Dépistage du cancer du sein : un impossible débat ?

Paris, le vendredi 24 février 2012 – La Haute autorité de santé (HAS) a au début du mois préconisé un renforcement du dépistage organisé du cancer du sein. Cette recommandation ne peut est l'occasion de rappeler qu’existent encore des interrogations sur la pertinence d’un tel dispositif. Pour mieux connaître les enjeux de ce débat, le Conseil de l’Ordre des médecins a invité trois experts à se prononcer sur le sujet : le Professeur Agnès Buzyn, présidente de l’Institut national du cancer (INCA), le docteur Philippe Autier, vice président de l’Institut international de recherche et de prévention de Lyon (IPRI) et le président du conseil de l’Ordre, le docteur Michel Legman, qui a notamment mis en place la campagne de dépistage organisé du cancer du sein dans les Hauts de Seine.

Mêmes études, chiffres totalement différents

Les réflexions livrées par ces trois spécialistes semblent mettre en évidence l’inévitable influence de ses propres convictions dans la façon dont on interprète les mêmes résultats. Il en est par exemple ainsi des conclusions des différentes études internationales quant à l’efficacité en terme de réduction de la mortalité du dépistage organisé. Le docteur Philippe Autier martèle ainsi que « Son impact est nul ou marginal » et ajoute que « Même si le taux de participation en France atteignait les 80 %, cela ne changerait rien ». Pourtant, Agnès Buzyn dont on suppose qu’elle a eu connaissance des mêmes travaux que son confrère assure : « Les études internationales montrent une baisse de 20 à 30 % de la mortalité par cancer du sein dans les pays qui pratiquent le dépistage organisé depuis au moins quinze ans », même si elle reconnaît qu’il est difficile de « distinguer les effets du dépistage de ceux du progrès médical ». Dès lors, face à cette impossibilité d’aboutir à une interprétation convergente des mêmes résultats, la seule issue semble de s’intéresser au bénéfice individuel. C’est sur ce terrain que se place le docteur Legman qui évoque ces patientes « de plus de 50 ans qui n’ont pas profité du dépistage, certaines par négligence, et qui ont un cancer à un stade trop avancé ».

Surdiagnostic : cherchez l’erreur !

Même discordance quand le bulletin de l’Ordre interroge les experts sur les risques de surdiagnostics et de faux positifs. Le Professeur Buzyn évalue « le risque de surdiagnostic de 5 à 10 %, plutôt proche de 5 % », quand sans donner de chiffres le docteur Autier indique : « Les cancers in situ peuvent être volumineux sans qu’on ait une idée de leur évolution et des mastectomies totales sont pratiquées. Les femmes sont ainsi pénalisées d’être allées au dépistage ! ». Bref, on le voit, sur ce sujet, il paraît difficile de proposer un discours dépassionné et objectif.

Aurélie Haroche

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