
L’Ordre cherche-t-il à se rattraper ou à masquer ses manquements ?
Dans ce second volet, l’Ordre des médecins s’est porté partie
civile. Ce positionnement de l’Ordre est fortement critiqué par le
Mouvement d’insoumission des ordres professionnels (MIOP). Ce
groupe, on le sait, conteste non seulement la légitimité des ordres
professionnels mais plus encore leur orientation politique.
Cependant, concernant l’affaire Le Scouarnec, le MIOP considère que
la constitution de partie civile pourrait conduire à masquer les
manquements de l’institution ordinale en la matière. En 2005, en
effet, le praticien avait été condamné à quatre mois de prison pour
détention d’images pornographiques. Le Conseil départemental du
Finistère dont il dépendait avait demandé une copie du jugement et
avait alors estimé que s’agissant d’un praticien hospitalier,
l’affaire ne relevait pas de sa compétence.
Puis en 2008, tout en connaissant la condamnation du Dr Le
Scouarnec, le conseil départemental de Charente-Maritime avait
cependant accepté de l’inscrire à son tableau, sans émettre aucune
réserve quant à la nécessité d’empêcher les contacts du médecin
avec de jeunes patients.
Une argumentation trop détachée de la réalité ?
Pour se défendre de cette absence de réaction, l’Ordre des
médecins a fait valoir qu’à l’époque des faits (la législation a
ensuite évolué), il n’était pas compétent pour « rechercher une
responsabilité disciplinaire envers les médecins hospitaliers
». Un raisonnement que le MIOP conteste et qui selon lui est
mis en avant par l’Ordre pour le « dédouaner » de ses
responsabilités.
En effet, selon l’association contestataire « les faits
reprochés ayant été commis au domicile », l’Ordre aurait tout à
fait pu et dû juger qu’ils étaient « détachables de la fonction
de médecin hospitalier » et donc intervenir. Tout au plus,
compte tenu de son absence de réaction à l’époque (et alors qu’une
alerte avait été lancée par le Dr Bonvalot président de la CME de
l’hôpital de Quimperlé), l’Ordre ne devrait pas pouvoir considérer
légitimement qu’il est en position de se porter partie
civile.
Un avant-goût de la position des juges
Ces arguments avaient été présentés une première fois au
tribunal administratif de Paris en avril dernier afin que soit
nommé un administrateur ad hoc pour représenter l’Ordre des
médecins, mais le tribunal s’est jugé incompétent. Aussi, le
tribunal judiciaire de Paris a été à son tour saisi : l’audience
s’est tenue la semaine dernière et le délibéré sera rendu le 3
novembre. Sans doute, une décision favorable à l’intervention du
MIOP serait une première forme de reconnaissance d’un défaut dans
la gestion de cette affaire par l’Ordre des médecins. A
suivre.
Aurélie Haroche