
Londres, le vendredi 21 août 2015 – La Grande-Bretagne s’est engagée il y a désormais plus de vingt ans dans une lutte sans relâche contre tabagisme qui a connu des résultats plus que significatifs : la proportion de fumeurs est aujourd’hui inférieure à 20 %, quand elle dépassait largement les 30 % dans les années soixante-dix. L’arme principale de cette victoire aura été de fortes augmentations des prix faisant des cigarettes britanniques quasiment les plus coûteuses d’Europe. Mais le système de santé du Royaume Uni n’a pas méconnu les autres mesures habituelles : interdiction de fumer dans les lieux publics, restriction de la publicité et prochainement introduction du paquet de cigarette neutre. Dans cette lutte ininterrompue contre le tabac, l’arrivée de la cigarette électronique a été, comme dans de nombreux autres pays, observée avec une certaine circonspection. Quelques interdictions ont commencé à être édictées, telle l’impossibilité d’utiliser le dispositif dans les prisons ou aux abords des centres médicaux. Cependant, la position officielle n’était pas encore connue, ni l'avis des autorités sanitaires sur l’éventuelle bénéfice de la cigarette électronique.
Bien moins dangereuse que le tabac
Mercredi, la publication du rapport de l’agence officielle Public Health England a donné une vision claire, sans l’ambiguïté que l’on rencontre fréquemment de notre côté du Channel, sur la cigarette électronique. Concernant tout d’abord sa dangerosité, une étude a été diligentée et menée par des chercheurs indépendants du Centre des études sur le tabac et l’alcool de l’université Queen Mary et du King’s College. Ses conclusions sont sans appel : la cigarette électronique est « 95 % moins nocive que le tabac » estime l’étude. « Il y a eu cette dernière année un glissement général, chez les jeunes comme chez les adultes, vers l’idée inexacte que la cigarette électronique est au moins aussi dangereuse que la cigarette » regrette le rapport, qui évoque notamment la médiatisation trop importante accordée à des résultats dont l’interprétation pouvait être sujette à caution. De la même manière, les experts de Public Health England battent en brèche l’hypothèse selon laquelle la e-cigarette pourrait constituer une porte d’entrée dans le tabagisme.
Bientôt des cigarettes agréées par la MHRA ?
Ces données établies, quelle place dès lors accorder à la cigarette électronique pour le sevrage tabagique ? Sur ce point, les experts admettent que les études manquent pour affirmer que ce dispositif est significativement plus efficace que les méthodes traditionnelles. Néanmoins, ils observent que sa popularité inégalée est très probablement un atout qu’il ne faut pas négliger. Aussi, les experts du Public Health England plaident-ils pour que la cigarette électronique s’impose désormais de manière incontournable dans l’éventail des moyens mis à la disposition des médecins accompagnant leur patient dans le sevrage tabagique. Ainsi, alors que la Medicines & Healthcare products Regulatory Agency (MHRA) s’est récemment vue attribuer le pouvoir de régulation de la cigarette électronique, les auteurs du rapport espèrent qu’elle pourra prochainement accréditer certains produits comme spécifiquement dédiés au sevrage. Les médecins pourront-ils directement prescrire ces cigarettes électroniques homologuées ? Pour les spécialistes de santé publique et de lutte contre le tabagisme, il s’agit indéniablement d’une chance à saisir : « Les cigarettes électroniques peuvent changer la donne pour la santé publique » a ainsi affirmé le Pr Ann McNeill, du King’s College de Londres, qui a participé aux travaux de Public Health England. On notera par ailleurs qu’en ce qui concerne l’interdiction de vapoter, les experts britannique suggèrent de revenir sur certaines interdictions et notamment celle concernant les prisons.
Messieurs les Anglais, vapotez en premier !
Ces préconisations ont évidemment été immédiatement saluées par les défenseurs du vapotage. Il faut dire que c’est la première fois qu’un pays prend une position aussi ouvertement favorable à la cigarette électronique, alors que ces derniers mois ont été au contraire marqué par une multiplication des restrictions et interdictions. En tout état de cause, l’attitude britannique contraste drastiquement avec les hésitations et ambiguïtés françaises. Pour l’heure, les résultats des un et des autres en matière de lutte contre le tabagisme plaident plutôt en faveur de Messieurs les Anglais.
Aurélie Haroche