« Youtube ne peut pas laisser dire que la 5G transmet le Covid ! »
40 millions d’utilisateurs par mois en France, 500 contenus qui
sont mis en ligne à chaque minute, c’est sûr on trouve de tout sur
Youtube. La plateforme a décidé de faire le tri parmi ses vidéos
Santé. Mieux, le géant américain a décidé de labelliser certaines
chaines comme sources de Santé vérifiées, avec un panneau
d’informations et des sections dédiées en tête des résultats de
requête. Charles Savreux, porte-parole de Youtube, explique le
pourquoi du comment.
What’s up Doc : Pourquoi mettre en place une nouvelle
signalisation Santé sur Youtube, trop de gens publient n’importe
quoi ?
Charles Savreux : Notre nouvelle stratégie santé repose sur
deux chantiers principaux : d’abord des efforts de modérations pour
déterminer ce qui est légitime sur Youtube, avec la difficulté de
trouver le bon curseur entre liberté d’expression et sécurité de
nos utilisateurs. Et d’autre part, on essaie de mettre en avant les
sources qui font autorités sur les sujets de Santé. Depuis le
Covid, on a énormément travaillé nos règlements pour la modération
des sujets de Santé, plus d’une dizaine de mises à jour rien qu’en
2021. Par moment, on a forcément été pris de court sur certaines
notions aussi évidentes que la 5G et la transmission du
Covid.
Parce que sur une chaine Youtube on n’a pas le droit de
dire ce qu’on veut, même n’importe quoi ?
CS. : Non, justement. On a renforcé nos règlements
notamment sur les sujets de désinformation, et d’autant plus sur
les sujets de Santé. Pour essayer de trouver un juste milieu, même
si c’est difficile, on se base sur des consensus scientifiques
internationaux, donc on travaille avec l’OMS par exemple. On ne
peut plus dire que le Covid n’existe pas, que c’est une grippette,
que le vaccin n’existe pas.
En plein effort vaccinal, on a essayé de supprimer un maximum
de contenus qui pouvaient aller à l’encontre de l’effort vaccinal
lié au Covid. On a supprimé 85 000 vidéos sur les deux derniers
trimestres, juste sur le sujet du vaccin.
Et pour la mise en avant des sources identifiées, d’ores et déjà
les algorithmes faisaient remonter les vidéos de média. Aujourd’hui
on va plus loin, on a lancé deux nouvelles fonctionnalités : le
premier objectif, un petit bandeau qui légitime les vidéos de Santé
issues d’une centaine de sources identifiées avec l’OMS, qui sont
certifiées. Je regarde une vidéo, elle est sûre, je n’ai pas besoin
de tout revérifier.
Là, on commence par les cliniques, les hôpitaux, les établissements
d’enseignements, les
services de santé publique. Et on va compléter ce travail au
fil des années. On s’est rapproché de partenaires de référence
comme l’AP-HP ou certains grands CHU, Lille, Besançon, ou la fac
Paris Cité qui a déjà une grosse audience.
Qu’est-ce que le partenariat annoncé avec l’AP-HP va changer sur
leur chaine Youtube ?
CS. : C’est un accompagnement dédié pour les aider dans
le développement et le renforcement de leur chaine Youtube,
partager de bonnes pratiques, comme on fait pour beaucoup de
créateurs. Des ressources humaines pour partager les facteurs de
succès, identifier quel contenu marche mieux, montrer en termes de
formats, de contenus, mais aussi d’intervenants et de thématiques,
ce qui a le mieux fonctionné…
Et est-ce que les médecins youtubeurs, comme
Doc FX ou
Why Doc peuvent demander à être labelisés ?
CS. : Ce se sont des individus, pas des établissements, donc
non, ils ne rentrent pas dans les critères définis avec l’OMS. Pour
l’instant on travaille seulement avec des institutions. On est en
lancement, on veut établir un cercle vertueux, pour inciter tous
ces organismes à créer plus de contenus. Ca évoluera peut-être,
pour intégrer des médias, ou des individus. Là l’ambition est de
partager des informations de qualité sur des thématiques de santé
qui sont sensibles.
Et allez-vous essayer de rendre les vidéos de l’AP-HP ou
des autres partenaires plus sympas ?
CS. : L’idée c’est de rendre les vidéos Youtube friendly.
C’est pour cela qu’il va y avoir un coaching, sur les formats, les
capsules, sur quelles thématiques se positionner, répondre aussi
aux requêtes des internautes.
Quelles sont les thématiques qui marchent en Santé sur
Youtube ?
CS. : On ne partage pas la liste exhaustive, mais ça va
de l’otite, les comportements alimentaires, les cancers (bouche,
foie, ovaires, estomacs, testicules, vessie, peau, col de l’utérus,
poumon, pancréas, colorectal), maladie de Parkinson, sclérose en
plaques, l’asthme, la maladie de Crosne, la trisomie… Et l’intérêt
c’est de répondre aux requêtes médicales, avec dans les premiers
résultats, un inventaire de contenus de sources
légitimes.
Pour l’instant, pour certaines requêtes, on manque de vidéos,
issues de ces sources crédibles. Donc il y a un objectif commun,
pour nous de proposer des contenus de qualité et crédibles aux
utilisateurs, et pour les institutions d’atteindre le public plus
facilement. Youtube est le deuxième moteur de recherches après
Google. C’est donc un très bon moyen pour une institution pour
faire de la pédagogie. En plus là on leur a donné une place de
choix, dans les requêtes et dans l’identification.
Ce besoin de clarifier l’offre de Santé est venu du
complotisme autour du Covid ?
CS. : On a toujours supprimé les vidéos borderline de nos
requêtes voire de nos algorithmes de recommandations. La
désinformation médicale est bannie. Soit quelqu’un signale la
vidéo, soit nous utilisons le machine learning, et nous avons des
modérateurs qui trient les vidéos.
Mais entre le moment où le sujet est repéré et le moment où
l’on peut retirer la vidéo, le temps de prévenir le contributeur,
ça peut prendre plusieurs semaines. Et puis il faut faire la
balance entre trop de censure et trop de laxisme. C’est difficile
pour certains sujets.
Les vaccins, on ne peut plus dire qu’ils sont nocifs et
dangereux, mais on ne va pas régler le débat sur l’homéopathie, ce
n’est pas à nous de le faire. D’où notre travail de modération et
de mise en avant des sources qui font références. Ca nous semble la
bonne approche sur les sujets de santé, tout en laissant une
certaine liberté d’expression. On évolue au fur et à mesure du
temps, par exemple l’hydroxychloroquine, ce n’était pas la même
chose entre le début et la fin de la pandémie.
Et nouveau label Source de Santé vient crédibiliser ces
vidéos ?
CS. : C’est l’idée, donner un maximum de contextes,
pour donner accès au contenu avec le plus d’informations. La vidéo
d’un CHU, de l’AP-HP ou d’une fac de médecine c’est une source
crédible à laquelle se fier. Mais on peut avoir d’autres personnes
qui peuvent avoir d’autres visions sur certains sujets. Et il y a
une responsabilité de Youtube de protéger nos
utilisateurs.
Bien sûr, il y a des médecines douces, alternatives, il y a
une part autorisée, mais il faut protéger des idées dangereuses.
Suite à la rumeur de la 5 G qui propageait le Covid, en Angleterre,
les installateurs d’antenne se faisaient tabasser. Boire de l’acide
pour soigner une maladie, on se doit d’intervenir. Donc on doit
savoir où placer le curseur, en se basant sur des consensus
internationaux, qui évoluent en permanence et nos règlements
évoluent avec.
Merci à YouTube de nous permettre de revoir, deux ans après les faits de grands moments de désinformation qui resteront dans l’Histoire (à moins que YouTube, fidèle à sa politique assumée de contrôle et de censure ne cherche à effacer les preuves et à ré-écrire l’histoire...).
Dr J-Y Marandon
Quelle labellisation pour les vidéos de l'IHU ?
Le 16 octobre 2022
A priori les vidéos de l'IHU rentrent dans les critères de labellisation ? Dommage que le JIM n'ai pas posé la question à Youtube. En tout cas le fait d’émaner d'une institution n'est pas une garantie de crédibilité scientifique, surtout sur les questions de santé.