
Paris, le mardi 29 août 2023 – Les morts subites des adultes concernent environ 40 000 personnes par an en France. Une équipe internationale de chercheurs, menée par un praticien français, rappelle pourtant que des « gestes salvateurs » sont aussi simples qu’efficaces et mériteraient d’être mieux connus.
Eloi Marijon, chef de service de cardiologie à l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris), tire la sonnette d’alarme dans un article paru dans The Lancet. Selon lui, et les trente chercheurs internationaux qui ont participé à cette enquête, le taux de morts subites est malheureusement trop « stable » dans le monde.
40 000 décès par an en France
Une étude de 2022 estime que le nombre de morts subites de l’adulte serait de 250 000 par an à l’échelle européenne. En France, elles seraient de l’ordre de 40 000 par an, selon Eloi Marijon, qui a déduit cette statistique à partir du registre du Centre d’expertise mort subite de l’hôpital Georges-Pompidou, qui recense tous les arrêts cardiaques hors hôpital à Paris et dans la petite couronne.
Dans la très grande majorité des cas, la mort subite trouve sa cause dans un problème cardiaque. La plupart du temps (75 %), elle est la conséquence d’un infarctus du myocarde ou est en lien avec une pathologie des artères. Les overdoses et les hémorragies cérébrales sont, elles aussi, responsables d’un petit nombre de morts subites.
Un taux de survie inférieur à 10 %
Dans l’article publié dans le Lancet, les experts internationaux s’émeuvent ainsi que « le taux de survie après un arrêt cardiaque extrahospitalier reste inférieur à 10 % dans la plupart des régions du monde », une situation qui stagne de façon « inacceptable », jugent-ils. D’autant que les gestes de premier secours sont simples et extrêmement efficaces, en particulier le massage cardiaque et l’utilisation d’un défibrillateur.
« Après un arrêt cardiaque, toute minute passée sans massage cardiaque diminue de 10 % les chances de survie », souligne Lionel Lamhaut, codirecteur du SAMU 75 et chef du service d’anesthésie-réanimation de l’hôpital Necker (Paris). Étant donné que les pompiers ne sont pas dotés du don d’ubiquité (ils mettent en moyenne 13 minutes à arriver sur les lieux d’un arrêt cardiaque), les témoins d’un tel accident doivent absolument le reconnaître et engager un massage cardiaque le plus tôt possible. « Des études récentes démontrent qu’en cas de massage et défibrillation dans les minutes qui suivent l’événement, on peut atteindre plus de 80 % de survie », indique Eloi Marijon.
Malheureusement, pour l’heure, le taux de survie à une mort subite est seulement de 7 % à l’échelle du territoire.
Un effort de pédagogie à enclencher
Les signataires de cet article recommandent donc principalement de mieux diffuser les gestes qui sauvent, en particulier le massage cardiaque. En France, la formation prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC1), qui inclut l’éducation au massage et à l’utilisation d’un défibrillateur, dure sept heures. Les auteurs de l’étude estiment, qu’en complément, il faudrait aussi et surtout des formations plus courtes (deux heures), répétées régulièrement (tous les deux ou trois ans), et dans le plus grand nombre possible de lieux. « En France, cette éducation pourrait commencer au collège ou au lycée, voire dès l’école primaire car les jeunes enfants peuvent aider à accomplir ces gestes salvateurs », explique Eloi Marijon, qui propose en outre de renouveler ces formations lors de la préparation du permis de conduire ou encore sur les lieux de travail.
Les auteurs de l’étude suggèrent aussi de revoir la distribution des défibrillateurs accessibles au grand public, préconisant que ceux-ci soient « enregistrés, accessibles 24 heures sur 24, reliés directement au système de répartition des urgences médicales » et incluent la géolocalisation et transmettent l’état fonctionnel de l’appareil. Ils proposent, également, de mettre en place des défibrillateurs mobiles.
Enfin, les signataires s’interrogent sur les séquelles des arrêts cardiaques, qui restent méconnues, aussi bien concernant les potentiels troubles psychiatriques que les déficits d’ordre neurologique.
Concernant les personnes qui succombent malheureusement à de tels accidents, ils préconisent de recourir massivement aux autopsies, ce qui permettraient aux familles d’avoir des données importantes sur les causes exactes du décès (des informations d’autant plus importantes pour les proches quand ces causes s’avèrent être héréditaires).
Quentin Haroche