
La prise en charge de l‘incontinence fécale est actuellement l’objet de nombreuses recherches. La prévalence de la maladie est difficile à apprécier tant le sujet reste tabou, mais la qualité de vie des personnes atteintes est gravement altérée. Les stratégies classiques, telles que les modifications diététiques, la rééducation ou la prise de médicaments ont généralement peu d’effet. La prise en charge chirurgicale a un succès variable et est associée à un risque non négligeable de complications.
La neurostimulation des racines sacrées a par contre fait la preuve de son efficacité. Elle nécessite toutefois une petite intervention et le coût du matériel n’est pas négligeable. Une autre technique a émergé, la stimulation périphérique du nerf tibial. Celle-ci permet en effet d’atteindre les racines sacrées et de modifier les réflexes de contraction/relaxation intervenant dans la continence. Il s’agit d’une alternative simple et peu invasive à la stimulation du plexus sacré. Deux techniques sont proposées : la stimulation percutanée (PTNS) ou la stimulation transcutanée (TENS). La première semble avoir une efficacité supérieure.
Un essai randomisé comparant les effets d’une vraie et d’une fausse stimulation
Une équipe du Royaume-Uni a réalisé, il y a quelques années, une méta-analyse des publications consacrées à l’utilisation de la PTNS dans l’incontinence fécale et en a conclut que le taux de succès de cette technique se situait entre 52 % et 82 %. La même équipe a alors décidé de mettre sur pied un essai randomisé contre placebo où ils ont inclus 227 patients. Les uns ont été assignés au traitement par PTNS (n = 115), les autres recevant une fausse stimulation « placebo » (n = 112). Le protocole de l’étude prévoyait 12 séances hebdomadaires de 30 mn de stimulation.
Le seuil de 50 % de réduction des épisodes hebdomadaires d’incontinence, fixé comme limite d’efficacité, a été atteint dans le groupe PTNS par 38 % des patients, contre 32% du groupe placebo, la différence n’étant pas statistiquement significative (Odds ratio ajusté 1,28 ; intervalle de confiance à 95 % 0,72 à 2,28). Cependant, il est confirmé que la PTNS présente un certain intérêt, puisque le nombre hebdomadaire moyen d’épisodes d’incontinence passe de 6 à 3,5 dans ce groupe. Mais pour les auteurs, il n’est pas certain que cette réduction soit réellement ressentie comme un progrès par les patients.
Ces résultats, en opposition avec ceux de la méta-analyse précédente réalisée par la même équipe, vont toutefois dans le même sens que ceux d’une étude française de Leroi et coll. qui montrait au bout de 3 mois une réduction d’un peu plus de 30 % des épisodes d’incontinence pour la moitié environ des patients traités, contre 27 % avec le placebo, alors que Eléouet et coll. observaient que même de petites variations dans les scores relevés avaient une traduction clinique.
L’éditorialiste du Lancet qui publie cette étude remarque qu’un biais pourrait être intervenu et modifié les résultats : en effet un plus grand nombre de patients du groupe PTNS ont arrêté leur traitement continu par lopéramide (29 % vs 11 %).
Les auteurs ne se laissent pas décourager et prévoient des études pour rechercher une efficacité sur le long cours et sur certains sous-groupes de patients, notamment ceux qui présentent des impériosités.
Dr Roseline Péluchon