ALTER-EGO : que pourrait apporter la robotique aux patients souffrant de schizophrénie ?

Le projet européen ALTER-EGO, présenté par Delphine Capdevielle (Montpellier), a pour objectif d’améliorer les interactions sociales dans la schizophrénie par l’intermédiaire de la création d’une architecture cognitive interactive implémentée dans des agents artificiels, avatars et robots humanoïdes.

Avec ces robots, les chercheurs vont jouer sur la similarité du mouvement et du comportement. Et pour ce faire, ils utilisent sur des robots des capteurs qui mesurent et capturent le mouvement de leur interlocuteur. Ils extraient ensuite les signatures motrices de chacun des individus pour les ré implémenter dans l’avatar.

Cette recherche est basée sur la théorie de la ressemblance et de l’imitation (mimicry). L’imitation entre deux interlocuteurs est en effet une interaction active. Issue des neurosciences, cette technique suggère qu’il est plus facile d’interagir avec quelqu’un à l’apparence similaire à la nôtre. Elle suggère aussi qu’en imitant autrui, on peut affecter le jugement et le comportement que l’on manifeste à son égard.

“ Si un avatar me ressemble ou s’il fait les mêmes mouvements que moi en même temps, indique Delphine Capdevielle, psychiatre au CHU de la Colombière à Montpellier, je vais mieux retenir ce qu’il va me dire, donc la thérapie sera peut-être plus efficace ”.
Des techniques de scanner corporel, des systèmes de détection de mouvements et des modèles mathématiques complexes ont été utilisés pour créer des avatars réalistes et efficaces. Ce qu’ils ont pu être par exemple auprès de patients déments chez lesquels les robots peuvent améliorer :

- la santé en diminuant le niveau de stress et en augmentant les réponses du système immunitaire ;
- l’humeur, en diminuant le sentiment de solitude ;
- les interactions sociales et la communication.

Dans les troubles du spectre autistique, les robots qui sont moins complexes, plus simples et plus prévisibles que les humains, permettent de nouveaux stimuli sensoriels. De plus, par la simplification de feedback sociaux, ils sont plus facilement perçus de telle sorte qu’en captant l’attention, ils peuvent déclencher des comportements sociaux, améliorer l’implication et l’engagement, augmenter les niveaux d’attention…

Par ailleurs, les robots peuvent adapter leurs comportements en temps réel et peuvent fournir et s’engager dans le feedback par des comportements valides, constants et prévisibles. Les feedbacks sociaux jouent un rôle primordial dans le cadre des interactions sociales et comme les robots peuvent produire des émotions faciales, …

C’est dans ce cadre que l’équipe montpelliéraine étudie la schizophrénie et plus particulièrement la capacité de ces patients à identifier la valence des émotions faciales d’un robot humanoïde (versus des émotions faciales humaines) et à étudier si les caractéristiques humaines du robot peuvent influencer la perception de ces émotions. Les premiers résultats ont montré une corrélation négative entre symptômes négatifs et précision de la reconnaissance de la valence émotionnelle. Une deuxième expérience a montré que les patients souffrant de schizophrénie ne bénéficient pas lors d’une tâche de synchronisation du feedback social du robot (suivre les mouvements du robot ET percevoir ses émotions) en raison de leurs déficits exécutifs.

« Il semble donc qu’il y ait un frein à l’utilisation des robots dans cette pathologie, même s’ils sont bien acceptés par les patients. Ils restent cependant des outils prometteurs pour évaluer les troubles des interactions sociales et améliorer les compétences sociales et les interactions », conclut Delphine Capdevielle.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Références
Capdevielle D: ALTER-EGO : La robotique au service de l’interaction sociale dans la schizophrénie. 15ème congrès de l’Encéphale (Paris): 18-20 janvier 2017.

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