Première vague hospitalière : une mortalité de 19 %
Paris, le mercredi 7 octobre 2020 - La DREES (Direction
de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques)
publie une revue détaillée des données hospitalières de la première
vague épidémique.
Notons, en préambule, que le pic d’admission a eu lieu le 27
mars (3 634 entrées) : « l’effet du confinement est donc devenu
visible 11 jours après son instauration » notent les auteurs.
Il aura encore fallu attendre une semaine pour que le nombre de
personnes hospitalisées commence à décroître, en raison d’une durée
médiane de séjour en MCO* de 10
jours.
Une cohorte de plus de 90 000 patients
L’institut statistique du ministère de la santé a pris en
compte les dossiers de 90 778 patients hospitalisés pour Covid-19
entre le 1er mars et le 15 juin 2020 en MCO. Elle a en
effet exclu de ses travaux 11 866 fiches incomplètes.
Grâce à ces données on observe que la durée médiane
d’hospitalisation pour Covid-19 est de 8 jours, lorsque le
traitement n’a pas nécessité de soins
critiques** et de 20 jours lorsque des
soins intensifs ont été nécessaires.
Figure 1 : durées de séjour
totale et par type d’hospitalisation, pour l’ensemble des patients
passés en MCO, et pour ceux passés ou non en soins
critiques
Sans surprise, l’âge médian des patients hospitalisés pour
Covid-19 est élevé atteignant 71 ans et 25 % avaient plus de 83
ans.
Les statisticiens notent également que les hommes sont
surreprésentés en hospitalisation conventionnelle (55 %) comme en
soins « critiques » (70 %).
19 % des patients hospitalisés ont nécessité des « soins
critiques »
Au total, dans cette cohorte de plus de 90 000 patients, plus
de 17 000 sont passés par les « soins critiques » dont 27 %
sont décédés. Notons ici, que si 31 % des personnes hospitalisées
sont âgées de plus de 80 ans, elles ne représentent que 8 % des
patients de soins intensifs…
Après la phase aiguë différents parcours « types » se
dessinent : le retour à domicile pour 74 % des patients, les
admissions en SSR*** (5 %) et les
hospitalisations avec un « long passage par les soins
critiques » (2 %). Ainsi, 1 % des personnes hospitalisées
durant la première vague était encore hospitalisées le 22
septembre.
Age médian au décès pour Covid-19 à l’hôpital : 81 ans
L’âge médian des personnes mortes à l’hôpital est de 10 ans
supérieur à celui des personnes hospitalisées : 81 ans. Notons sur
ce dernier point que selon les chiffres de Santé publique France
l’âge médian au décès lié à une Covid-19 est de 84 ans. Cet écart
s’explique par les morts survenues en EHPAD et à domicile. Toujours
concernant les décès à l’hôpital, on notera qu’ils sont loin d’être
majoritairement survenus après un passage par les « soins
critiques ». Ainsi, seuls 27 % des décès ont eu lieu en soins
critiques.
Figure 2 : taux de mortalité
à 90 jours par âge et sexe
Au total, le taux de mortalité après hospitalisation pour
Covid-19 est très élevé, puisqu’il avoisine les 19 % (17 % chez les
femmes, 21 % chez les hommes). Rappelons néanmoins ici que la
mortalité générale des infections à SARS-CoV-2 reste discutée. En
France, la mortalité des personnes testées positives est d’environ
5 % (30 000 décès sur 600 000 tests positifs). Selon que l’on se
base sur une estimation basse de séroprévalence (5 % de Covid +) ou
haute (15 % de Covid +) dans notre pays, la mortalité des sujets
infectés par le SARS-CoV-2 se situerait entre 0,3 et 1
%.
A titre de comparaison, pour la saison grippale 2018-2019, on
avait constaté : 10 700 hospitalisations et 1800 passages en
réanimation pour grippe et une mortalité de 5,8 % toutes
hospitalisations confondues et de 19 % en soins intensifs (BEH
N°28, 2019).
Concernant l’hôpital, pour lequel nous disposons désormais de
données consolidées, le principal facteur de variation est l’âge :
ainsi le taux de mortalité à 90 jours passe de 2 % chez les moins
de 40 ans, à 15 % chez les 60-70 ans et 33 % chez les plus de 80
ans.
Figure 3 : taux de mortalité
à 90 jours par âge et type
d’hospitalisation
Les auteurs soulignent que la mortalité à 90 jours a diminué
nettement au cours du temps (division par deux au moins entre les
entrées de début mars et celles de mi-juin), indépendamment de
l’évolution de l’âge et du sexe des personnes hospitalisées. Si ce
phénomène « pourrait s’expliquer par une meilleure connaissance
de la maladie », les auteurs estiment surtout qu’elle est en «
grande partie liée à l’amélioration de la situation épidémique
(…) En effet, la diminution de la pression épidémique a pu
permettre aux hôpitaux d’admettre davantage de patients présentant
des formes moins graves et bénéficiant donc de meilleures chances
de survie ».
Aussi, comme le soulignait le Pr Bruno Megarbane (Réanimation
médicale, Hôpital Lariboisière, Paris) au JIM : « pour pouvoir
comparer la mortalité des patients » à deux moments de
l’épidémie et évaluer les bénéfices des nouvelles prises en charge
« il faudra, très probablement, ajuster la mortalité observée à
la gravité, on ne peut comparer que des groupes de gravité
identique ».
Paris-Marseille : match nul ?
Enfin, on se souvient que devant les députés de la commission
d’enquête de la gestion de crise de l’Assemblée nationale, le
Professeur Didier Raoult avait évoqué l’existence d’une nette
différence quant à la mortalité des patients atteints de Covid-19
entre les services de réanimation de Paris et de Marseille.
S’appuyant sur « un travail disponible en ligne », celui-ci
avait affirmé que « la mortalité dans les réanimations ici (à
Paris) est de 43%. Chez nous (à Marseille), elle est de 16%
».
Figure 4 : taux de mortalité
à 90 jours par catégorie d’âge et par région d’hospitalisation*, et
nombre de décès
* De gauche à droite : ARA :
Auvergne-Rhône-Alpes ;BFC :
Bourgogne-Franche-Comté ;BRE : Bretagne
;COR : Corse ;CVL
: Centre-Val de Loire ;GES : Grand Est
;HDF : Hauts-de-France ; NAQ : Nouvelle
Aquitaine ; NOR : Normandie ; OCC : Occitanie ; PAC :
Provence-Alpes-Côte-D’azur ; PDL : Pays de
Loire.
Les chiffres de la DREES ne permettent pas de distinguer entre
la capitale et la cité phocéenne.
Néanmoins, on observe bien un taux de mortalité à 90 jours «
supérieur à la moyenne nationale en Île-de-France, dans le
Grand-Est et dans les Hauts-de-France » qui pourrait être lié
notamment « aux disparités des populations de chaque région en
termes de comorbidités et de facteurs de risques, à la situation
épidémique locale, ou au taux d’hospitalisation dans la région,
sans que la présente étude ne permette de trancher » soulignent
les auteurs. En tout état de cause, on ne retrouve pas d’écarts
entre la région PACA et l’Ile de France d’une ampleur aussi
importante que celle mise en avant par le patron de l’IHU. Ainsi,
n’y-a-t-il jamais plus de dix points de différence entre les taux
de mortalité des hôpitaux franciliens et ceux des établissements
provençaux.
*MCO : médecine, chirurgie, obstétrique
** Dans cette étude les soins critiques correspondent à des soins
intensifs qu’ils aient eu lieu dans un service ad hoc ou non.
Rappelons que durant la première vague hospitalière, de nombreux
patients ont bénéficié d’une oxygénation dans des services de
médecine classique ou des « unités Covid ».
*** SSR : Soins de suite et réadaptation
J'ai du mal à comprendre le titre liés à l'histogramme. Si l'on regarde le graphe partout les bâtons sont plus élevés en IDF/ PACA, voir au moins 2 fois plus pour la catégorie (50/60) et ± 0,5 pour les autres catégories. De plus les auteurs de l'étude : " observe bien un taux de mortalité à 90 jours « supérieur à la moyenne nationale en Île-de-France, dans le Grand-Est et dans les Hauts-de-France ».
Vous écrivez : "Ainsi, n’y-a-t-il jamais plus de dix points de différence entre les taux de mortalité des hôpitaux franciliens et ceux des établissements provençaux." 10 points de différence n'est-ce pas une différence qui permet de distinguer IDF/ PACA ? Si les points correspondent au % du graphique, lorsque les % doublent cela devrait distinguer les populations.
Philippe Villeneuve, Podologue-Ostéopathe
Polemique
Le 11 octobre 2020
Pourquoi finir votre article sur une polémique de chiffres pour laquelle vous n’avancez aucun argument satisfaisant si ce n’est rajouter du discrédit à tout cela ? Ce n’est d’ailleurs pas la première fois. Dommage...
Philippe Garcia (pharmacien)
L'art d'embrouiller le débat
Le 11 octobre 2020
Submergés par les chiffres, dopés par les statistiques en tous genres, noyés sous les avertissements et les alarmes de toutes catégories, on finit par entendre une petite musique qui nous dit : est-il possible de dire les choses et leur contraire à quelques lignes d'intervalle? Réponse oui. Je vous lis : "9 % des patients hospitalisés ont nécessité des « soins critiques » Au total, dans cette cohorte de plus de 90 000 patients, plus de 17 000 sont passés par les « soins critiques » dont 27 % sont décédés. Notons ici, que si 31 % des personnes hospitalisées sont âgées de plus de 80 ans, elles ne représentent que 8 % des patients de soins intensifs"…
Question : Nous sommes bien d'accord? Si 27% des 9% sont décédés, cela représente 2,43% des malades hospitalisés. Oui? Non, c'est autre chose juste après.
"Au total, le taux de mortalité après hospitalisation pour Covid-19 est très élevé, puisqu’il avoisine les 19 % (17 % chez les femmes, 21 % chez les hommes). En France, la mortalité des personnes testées positives est d’environ 5 % (30 000 décès sur 600 000 tests positifs). Selon que l’on se base sur une estimation basse de séroprévalence (5 % de Covid +) ou haute (15 % de Covid +) dans notre pays, la mortalité des sujets infectés par le SARS-CoV-2 se situerait entre 0,3 et 1 %".
Alors là on dirait du Rocard. Si les décisions sanitaires sont prises en considérant ces raisonnements, nous pouvons craindre le pire pour l'économie. Du moment qu'on a oublié que pendant des semaines au printemps le Ministère de la Santé recommandait de ne pas porter le masque et que dans de nombreux CHU une circulaire de la Direction générale interdisait aux soignants de le porter, tout va bien.