratoires à délocaliser la production de médicaments génériques à l’étranger, mettant à mal l’indépendance sanitaire de la France.

Déclarant avoir « entendu les inquiétudes des industriels », François Braun a assuré qu’un amendement gouvernemental serait déposé pour transformer cette procédure d’appel d’offres en une « simple expérimentation » portant sur certains médicaments seulement.

Création d’une contribution financière exceptionnelle pour les médicaments à « forte croissance et à chiffre d’affaires élevé » ou encore mise en place d’un paiement échelonné et conditionné pour les thérapies innovantes couteuses : les points de crispation sont nombreux autour du PLFSS. Pas sûr que cette concession à la marge du gouvernement sur la procédure d’appel d’offres n’apaise la colère des industriels et ne rétablisse leur confiance envers l’exécutif.

Grégoire Griffard

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Vos réactions (1)

  • Le budget des médicaments

    Le 10 octobre 2022

    Intéressante cette "clause de sauvegarde". Est-elle spécifique ou pourrait s'appliquer à d'autres secteurs d'activité ?

    Dr B Hazon

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