
Les mécanismes de déclenchement de la sclérose en plaques (SEP) sont encore mal connus. Des facteurs environnementaux ont été incriminés, notamment certaines infections virales. Les enquêtes épidémiologiques ont aussi mis à jour l’implication de facteurs génétiques et plus de 100 gènes ou loci génétiques ont été décrits comme associés à la maladie. Il est encore difficile de déterminer précisément la part de chacun de ces deux types de facteurs dans l’apparition de la SEP.
De nombreuses enquêtes familiales ont été menées sur le risque de récurrence familiale et une récente méta-analyse a répertoré plus de 500 études portant sur le risque familial de SEP. Ces études comportent toutefois souvent un certain nombre de biais, de recrutement notamment. C’est ce qui fait tout l’intérêt d’une étude suédoise, basée sur les registres nationaux et quasiment exhaustive, répertoriant plus de 28 000 patients atteints de SEP.
Les auteurs ont procédé à des enquêtes familiales poussées. Ils ont évalué le risque brut et le risque familial corrigé selon l’âge, sensiblement les mêmes que ceux qui étaient attendus en se référant aux travaux antérieurs, avec, dans les couples parents-enfants, le risque le plus élevé pour les filles, et parmi les enfants, un risque là aussi supérieur pour les sœurs des patients atteints, le risque maximum après ajustement sur l’âge étant pour les sœurs d’un garçon atteint.
En revanche, l’évaluation du risque relatif recelait quelques surprises. Une comparaison a été réalisée avec des groupes contrôles appariés, issus de la population générale, pour évaluer le risque relatif de récurrence familiale. Ce dernier s’avère moins élevé que prévu. Pour exemple, le risque de récurrence parmi les frères et soeurs (λs) est de 7,1 (intervalle de confiance à 95 % : 6,42-7,86), alors qu’il était estimé à 16,77 dans la méta-analyse de 0’Gorman et al. de 2013 (Neuroepidemiology 2013; 40 : 1-12.)
De même, le risque de « transmission » parents-enfants ou entre les autres membres de la famille est inférieur à celui rapporté dans la méta-analyse.
Et surtout, malgré une prévalence inférieure de la SEP chez les hommes, le risque relatif est le même pour la descendance que ce soit le père ou la mère qui est atteint, contrairement à ce qui était affirmé jusqu’à présent. Il apparaît un risque de transmission plus élevé du père à ses fils que de la mère à ses fils, mais les auteurs sont prudents sur ce point. En revanche, quand c’est le père qui est atteint, le risque relatif est le même pour les filles et les garçons. Finalement, le risque relatif le plus élevé s’avère être pour un garçon dont le frère est atteint. Aucune augmentation de risque relatif n’est retrouvée chez les parents du second degré, si ce n’est avec les cousines du côté du père.
L’importance du facteur génétique a pu être évaluée en faisant intervenir près de 75 000 paires de jumeaux, parmi lesquels 315 étaient atteints de SEP. Il est moins important que ce qui était prévu, avec une héritabilité estimée à 0,64 (0,36 – 0,76). En comparaison, les facteurs environnementaux compteraient pour 0,01 (0,00-0,18). La SEP reste donc toujours une maladie transmise génétiquement, qui apparaît avec le concours de facteurs environnementaux, mais le risque relatif familial paraît bien inférieur à ce qui est généralement admis.
Dr Roseline Péluchon