
Paris, le jeudi 26 novembre 2015 - La Haute autorité de santé
(HAS) a lancé mardi la 5ème édition de la semaine de la sécurité
des patients soulignant que les événements indésirables liés aux
soins, graves ou non, sont encore trop fréquents. Le thème de cette
année concerne la sécurité aux points de transition tout au long
des parcours de soins des patients, avec un accent mis sur 3 axes
très concrets : l’identito-vigilance, la conciliation
médicamenteuse, la lettre de liaison ville/hôpital.
La gestion des erreurs liées au médicament fait partie des
priorités de la HAS, qui souligne qu’en hôpitaux et cliniques 40%
des événements indésirables graves (EIG) liés aux soins sont dus à
des erreurs liées aux médicaments. Ce sont pour moitié des erreurs
médicamenteuses consécutives à l’organisation de la prise en charge
du médicament, donc des erreurs évitables. Une des situations à
risque observées dans les établissements est la non prise en compte
du traitement personnel du patient lors de son admission à
l’hôpital. Parmi ses différents travaux, la HAS a conduit une
expérimentation sur la conciliation des traitements médicamenteux
en ciblant cette période.
Une expérimentation de 5 ans
La HAS s’est jointe en 2009 à l’initiative High5s, démarche internationale initiée par l’Organisation mondiale de la santé qui ciblait cinq solutions de sécurité prioritaires, dont deux retenues par la HAS : la check-List au bloc opératoire et la précision de la prescription des médicaments aux points de transition du parcours de soins. Concernant cette deuxième solution, le « projet Med’Rec » (Medication Reconciliation en anglais), elle a mené une expérimentation pendant 5 ans avec 9 établissements de santé dans l’objectif de parvenir à tester la faisabilité d’une procédure standardisée efficace et facile à répliquer dans l’ensemble des établissements de santé. Med’Rec visait à prévenir ou corriger des erreurs médicamenteuses par l’obtention, lors de l’admission, de la liste exhaustive et complète de tous les médicaments pris ou à prendre en routine par le patient avant son hospitalisation, qu’ils soient prescrits par le médecin, ou pris en automédication. L’expérimentation a ciblé des patients âgés de plus de 65 ans admis aux urgences puis hospitalisés en court séjour.
Près d’une erreur médicamenteuse corrigée par patient
Les résultats rendus publics mardi montrent que la conciliation a permis d’intercepter 46 188 divergences médicamenteuses sur 27 447 patients conciliés. Parmi ces écarts il faut distinguer d’une part les erreurs médicamenteuses, d’autre part les changements de traitement voulus mais non expliqués par le médecin (divergences non documentées intentionnelles –DNDI). Sur un échantillon de 22 863 patients conciliés (8 des 9 établissements), les divergences se répartissent en 21 320 erreurs médicamenteuses interceptées et corrigées par la conciliation, et 23 381 DNDI. « En moyenne, un patient a présenté lors de la conciliation à son admission […] une erreur médicamenteuse et un changement de traitement non documenté », souligne le rapport de la HAS. Il conclut parmi ses principaux enseignements que « la collaboration entre médecins et pharmaciens nécessaire lors de la conciliation des traitements médicamenteux est un facteur contributif supplémentaire pour optimiser la pertinence des traitements ».
Le temps passé à la conciliation, variable de 30 à 70 minutes, était plutôt en moyenne autour de 30 minutes. Pendant les 5 ans de l’expérimentation le nombre de patients qui ont fait l’objet d’une conciliation à leur admission aux urgences a régulièrement augmenté.
La majorité des établissements a aussi étendu le champ de l’expérimentation à d’autres services ou catégories de patients que ceux visés par Med’Rec. La conciliation a ainsi été testée dans des services de cardiologie, de médecine interne, en rhumatologie et en traumatologie notamment.
Des outils et bientôt un guide
Suite à la publication de ces résultats, la HAS met à disposition des équipes et des établissements les différents outils utilisés et élaborés durant l’expérimentation (mode opératoire de la conciliation des traitements médicamenteux à l’admission ; fiche de recueil des informations par source pour concilier ; guide d’entretien du patient à l’admission en établissement de santé pour l’obtention du bilan médicamenteux optimisé ; fiche de conciliation des traitements à l’admission ; outil de caractérisation de la gravité potentielle des conséquences de l’erreur médicamenteuse ; 3 fiches pédagogiques qui expliquent la démarche à l’aide d’exemples).
Elle a aussi décidé d’élaborer un guide sur la mise en œuvre de la conciliation des traitements médicamenteux en établissements de santé (à l’admission, aux transferts, à la sortie) prenant en compte l’articulation ville-hôpital, qui sera mis à disposition des professionnels au cours de l’année 2016.
Dominique Monnier