
En avril 2012 un nouveau coronavirus a été isolé chez l'homme au Moyen-Orient. Ce virus baptisé MERS-CoV (pour Middle East Respiratory Syndrome Coronavirus) est responsable d'infections respiratoires sévères souvent létales malgré la réanimation. Fin avril 2014 on dénombrait 417 cas et 123 décès survenus principalement dans la péninsule arabique (source INVS). Bien que des transmissions interhumaines aient été décrites dans quelques cas, l'épidémiologie des infections à MERS-CoV est en faveur d'une transmission à partir d'un réservoir animal (qui pourrait être la chauve souris) avec peut-être un hôte intermédiaire animal.
Un travail conduit à l'hôpital King Abdul Aziz de Jeddah en Arabie Saoudite démontre de façon formelle le rôle du dromadaire dans la transmission du virus.
Un dromadaire enrhumé
Tout débute en novembre 2013 par l'hospitalisation en réanimation pour un syndrome respiratoire aigu d'un homme de 44 ans. L'interrogatoire apprend aux cliniciens que ce patient possède un troupeau de 9 dromadaires dans une étable située à 75 km de Jeddah et s'en occupe de façon rapprochée. Or 4 de ces animaux ont été malades et ont présenté un écoulement nasal une semaine avant le début des symptômes du patient. Celui-ci a été en contact direct avec les sécrétions nasales de l'un des dromadaires à qui il a appliqué un traitement local.
Tandis que le malade était pris en charge en réanimation une enquête virologique et sérologique était mise en œuvre avec écouvillonnages nasals répétés du patient et des 9 dromadaires, recherche du virus sur des cultures cellulaires réalisées à partir de ces prélèvements, recherche de l'ARN viral sur les différents échantillons prélevés, sérologie itératives à la recherche d'anticorps anti-MERS-CoV chez le patient, ses proches et ses dromadaires. De ces examens il ressort en synthèse que le virus était présent dans les sécrétions nasales du malade (sur 4 prélèvements successifs) et chez l'un des 9 dromadaires lors du premier écouvillonnage (il s'agissait de l'animal qui avait été soigné par le patient). Le génome du virus isolé chez le malade et l'animal était identique.
Une transmission du dromadaire à l'homme
Les examens sérologiques ont permis de démontrer que pour le patient, il s'agissait d'une infection récente avec une séroconversion en cours d'hospitalisation tandis que l'infection du dromadaire porteur du virus avait précédé le cas humain sa sérologie initiale étant déjà positive. Le virus semblait avoir circulé dans le petit troupeau depuis un certain temps, la sérologie anti- MERS-CoV étant positive chez plusieurs de ces dromadaires dès le premier prélèvement et une élévation des taux d'anticorps ayant été constatée chez plusieurs de ces animaux. Il semble donc que le patient a bien été contaminé par les sécrétions nasales de ce dromadaire et non l'inverse et que chez le dromadaire l'infection soit (généralement) spontanément résolutive.
Le dromadaire apparaît donc comme un hôte intermédiaire du virus, le réservoir animal pouvant être la chauve souris comme l'ont montré des travaux récents sur une chauve souris capturée dans une tombe égyptienne.
Malheureusement, malgré la réanimation, l'état respiratoire du patient s'est aggravé et il devait décéder 15 jours après son admission.
Des précautions à prendre là où le virus circule
En pratique, dès avant cette publication, l'OMS recommandait de prendre des précautions d'hygiène lors de contacts avec un chameau, sa viande ou son lait, de bien cuire la viande de camélidés et de pasteuriser le lait avant toute consommation. Quant aux sujets à risque d'infections sévères à MERS-CoV (atteints de diabète, d'insuffisance rénale, de maladies pulmonaires chroniques ou immunodéprimés), il leur est recommandé d'éviter tout contact avec des chameaux dans les régions ou le virus circule.
Dr Céline Dupin