Fœtus à la limite de la viabilité : il n’y a pas que l’âge gestationnel qui compte

En dessous de 26 semaines, plus le terme est bas, plus la mortalité et la morbidité néonatales sont lourdes, mais, à terme égal, deux extrêmes prématurés ont parfois des évolutions fort différentes. Il faut donc « aller au-delà de l’âge gestationnel [AG] ».

Dans cet esprit, l’étude de JE Tyson et coll., incluant plus de quatre mille nouveau-nés de 22 à 25 semaines a établi que, outre l’AG, 4 facteurs avaient un impact sur le pronostic d’un extrême prématuré en soins intensifs : le sexe, une corticothérapie anténatale, une naissance unique/ multiple, et le poids de naissance (1). Son pendant obstétrical éclairerait la conduite à tenir devant un fœtus à la limite de la viabilité pour lequel on discute une extraction par césarienne et/ou une réanimation en salle de naissance.

A défaut, une étude monocentrique et rétrospective propose deux algorithmes pour estimer en anténatal les chances de survie d’un tel fœtus, et ses chances de survie sans complications majeures à court terme (2).

Ses auteurs ont revu les dossiers obstétrico-pédiatriques de singletons bien formés, nés vivants à des termes de 22 à < 26 sem., à des poids de 300 à 1 397g (95e percentile pour 25 sem.), qui avaient eu une échographie dans les sept jours précédant la naissance. Ils ont mis en relation l’AG et des caractéristiques anténatales (mensurations fœtales, poids fœtal estimé, rupture de la poche des eaux, corticothérapie, etc.) avec la survie et des complications à court terme liées à la prématurité (rétinopathie stade III ou IV, hémorragie intraventriculaire de grade III ou IV, leucomalacie périventriculaire, dysplasie broncho-pulmonaire, entérocolite ulcéro-nécrosante chirurgicale, et convulsions).

Le terme moyen des 179 sujets retenus était de 24,1 semaines et leur poids moyen de 602 g, très proche du poids fœtal estimé (605 g). Soixante-deux (environ 35 %) ont survécu, dont 22 sans complications majeures à court terme.

Pour la survie, les éléments prédictifs anténatals positifs sont un AG ≥ 24 sem., un poids fœtal estimé ≥ 494 g, une longueur fémorale >39 mm, des membranes intactes et une corticothérapie. La probabilité de survie est obtenue en divisant 1 par (1 + e), où « e » est l’exponentielle d’une variable qui combine les facteurs prédictifs  précédents. L’algorithme a une sensibilité de 85,5 %, une spécificité de 70,6 % et une aire sous la courbe ROC de 0,835.

Pour la survie sans complications majeures à court terme, les éléments prédictifs retenus sont l’AG, la corticothérapie et la couleur de peau. L’algorithme, similaire à l’algorithme de survie, a une sensibilité de 94,7 %, une spécificité de 34 % et une aire sous la courbe ROC de 0,738.

Cette étude est limitée, mais elle montre la voie à une recherche clinique visant à affiner la prédiction anténatale de la survie des fœtus de moins de 26 semaines et, par là, à améliorer le « counseling » des parents et la prise de décision obstétricale, à la limite de la viabilité.

Dr Jean-Marc Retbi

Références
1) Tyson JE et coll. : Intensive care for extreme prematurity – Moving beyond gestational age. N Engl J Med 2008; 358 : 1672-1681
2) Schenone MH et coll. : Prenatal prediction of neonatal survival at the borderline viability. J Maternal-Fetal Neonat Med 2010 ; 23 : 1413-1418

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