
La carcinose péritonéale est l’une des complications les plus redoutables des cancers ovariens. Elle pose des problèmes thérapeutiques difficiles qui exigent une stadification préopératoire précise de la maladie, car certaines localisations péritonéales vont contre-indiquer la cytoréduction chirurgicale ou encore la stratégie HIPEC (hyperthermic intraoperative intraperitoneal chemotherapy) qui peut être couplée à la précédente. L’existence de métastases systémiques est, par ailleurs, une autre contre-indication à ces méthodes thérapeutiques invasives qui n’en représentent pas moins le seul espoir de survie prolongée dans ces carcinoses péritonéales.
La technique d’imagerie idéale devrait permettre un bilan exhaustif de toutes les localisations secondaires, qu’elles soient péritonéales ou systémiques. Force est de reconnaître qu’à l’heure actuelle, qu’il s’agisse du scanner, de l’IRM ou encore de la tomographie par émission de positons (TEP) couplée à la tomodensitométrie (TDM) et réalisée après injection d’un analogue du glucose, le déoxyglucose marqué par le fluor 18 (FDG), aucune de ces techniques ne répond à ces exigences. De fait, c’est certainement le scanner multicoupes, avant et après injection de produit de contraste qui est le plus contributif, quant au choix de la stratégie thérapeutique, même s’il a ses limites. Il est même l’examen de référence, quand il est réalisé de manière rigoureuse et méthodique, a fortiori quand il est complété par une cœlioscopie exploratrice.
Scanner multicoupes vs 18F-FDG-TDM
C’est d’ailleurs ce que suggèrent les résultats d’une étude rétrospective dans laquelle ont été incluses 59 patientes atteintes ou soupçonnées d’être atteintes d’une carcinose péritonéale d’origine ovarienne. Dans tous les cas, un scanner multicoupes et une FDG-TEP-TDM ont été systématiquement réalisés, ce qui a permis de calculer l’index de carcinose péritonéale (ou PCI, peritoneal carcinomatosis index). Ce dernier a par ailleurs été estimé au cours de l’intervention, la valeur ainsi obtenue servant de référence.
Sur les 59 participantes, 55 étaient atteintes d’une carcinose péritonéale confirmée et quatre d’entre elles ont répondu complètement à une chimiothérapie néo-adjuvante. Les valeurs moyennes du PCI étaient les suivantes, selon la technique utilisée : (1) chirurgie : 9,46 ± 7,70 ; (2) scanner : 3,69 ± 3,96 ; (3) FDG-TEP-TDM : 2,25 ± 1,02. Si l’on raisonne en termes de détection globale de la maladie, le rapport de vraisemblance positif (RV+) du scanner, qui prend en compte sensibilité et spécificité s’est avéré supérieur à celui de la TEP-TDM, respectivement 15,3 (intervalle de confiance à 95 %, IC, 8,35-28,04 versus 3,47 (IC, 3,36-5,11). C’est l’inverse pour le rapport de vraisemblance négatif (RV-), soit 0,67 (IC, 0,61-0,73) vs 0,82 (IC, 0,76-0,88). Cette tendance des RV s’est vérifiée pour toutes les régions abdominales explorées.
Les résultats de cette étude rétrospective confirment ceux d’autres études antérieures et justifient la stratégie préopératoire actuelle face à une carcinose péritonéale ovarienne. C’est le scanner multicoupes, avant et après injection d’un agent de contraste, qui est la technique privilégiée, même si elle sous-estime l’étendue et le nombre des implants péritonéaux, si l’on se réfère aux constatations opératoires. La FDG-TEP-TDM fait moins bien dans le bilan de l’extension péritonéale de la lésion ovarienne, mais elle garde son utilité dans la détection des métastases extrapéritonéales, notamment systémiques qui pèsent également lourd dans le choix de la stratégie thérapeutique.
Dr Philippe Tellier